Nuage de Jais - Les solitaires et les voyageurs

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Nuage de Jais rampait discrètement entre les herbes verdoyantes, sous un soleil éclatant qui réchauffait l'atmosphère. Cela faisait à présent plusieurs longues lunes que Cœur de Feu et Plume Grise l'avaient conduit dans la ferme de Gerboise, un solitaire, afin d'échapper à Griffe de Tigre. Le jeune matou appréciait davantage sa nouvelle vie que celle d'un chat des Clans, mais il n'avait jamais oublié ses anciens amis.

Il huma l'air et repéra le fumet appétissant d'une souris. Il se tapit alors en position de chasse puis, repérant sa prise, s'immobilisa. Il bondit ensuite vivement, brisa la nuque du rongeur et saisit délicatement le petit corps dodu entre ses crocs. Dans la ferme où il avait trouvé refuge, la chasse était facile et les proies nombreuses, et surtout très grosses. Nuage de Jais rejoignit son compagnon dans la grange et tous deux partagèrent un véritable festin.

À la fin de l'après-midi, alors que le soleil d'apprêtait à disparaître derrière les montagnes, les deux matous entendirent les fougères frémir et sentirent une odeur de félin inconnue. Une petite chatte écaille de tortue, un gros matou au pelage fauve et un chat brun tacheté émergèrent des buissons environnants. Ils devaient faire partie des chats errants qui, de temps à autre, cherchaient un abri pour la nuit.

Les trois nouveaux arrivants s'assirent dans l'herbe, face à Nuage de Jais et Gerboise qui les saluèrent d'un signe de tête.

— Salutations ! miaula Nuage de Jais. Qui êtes-vous ? Vous cherchez quelque chose ?

Le chat doré les salua à son tour, rapidement imité par les deux autres. Puis il prit la parole :

— Salutations ! Je m'appelle Soleil. Et voici Aurore et Écorce.

Il désigna tour à tour la femelle écaille et le mâle brun.

— Nous sommes de passage et nous ne cherchons pas querelle. Nous étions simplement en quête d'un endroit où passer la nuit.

— Vous pouvez venir dormir dans la grange, répondit le chat noir en désignant le bâtiment de la queue. Il y a largement assez de place pour cinq et les souris ne manquent jamais. Au fait je me nomme Nuage de Jais et lui, c'est Gerboise.

Alors que les félins s'engageaient sur le sentier menant à la ferme, Écorce grommela :

— Vous croyez qu'on peut leur faire confiance ? Nous aurions pu continuer d'avancer. Je suis parfaitement capable de nous déceler un abri sans avoir besoin de l'aide d'un étranger !

— Écorce, tu n'es qu'une cervelle de souris ! rétorqua Aurore. Je suis fatiguée, et ne peux plus continuer très loin. Ces chats nous ont gentiment offert leur aide. Je ne vois pas pourquoi ils nous voudraient du mal. Je sais que tu n'aimes pas dépendre des autres, mais tu dois reconnaître que leur ferme a l'air accueillante. Je sens d'ici l'odeur du gibier !

— Entendu. Mais qu'ils ne s'avisent pas de penser que nous sommes faibles !

Les deux solitaires guidèrent les trois chats errants à l'intérieur de la grange puis les invitèrent à chasser. Nuage de Jais remarqua qu'Aurore regardait ses pattes avec un air gêné.

— Qu'il a-t-il ? Tu ne sais pas chasser ? s'enquit le matou noir.

— Je n'ai jamais appris, répondit la femelle comme une excuse. C'est toujours Écorce qui chasse pour moi.

— Ne t'en fais pas, je vais te chercher à manger, proposa le solitaire.

— Non, je m'en charge ! intervint Écorce voulant sans doute prouver ses capacités.

La lune était haute dans le ciel lorsque les cinq félins eurent le ventre plein. Chacun avait mangé à sa faim. Gerboise questionna les trois chats errants :

— Pouvez-vous nous en dire plus sur vous ? D'où venez-vous ?

Soleil commença à raconter :

— Nous venons de l'endroit où le soleil sombre dans l'eau.

Sous les regards étonnés de Gerboise et Nuage de Jais, il expliqua :

— C'est très loin d'ici. Cela ressemble à une sorte de rivière avec une seule rive. Chaque soir, le soleil plonge dans les vagues et saigne jusqu'au rivage, sans un bruit. Je vivais là-bas depuis ma naissance. J'y ai fait la connaissance d'Écorce et de sa compagne, Aurore, qui venaient d'avoir une portée de trois chatons.

— C'était de magnifiques chatons ! ajouta la chatte écaille d'une voix teintée de tristesse. Un jour, je jouais avec eux près de l'eau quand une vague a emporté l'un d'entre eux.

Ses yeux s'embuèrent lorsqu'elle termina :

— Je ne l'ai jamais revu...

Écorce se frotta contre sa compagne pour la réconforter. Aurore poursuivit son récit :

— Pour éviter qu'une catastrophe similaire ne se reproduise, Écorce et moi-même avons décidé de partir. Mais nos petits, me reprochant la perte de leur frère, n'ont pas voulu nous suivre...

— Cet accident m'a rappelé le jour de la mort de mon frère, enchaîna Soleil. J'ai donc choisi de suivre Aurore et Écorce. Ensemble, nous avons traversé des landes, des forêts, des montagnes. Nous avons affronté des rats, des renards, des blaireaux et bien pire encore. Puis nous sommes arrivés ici.

— Vous êtes les bienvenus, miaula Gerboise. Vous pouvez rester autant de temps que vous le voulez.

— C'est gentil à vous, le remercia Écorce. Mais un long chemin nous attend demain. Nous repartirons à midi. Nous allons nous coucher à présent. Bonne nuit !

— Bonne nuit ! répondirent les solitaires.

Le lendemain, lorsque Nuage de Jais se réveilla, les trois chats errants étaient prêts à partir. Avec Gerboise et Nuages de Jais, ils chassèrent une dernière fois. Puis midi arriva.

— Merci encore pour votre accueil chaleureux, déclara Soleil. Il est temps pour nous de poursuivre notre voyage. Peut-être nous retrouverons-nous un jour.

— Ce fut un plaisir, ronronna gerboise en retour. Bonne chance à vous !

— Bonne chance ! renchérit Nuage de Jais.

Enfin, sans se retourner, les chats errants s'éloignèrent puis disparurent dans les broussailles.

Les fanfictions de Coeur d'Obsidienne (LGDC)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant