Chapitre Trente-huit

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PDV HUNTER

        Je n'aurais jamais dû accepter de venir.

        En fait je n'ai pas eu vraiment le choix quand Monica s'est pointée chez moi en compagnie de mon père pour m'informer que j'avais exactement dix minutes pour me préparer. Je ne savais même pas où j'allais, juste qu'il fallait que je sois apprêté et de bonne humeur. J'ai un peu foiré pour la deuxième chose.

        Quand j'ai reconnu le domicile de Rain, j'ai franchement hésité à héler moi-même un taxi pour quitter cet endroit. Puis je me suis souvenu que mes parents pensent dur comme fer que je sors avec elle. Alors j'ai fermé ma gueule et j'ai fait de mon possible mon exterioriser mes mauvais démons.

        Ca a foiré ça aussi.

        Je n'avais aucune idée de la conduite à tenir quand je suis entré dans son appartement. Pour être franc je ne pensais plus jamais y retourner. 

        Et puis je l'ai embrassée. Sans son accord et sans vérifier si le mien était nécessaire, j'ai succombé bêtement à mes foutues pulsions. J'ai même hésité à leur donner un nom.

        Ma fierté est puissante, ce qui me fait penser que je mentirais en disant que je n'ai pas apprécié ce baiser. Etrangement Rain a intensifié le geste. Quant à moi, j'ai essayé de gader mon sang-froid jusqu'au bout, une incroyable faculté bien répartie dans notre famille.

        Quand je me suis lancé, je redoutais la réaction de Rain. Elle aurait été capable de faire une scène dans mon oreille pour ne pas gêner le reste des invités. En parlant d'eux, son patron ne me plaît pas du tout. Je sais parfaitement à quoi il resemble, un snob qui essaye de la jouer je-fais-des-compliments-tout-mignons-pour-la-mettre-dans-mon-lit. Autrement dit un homme en manque, et il veut Rain, je l'ai vu dans la façon dont il la regardait. Ses yeux dansaient bordel ! Je me chargerais de son cas plus tard.

        J'aurais accepté sans broncher que Rain réagisse autrement. Je l'ai abandonné comme un animal errant l'autre jour, ce dont je suis peu fier une fois avoir mis mes idées au clair. Mais j'avais désespéremment besoin de réfléchir. Seul. Trop de choses, trop de souvenirs et de pièces se bousculaient dans ma tête pour finalement s'emboiter et me faire comprendre ce que je soupçonnais déjà à la découverte de son saignement.

        Rain a été victime de mes monstruosités.

        Quand je suis sortie de mon appartement cette nuit là, la première chose que j'ai regretté, c'est d'avoir enfilé un bermuda pas du tout chaud. Mes poils se hérissaient à chaque pas que j'effectuais dehors. J'ai ensuite culpabilisé de l'avoir laissé dans cet endroit.

        J'ai vu les larmes pendrent sur son visage, je les ai vu couler le long de son cou. J'ai entendu chaque sanglots quand j'ai fermé la porte, comme si le mur qui les contenait de puis trop longtemps venait de céder brutalement, en un seul choc. Je me suis même demandé si je ne devais pas rentrer pour lui faire comprendre que ce n'est pas de sa faute.

        Que putain...Tout est à cause de moi !

        Mais je n'en ai rien fait, continuant ainsi de me maudir loin d'elle. J'ignore encore par quelle force céleste j'ai réussi à ne pas céder, à ne pas la prendre dans mes bras pour lui dire à quel point j'étais désolé. Mais même si j'avais eu le courage de tout lui avouer, je l'aurais perdue quelques minutes après. Je me suis accordé une dernière embrassade, et j'ai fuit comme un idiot.

        Rain a raison, j'ai toujours cette alternative quand je suis piégé, quand aucune autre solution ne me vient à l'esprit.

        On ne pardonne pas les choses impardonnables. On les bannit, on les éradique, on essaye de les oublier ou on fait de notre mieux pour ne plus avoir à les rencontrer à nouveau. Rain m'aurait haït sur le champ si je lui avais tout avoué, j'en suis certain. Puis elle aurait pleuré à cause de ce que ça lui aurait rappelé. Et le pire dans tout ça, c'est que je l'ai entendu pleurer il y a quelques années, de la même façon dont ses yeux parlaient la nuit où je suis partie.

Hunter (2014) [EN COURS DE RÉÉCRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant