Soirée Assasienne

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En ouvrant la porte de mon chez moi, je décidai de prévenir les filles.

- « Faites gaffe, Michelle va tenter de vous amadouer pour sortir. Refermez vite la porte derrière vous histoire de ne pas la laisser filer.

- T'as un chien ? m'interrogea Elisa

- Une chatte, répondit Justine, la plus mignonne sur Terre tu verras. »

Michelle n'attendit pas un instant et je la vis accourir jusqu'à nous pour se faufiler entre nos gambettes. La porte claqua instantanément.

- « Oh noooon, s'exclama Elisa, elle est... et ses yeux... »

En un bref coup d'œil, Justine et moi nous comprîmes. Elisa nous montrait pour la première fois une émotion, faisant preuve de son humanité. On s'est déjà demandé si cette fille n'était pas un robot conditionné uniquement pour donner de l'amour à Théo. Quand on cherche à vaincre l'ennui, c'est vrai qu'on a tendance à partir un peu trop loin dans notre réflexion.

En entrant chez moi, les filles déposèrent automatiquement leurs vestes sur le porte manteau situé dans ma « mini entrée ». Sur leur droite se trouvent les toilettes, dans lesquelles j'ai pris soin de mettre une énième bougie senteur feu de bois. C'est sans aucun doute mon odeur préférée. Réconfortante, apaisante, délicieuse, c'est ma madeleine de Proust à moi. Et malgré la quantité de celles-ci que j'ai disposées un peu partout dans l'appart, ce sentiment me revient à chaque fois. Pleins de bons souvenirs d'Italie me reviennent en tête, un sentiment de confort familier m'envahit.

Elisa s'avança vers la pièce à vivre principale, composée d'un bar à l'américaine ouvert sur le salon. Elle complimenta le lieu d'un air enjoué. La vue sur les toits de Paris de mon petit balcon attira particulièrement son attention. C'est vrai que le ciel pommelé saupoudré de tâches roses ajoutait une atmosphère particulière. Mais depuis que j'ai emménagé, c'est surtout le passage au ton orangé qui me transcende. Il réchauffe la pièce, et les cœurs inconsolables.

- « Super charmant ton appart ! Elle est où ta chambre ?

- Juste derrière toi. »

Justine prit les devants et ouvrit la porte de ma cameretta. Après s'être affalée sur le lit sur sa droite, elle me demanda :

- « Elle est passée ou Michelle ?

- Elle doit être sous le lit, lui répondis-je. »

La blonde était postichée devant ma bibliothèque.

- « Tu lis beaucoup ? s'empressa-t-elle de me demander.

- J'essaie, mais depuis la L3 c'est devenu chaud de lire autre chose que des livres de droit.

- Tu m'étonnes, lança Justine en récupérant Mimi entre ses mains. Elle adorait lui faire faire l'avion, Michelle détestait. La bête finissait toujours par sortir du jeu.

- Mettez vous à l'aise, je vais prendre une douche, finis-je par dire. »

08 : 43 pm

On était prête. Elisa s'était détendue, Justine parlait calmement, et mes joues commençaient tout juste à chauffer après la bière que je m'étais enfilée d'une traite.

- « 6èmeétage droite » indiqua Justine aux garçons, son téléphone à la main.

Je décidai de m'apprêter un minimum, tout en sachant que je n'avais personne à impressionner. Ça fait toujours plaisir de se faire belle pour soi, alors j'enfilai un jean comme d'habitude, un col roulé noir moulant mon buste, assorti de plusieurs bijoux dorés : c'était la tenue adéquate selon Amandine. Adéquate pour une soirée entre potes, parfaite pour paraître soignée sans trop en faire selon ses dires. Je sais que je peux faire confiance à ma meilleure amie pour ce genre de conseils. Mais comme toujours, qui dit soirée « Assasienne » dit soirée sans Amandine. Je crois que je lui ai mal vendu le type d'étudiants qui s'y trouvent depuis que je suis à la fac. Dès ma rentrée en première année, j'avais pourtant tenté les présentations, sans succès.

Nathan et ses deux potes s'installèrent sur le canapé marron en cuir usé. Après avoir trinqué, je commençais à faire la connaissance de l'un des deux inconnus ; un blondinet au crâne rasé qui savait tenir la conversation. Je me rendis compte qu'on avait pas mal de centres d'intérêt communs, ou plutôt d'habitudes de quartier. Lui aussi venait d'emménager deux rues plus loin. L'ambiance était détendue, les capsules de bière se multipliaient sur la table basse par dizaine, et le croissant de lune apparut à la nuit tombée.

La sonnette retentit à nouveau. Elisa accourut à la porte retrouver son Jules.

- « Salut ! s'exclamèrent deux voix à l'unisson. »

Debout, caché derrière Théo et sa pile de pizzas en main, Mathis se tenait droit dans mon champ de vision.

03:61 amOù les histoires vivent. Découvrez maintenant