Décidément, le prince avait la manie de casser tout ce qui avait le malheur de se trouver dans ses mains ! Pas étonnant qu'il soit mauvais dans les arts plastiques, pensa Nao avant de remarquer quelque chose.
Depuis qu'elle était au Palais elle n'avait croisé le prince que lors des repas, où il avait tenu à s'installer le plus loin d'elle possible afin de ne pas être touché par les projections de nourriture qu'elle pouvait faire en dégustant goulument ses plats. Elle l'avait toujours vu avec une expression de mépris ou de dédain à son égard. Il lui était absolument insupportable, et ce sentiment semblait réciproque.
Jamais elle n'aurait cru voir sur son visage un regard de désespoir. Pourtant, et même si cela n'avait duré que le fragment d'un instant, elle l'avait perçu.
"Qu'est-ce qu'il fait là ?"
La voix de Ionas était chargée de colère. Le désespoir avait fait place à une expression de fureur si impressionnante que la peintre demandait si elle aurait le temps de la croquer rapidement... Mais ce n'était pas le moment de penser à cela, Ionas semblait sur le point de se jeter sur Amalio.
Ce dernier s'inclina et lui répondit formellement. "Mes hommages, Prince Ionas. Je suis désormais le majordome privé de mademoiselle Nao, je suis ici pour vérifier qu'elle se conforme à l'étiquette."
S'il était évident que le prince semblait le connaitre et le détester, Amalio quant à lui ne laissait rien paraitre. Son regard bleu était parfaitement neutre.
"Quoi ? C'est toi que ma mère a choisit pour superviser la gueuse ? C'est une blague ?" cracha Ionas.
"J'ai bien peur que non, votre altesse. Aussi, je vous prierai de désigner mademoiselle par un titre correspondant à son rang." répondit le majordome, toujours d'un ton dépourvu de toute émotion.
Les yeux du prince se posèrent sur Nao. Elle frissonna. Jamais personne ne lui avait adressé un tel regard de haine.
"Jamais je ne l'accepterai comme ma famille." Il quitta la salle et claqua la porte.
Nao était encore chamboulée par le regard de Ionas. Elle savait qu'il ne l'aimait pas, mais ne se serait pas doutée qu'il puisse la haïr à ce point.
"Tout va bien, mademoiselle ?" Amalio avait posé une main sur son épaule. Ses yeux de glace était toujours aussi inexpressifs. Comment pouvait-il rester si professionnel après une telle altercation ? Il avait pourtant lui aussi subit le regard du prince ! Que s'était-il passé entre eux pour que ce dernier le déteste à ce point ?
"Wow, les enfants, c'était super !"
Alors que son rôle de professeur aurait dû le mener à calmer l'humeur de son élève, Sigis semblait ravi par le spectacle auquel il venait d'assister, et applaudit.
"Je peux savoir en quoi le fait que le prince s'énerve et quitte la salle sans même avoir pris le temps de ramasser son téléphone est une bonne chose ?" l'interrogea Nao, perplexe.
Sigis lui tendit un carnet de croquis. "J'ai pu capter une expression de pure colère ! Regardez-moi ces yeux !"
Elle resta abasourdie. Nao y avait juste pensé par automatisme, mais lui l'avait vraiment fait. Sigis avait profité de la situation pour croquer la colère de Ionas.
Elle ne put s'empêcher d'en rire. "J'ai eu la même idée !"
"C'est vrai ? C'est génial, ça veut dire que vous avez les bons réflexes !" Il frappa son poing dans sa main. "Si seulement j'avais pu voir son visage de face, ça aurait été parfait !"
"Ah, il m'a regardé, j'ai pu le voir de face ! Attendez je vais vous dessiner ce que j'ai vu..." Elle saisit un crayon et croqua rapidement le visage du prince. "Voilà !"
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Parallèles
General FictionLe monde a toujours fonctionné par castes: en fonction de l'endroit où quelqu'un est né, il y restera toute sa vie. Chacun connait sa place dans l'échelle sociale, et ainsi l'équilibre est préservé. Pourtant, dans le royaume artistique d'Astolium se...