𝟻 | 𝚌𝚒𝚗𝚚

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Bonne lecture !

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Il tient huit jours avant de revenir.

Des pas lents, la tête basse, jusqu'à finalement s'installer sur une chaise. Celle en face de George, qui brise sa conversation avec une vieille femme juste à côté. Il se tourne vers lui, et Spencer peut presque voir le soulagement s'étaler sur son visage.

— Je suis désolé, dit-il, penaud.

— Ne le sois pas. Content de te voir, petit.

Il lui offre un sourire, et Spencer met quelques secondes avant de souffler de soulagement, abaissant ses épaules.

— Je peux prendre les blancs ?

— Prépare-toi, petit. J'ai eu du temps pour lire ton cadeau, et j'ai l'impression d'avoir appris des choses.

George se remonte les manches et replace soigneusement les pièces sur l'échiquier. Heureux, Spencer l'observe même se frotter les mains, et à côté Marc se tourne vers leur partie avec intérêt. Une petite foule arrive autour d'eux, comme d'habitude.

Et vingt minutes plus tard, Spencer descend de sa chaise avec un petit air fier, tandis que George marmonne dans son coin en fixant le plateau, se demandant comment il a pu perdre trois fois d'affilée .

— Bien joué, champion. La prochaine fois c'est à moi.

Marc lui tend son coude, et Spencer relève vers lui un regard perdu. Il attend une seconde avant de laisser échapper un « oh » : il lève son coude à son tour et fait un « check ». Quelques personnes sourient.

— Rentre bien, lui dit George. Passe le bonjour à ta mère, petit.

Spencer se fige un instant. Puis, après avoir dégluti, hoche la tête. Il s'éloigne, finalement, les mains étroitement serrées autour des lanières de son sac. Le parc est presque vide, un joggeur le dépasse, une femme promène son chien.

Quand il sort, en regardant le ciel déjà sombre d'un air mauvais, Spencer a à peine le temps de longer la rue avant d'entendre quelqu'un derrière lui :

— Spencer !

Quelques personnes autour de lui se retournent avant de jeter un regard dans sa direction, et Spencer s'arrête. Lentement, il tourne la tête et voit arriver un homme, qui s'approche en petites foulées. Il n'a pas besoin de parcourir les derniers mètres que Spencer plisse les yeux et le reconnaît.

Un spectateur, qu'il a déjà croisé plusieurs fois. Son corps se tend un instant, puis il se force à faire taire son instinct à vif (sa mère lui dit toujours, tout le temps, que le monde entier veut faire du mal à son fils, et il ne peut pas se laisser désaxer par les paroles d'une femme malade).

L'homme arrive, un peu essoufflé.

— Désolé d'avoir crié comme ça.

Il sourit d'un air avenant.

— J'ai ramassé ça à côté de la chaise où tu étais assis, et...

L'homme déglutit et lui tend un livre un peu corné, où un devoir sur une feuille volante (une dissertation entière sur le point de vue humaniste de l'œuvre) dépasse légèrement. Son livre, son édition des Essais, en langue originale.

Spencer l'observe avec des yeux ronds. Il lève la main, accepte le livre, et laisse échapper :

— Merci... hm...

— Oh, Simon. Je m'appelle Simon.

Il ne lui tend pas la main, et Spencer en est presque reconnaissant. Il acquiesce, à la place.

— Merci, répète-t-il en commençant à reculer pour partir. Au revoir.

— Au revoir, Spencer.

Quand il s'éloigne, l'homme se contente de secouer la main dans sa direction.

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Des bisous !

Vaste est l'horizon || Spencer ReidOù les histoires vivent. Découvrez maintenant