𝟷𝟹 | 𝚝𝚛𝚎𝚒𝚣𝚎

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Bonne lecture !

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Spencer revient au parc un après-midi étrangement chaud. Il n'a pas fait plus de dix degrés depuis des semaines, et tout à coup le thermomètre accroché devant l'entrée de la vie scolaire de son lycée a indiqué dix-sept degrés.

Ça n'a pas grand sens et Spencer a enlevé sa veste pour l'attacher autour de sa taille. Son sac est lourd, aujourd'hui, alors quand il parvient enfin à la place il n'est pas mécontent de pouvoir s'asseoir et le poser sur le sol sec. Il y a du monde, aujourd'hui : plus de spectateurs que d'habitude, et plusieurs sans-abri qu'il n'a encore jamais vus.

Son regard parcourt la foule, tandis qu'il grimpe sur sa chaise, et il imprime tous ces visages dans sa mémoire. Elle est d'ailleurs encore un peu engourdie par toutes les pages qu'il a lues pendant la nuit, toute cette étude qu'un professeur lui a envoyée sur le même papier à lettres que Spencer a utilisé pour décrire son idée (une idée précise qu'il a expliquée en quarante trois pages manuscrites. Il a dû coller au moins quatre timbres sur l'enveloppe). En le voyant sortir de sa chambre, le matin même, sa mère lui a fait les gros yeux en lui disant que s'il veut espérer faire plus d'1m50 plus tard, il doit dormir.

Elle l'a grondé pendant quelques minutes, puis ils ont récité ensemble le début de l'Iliade. En ce moment, sa mère se trouve dans une période si calme et si tranquille qu'il oublie presque qu'il y a un problème, parfois.

Elle lui peigne les cheveux et il peigne les siens en retour, qu'elle garde si longs et si ondulés qu'il se demande si les siens pourraient l'être à ce point. Il ne pense pas que ça lui irait.

— Bonjour, dit-il en relevant la tête vers Marc.

Ce dernier lui offre un sourire fatigué, et commence à replacer les pièces.

— Ça fait un moment, Spencer. Comment ça va ?

— Bien, dit-il honnêtement. Ça va bien. Un professeur de Stanford m'a dit que mes remarques sur le développement des cellules étaient très intéressantes et innovantes. Sa lettre à lui faisait trente-trois pages.

Marc hausse un sourcil.

— Whaou. Impressionnant. Et ce professeur, il sait quel âge tu as ?

Spencer rit un peu, très doucement.

— Non. Il pense que je m'appelle Daniel, que j'ai trente-deux ans, et que j'ai déjà au moins deux diplômes universitaires. Si j'avais dit la vérité, il aurait arrêté de me lire avant d'arriver aux parties intéressantes et innovantes et incroyablement précises. Ses mots, pas les miens.

— Bien sûr. Ses mots, pas les tiens. Il a sûrement raison, et serait certainement encore plus impressionné s'il savait.... qui tu es. Il t'offrirait peut-être même une bourse.

Les jambes de Spencer remuent sous la table.

— Je sais. Mais j'ai déjà plein de bourses qui me sont offertes. Stanford, c'est bien trop loin.

Quand les pièces sont enfin prêtes, Spencer voit que les blancs sont devant lui alors il tend la main pour déplacer son premier pion. Rapidement, il réfléchit à au moins douze stratégies, dont une qui lui permettrait de prendre la dame en quatre coups.

Marc prend le temps de réfléchir, les doigts touchant distraitement le bouc qui s'est formé sur son menton.

Regardant distraitement à droite et à gauche, parcourant des yeux les marcheurs, les coureurs, et les personnes attroupées au niveau des plateaux de jeu, Spencer finit par demander :

Vaste est l'horizon || Spencer ReidOù les histoires vivent. Découvrez maintenant