LE COEUR DES DRAGONS

Le Royaume Ecaille de Diamant

Un épais manteau de neige recouvrait les terres du Royaume Ecaille de Diamant ne laissant que les douces viornes hivernales, fleurs aux petits bouquets d'un rose pâle et discret, pour colorer les jardins royaux. Aussi rude soient-ils, ni les hivers ni les tempêtes ne surent balayer l'immense arbre qui produisaient ses magnifiques feuilles. Aussi longtemps qu'il pouvait se souvenir, le roi Johan avait toujours connu cet arbre. Enfant, sa mère aimait lui conter des histoires aux pieds de celui-ci. Aussi, à la mort de celle-ci il ne put se résoudre à l'enterrer en autre lieu. 

A genou, face au caveau de ses défunts parents, vêtu d'un manteau en fourrures de lynx albinos, le roi Johan Seivorn priait. Les yeux fermés, les mains gantées de cuir serrées, il sentait la brise glaciale lui griffer les joues et transformer ses mèches non attachées de sa longue chevelure bleu en fouet, avant d'être caressé par les doux pétales tombant de l'arbre. Bien qu'il ait appris à apprécier les viornes autant que sa mère, le roi ne savait se promener dans les jardins royaux depuis qu'elle l'eut quitté rendant sa prière plus sacrée alors.

- Roi Johan, les préparatifs sont finis.

A quelques pas de son altesse royale se trouvait une mince silhouette encapuchonnée toute vêtue d'une tunique en velours aux couleurs prune ne laissant paraitre que ses bras dénudés d'un blanc aussi pâle le ciel.

- Vous ne voyez donc pas que je prie ?

- Aucun dieu ne vous aidera, votre altesse, soupirait la silhouette. Mais moi, je le peux.

- Non sans contrepartie. Avait-il répondu en se relevant

Le roi Johan regardait une dernière fois l'arbre majestueux avant de tourner les talons en direction de son interlocutrice, laissant derrière lui le douloureux souvenir de sa mère. Il ne pouvait alors que voir ses yeux, similaire à ceux d'un serpent, ses pupilles très contractées verticalement entourées de bronze. 

Tandis qu'il s'approchait, la silhouette abaissait sa capuche, dévoilant ses courts cheveux verts et son visage si doux et jeune qu'on ne pouvait s'imaginer les atrocités dont elle était capable, seuls ses yeux pouvaient la trahir. D'abord déstabilisés par ceux-ci, le roi Johan avait fini par s'habituer jusqu'à en être l'un des seuls de son royaume à être capable de la regarder dans les yeux sans avoir peur d'être maudit.

- Je ferais de vous le plus grand roi que cette terre ait connu.

Alors très proche de son interlocutrice, le roi Johan, aussi grand soit-il, baissait la tête afin de plonger son regard dans ceux de la mage.

- Et vous serez la plus grande mage d'Aldoseim. Lui avait-il répondu d'un ton agacé

- Mais surtout votre mage, mon roi. Disait-elle en posant une main sur sa poitrine

Le roi savait qu'il était dangereux de fixer un mage dans les yeux, certains ayants des capacités de voyance, elle serait en capacité de lire en lui comme dans un livre ouvert sans jamais le lui révéler mais cela ne l'empêchait pas de prendre ce risque pour prouver sa confiance en elle. Bien qu'en réalité, il se méfiait de la sorcière comme du loup qui dort. Il ne doutait pas qu'en cas de défaite, Eimaev l'abandonnerait, peut-être même qu'elle serait capable de la trahir si l'ennemi lui offrait plus. Toutefois, sa puissance était si dangereuse qu'il ne put se résigner à l'idée d'en faire une alliée.

- Qu'est-ce qu'une mage sans roi à seconder ? Lui avait-il demandé de manière rhétorique

- Qu'est-ce qu'un roi sans royaume, votre Majesté ? Lui avait-elle répondu à son tour sans hésitation, le sourire en coin