Chapitre n°24

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Un étrange silence planait sur le Royaume d'Agar. La guerre venait de prendre fin. Les derniers soldats avaient déposé leurs armes sous la puissance écrasante des nobles et des Exilés. Qui plus est, le Roi Nicolas Krueger n'était plus, ni le démon d'Agar. L'ancien régime venait de prendre fin, laissant étrangement place à un sentiment bicolore. Le soulagement de la fin de ce gouvernement sans pitié, mais aussi une sorte de « manque ». Tant de vies perdues. Tant d'âmes innocentes parties en fumée. Thomas observa ses alliées, inclinant la tête pour remercier le prince Éric Borgeis d'avoir encouragé les nobles à se battre. Puis son regard se reporta sur le château tout aussi silencieux.

Malgré ses nombreuses blessures, il monta sur le dos d'un cheval et partit avec quelques Exilés comprendre ce qui s'était passé à l'intérieur. Il tenta de cacher l'inquiétude qui l'assaillait au sujet de sa fiancée ainsi que sur Samuel et Andréa. Une part de lui voulut croire qu'ils avaient trouvé une solution, que son mauvais pressentiment n'était qu'une illusion et non une réalité. Il venait déjà de perdre son meilleur ami, il ne supporterait pas de perdre un membre de sa « famille ». La colère le prit lorsqu'il entra dans une immense pièce et qu'il vit le corps de l'amirale Erna Rügen. Une mauvaise aura l'entoura, effrayant quelque peu les Exilés à ses côtés. Il aurait presque été prêt à la piétiner des sabots de sa monture s'il n'était pas aussi pressé. Il souffla profondément pour décharger cette colère et continua son ascension vers la salle du trône, guidé par le prince Éric Borgeis. Le silence était pesant, mais il fut brisé par un petit bruit de fond et Thomas serra les rênes de son cheval en comprenant qu'il s'agissait de sanglot. Son cœur se comprima alors qu'il avançait vers une immense porte.

La pièce était un véritable carnage. L'immense trône d'or et de pierres précieuses était fissuré, tout comme les murs et le sol en marbre. Chaque portrait des défunts rois était lacéré. Près du trône, se trouvait le cadavre de son ennemi de toujours. L'un des Exilés s'éloigna avant de vomir ses tripes face au cadavre défiguré. C'était comme si sa décomposition avait commencé, même si l'odeur n'était pas présente. Le prince Éric Borgeis s'empressa de descendre de son magnifique destrier pour accourir prendre sa fille dans ses bras.

« — Evelyne ! Je t'en supplie Evelyne. Ne nous laisse pas une nouvelle fois. Ta mère n'y survivrait pas.

— Ne vous en faites pas, son cœur bat », le rassura Thomas en entendant le son distinct du cœur de son amante bien qu'il soit à presque dix mètres de lui.

Les yeux du prince se posèrent sur ceux bleu irréel de Thomas avant qu'il ne hoche la tête et ne prévienne le leader des Exilés qu'il emmenait sa fille pour la faire soigner. Thomas lui en fut reconnaissant. En cet instant, il n'était plus en état de penser. Il avait bien évidemment envie de pleurer de joie de savoir que sa bien-aimée était en vie, mais il ne put savourer ce soulagement. Son regard restait figé sur la scène devant lui. Samuel tenait le corps inerte et hémorragique d'Andréa dans ses bras. Thomas n'entendait pas son cœur. Il ne voyait pas son sang pulser dans ses artères. Tout ce qu'il entendait fut les pleurs incessants et douloureux du brun. Il entendit un petit gémissement à sa droite et remarqua enfin la jeune adolescente. Il demanda à l'un des Exilés de l'emmener immédiatement à l'infirmerie, comprenant qu'il s'agissait de Rina Heredis. Puis Thomas demanda aux autres de partir aider à rassembler les corps. Lui, s'avança lentement et lourdement vers Samuel et Andréa. Il posa doucement sa main sur l'épaule de Samuel qui ne réagit même pas à ce contact extérieur. Il leva à nouveau la main, faisant glisser ses doigts dans les mèches d'un noir obscur d'Andréa et une larme s'échappa.

« — Samuel... Andréa avait fait ce choix...

— Je... Je refuse ! Je... Elle n'a pas le droit...

— Samuel, tu as fait ce qu'il fallait. Tu nous as sauvés. Tu as sauvé Andréa d'une vie de meurtrière qu'elle aurait refusé de vivre.

LES EXILÉSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant