Debout, postée face à ma future équipe, j'attends patiemment que le DRH me laisse la parole. La table de réunion est tellement imposante avec toutes ces chaises autour, qu'elle fait paraître la pièce toute petite, ce qui me donne l'impression d'étouffer. Les murs orange délavés n'aident en rien à me faire sentir plus à mon aise.
Dans un souci de ne pas perdre connaissance devant tout le monde, je me concentre à observer toutes les personnes et tous les regards qui me sont adressés. Je constate rapidement que je ne fais pas l'unanimité. Mon attention s'arrête sur une femme rousse, aux yeux verts destructeurs et au visage peu amical, qui fait des messes basses à son collègue de proximité un homme blond et bien portant qui semble tout aussi fermé. Ils parlent tous deux en toute impunité, comme s'ils étaient seuls. Je poursuis mon tour rapide de l'équipe et constate qu'elle est majoritairement féminine : six femmes pour trois hommes qui me toisent de la tête aux pieds.
Toute cette attention portée à mon égard m'angoisse. Je n'ai jamais aimé être le centre de l'attention. Si ça continue, je vais perdre tous mes ongles à force de patienter dans l'ombre du costume bordeaux de mon nouveau DRH.
— C'est donc ainsi que je vous présente votre nouvelle collègue, Roxane, annonce soudainement l'homme grisonnant placé devant moi, me sortant ainsi de ma contemplation. Mademoiselle Touerya, je vous laisse vous présenter.
Je sens le rouge me monter aux joues. Je ne suis pas de nature timide, mais face au peu de regards bienveillants qui me font face, je perds me moyens.
— Heu... Eh bien... Je... bégayé-je, en laissant les émotions s'emparer de moi.
Je ferme les yeux, respire un grand coup.
"Mais qu'est-ce que tu fais ?", me sermonne ma conscience avec sa tête désapprobatrice. "Tout le monde te regarde et toi tu fermes les yeux ! Mais, Roxane, tu es devenue folle ? "
Oui, j'ai tout à fait en tête que cela ne joue pas en ma faveur mais, m'effondrer ou me mettre à pleurer n'arrangerait pas plus les choses. Quand je rouvre les paupières, c'est un courage tout neuf qui m'habite.
— Je m'appelle Roxane, j'ai vingt-et-un ans et je suis diplômée depuis juillet.
— Super, encore une débutante ! s'exclame la femme rousse de tout à l'heure, me coupant ainsi l'envie d'en dire davantage.
— Marina, un peu de respect, la reprend le cadre Lucas Ruminier, qui est placé à ma droite. C'est de votre nouvelle collègue dont il est question.
Marina et l'homme assis à côté d'elle se lèvent dans un même élan, comme s'ils ne formaient qu'un seul bloc.
— Quand est-ce que la direction arrêtera de nous mettre des jeunes diplômés dans les pattes ? interroge l'homme d'une voix grave.
— Paul a raison, continue la fameuse Marina, de plus belle. En un an, on en est à la troisième. Elles tiennent deux semaines et retournent pleurer dans les jupons de leurs parents. On en a assez de former les bébés infirmiers.
Je suis sous le choc des propos tenus par mes futurs collègues. Ils ne manquent pas d'air, ces deux-là, à croire qu'ils n'ont jamais été dans ma situation. C'est vrai qu'ils ont surement dû être diplômés et passer directement au stade "j'ai de l'expérience". Au moins ils n'ont pas eu à galérer pour trouver un poste, comme c'est mon cas actuellement. Pff, ils m'énervent déjà.
— Le seul bébé dans la salle, c'est toi, Marina, manifeste une jeune femme brune tout en restant tranquillement assise sur sa chaise. Tu nous fais tout un cirque, alors que tu es la première à te plaindre que l'on est en sous-effectifs constamment et que tu ne peux pas poser tes congés quand tu veux.
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Les Chroniques d'une infirmière en Pédopsychiatrie
RomanceRoxane, jeune diplômée de l'école d'infirmière, a des rêves et surtout de l'ambition. Major de sa promo, elle se voit déjà dans un service digne du travail qu'elle a fourni ces trois dernières années. Après avoir fait changer d'avis à son père sur s...