Chapitre 5- Le nouveau professeur

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"Mademoiselle Nao, ouvrez, je vous en prie ! Ne me forcez pas à appeler la reine, elle fera venir la garde pour vous sortir de là !"

La servante s'acharnait sur la porte depuis une bonne heure. La veille elle avait passé sa soirée à nettoyer les taches de vin qu'avait fait le prince dans la salle à manger, ce matin elle avait fait visiter le Palais à la nouvelle princesse, et voilà que celle-ci avait décidé de s'enfermer dans l'atelier de peinture.

Bien qu'iels ne soient pas du même sang, mademoiselle Nao ressemblait déjà beaucoup au prince Ionas. Les deux étaient réticents à obéir aux règles de l'étiquette...

"Que se passe-t-il ?"

La servante sursauta. La reine se trouvait derrière elle, accompagnée des professeurs de bonne conduite pour aristocrates les plus réputés. "Où est ma fille ?"

"Elle... Elle s'est enfermée dans l'atelier et refuse de sortir..."

La reine se tourna vers ses convives. "Voyez, Nao est une enfant sensible qui a grandi dans un milieu difficile. Elle a quelques reflexes assez particuliers... Je vous mets donc en garde: il y a beaucoup de travail à faire avec elle !"

L'un d'eux s'avança, confiant. "Nous n'avons jamais eu affaire à une enfant des bas-quartiers, mais nous sommes les meilleurs dans notre domaine. Nous ferons de votre fille une lady en moins d'une semaine !"

Tandis que les autres professeurs acquiesçaient, le porte s'ouvrit, et Nao apparut. Elle portait la robe orange que la servante lui avait donné, mais elle l'avait déchiré à mi-hauteur et taché de peinture. Ses cheveux, qui avaient pris une heure à être lavés puis tressés avec délicatesse, étaient désormais rassemblés dans un chignon anarchique qui tenait avec un pinceau.

"J'ai pas fini, r'passez dans 3 heures."

Elle claqua la porte.

Les professeurs se regardèrent, reconsidérant l'offre de la reine après avoir vu que leur nouvelle élève était d'une toute autre catégorie que les enfants aristocrates rebelles qu'iels connaissaient.

Quand Nao rouvrit la porte 3 heures plus tard, il ne restait que 5 professeurs.

Le premier abandonna le jour-même, outré que la jeune fille refuse de lui adresser la parole avec les honorifiques dus à son rang.

Les 2e et 3e quittèrent le Palais le lendemain, pris au dépourvu face à leur élève qui n'avait aucun scrupule à lâcher des insultes assez imagées.

La 4e déclara forfait le soir du même jour, quand Nao découpa une nouvelle robe pour en faire une tenue plus confortable.

Le 5e partit le matin du surlendemain, après qu'elle ai passé la nuit enfermée dans l'atelier et qu'elle finisse par s'y endormir.






La reine prenait le thé dans le jardin. Elle qui était toujours d'une classe indéniable, aujourd'hui elle se tenait avachie sur son trône et enchainait les tasses sans profiter de leur saveur, le regard perdu. Elle était dépassée par les évènements. Les meilleurs professeurs, qui arrivaient à obtenir la bonne conduite de son bon à rien de fils, avaient tous abandonné face à Nao. En moins de 3 jours. 

A contrario le prince Ionas, assis dans une posture parfaite non loin de sa mère, semblait savourer le thé le plus délicieux de sa vie. Il était ravi de cette situation, et aurait presque remercié Nao de lui avoir permis de voir ses anciens professeurs en si mauvaise posture.

"Comprenez-vous enfin que cette adoption était une erreur maintenant ?" dit-il dans un sourire. "Intégrer une gueuse parmi la famille royale est impossible. Elle restera rude et malpolie toute sa vie." Il prit une gorgée de thé. "Elle est née comme ça."

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