La lune était haute dans le ciel, éclairant de sa lumière bleutée même les ruelles les plus sombres de la vieille ville. Tous ne semblaient pas trouver ce spectacle aussi magnifique que moi, visiblement. Je pouvais entendre les battements du cœur de cette jeune fille à des mètres à la ronde. Je n'allais pas la blâmer, après tout, on disait la ville dangereuse, la nuit. Entre les bandits, cachés dans les creux entre les bâtiments, prêts à vous suriner pour quelques pièces, et la nouvelle menace qui pesait, depuis quelques semaines déjà, sur la ville... Les gens parlaient de "vampires", tandis que les disparitions se faisaient de plus nombreuses, et que les rares retrouvés avaient été vidés de leur sang. Le genre d'histoire qui vous passerait l'envie de sortir en pleine nuit. Cette pauvre jeune femme avait raison d'être terrifiée. Malheureusement pour elle, elle n'eut pas le loisir de crier à l'aide lorsque mes crocs se plantèrent dans sa nuque.
— C'est la seizième disparition en trois semaines, chef.
Mon adjointe me fixait d'un regard sobre, son éternel air fermé ternissant son visage pourtant délicat. Elle continua.
— Nous devons absolument faire quelque chose. Ces histoires de vampires se répandent de plus en plus parmi la population.
— Assez, la coupai-je, la foudroyant de mon seul œil valide, d'un bleu perçant. Je ne veux pas entendre ces inepties une fois de plus. les vampires n'existent pas, et vous le savez aussi bien que moi. Nous avons affaire à un tueur en série, mettant en scène ses crimes d'une manière dégoûtante, et vous devriez être en patrouille, à sa recherche, plutôt qu'ici à me cracher vos histoires de contes de fées.
— Bien, chef. Pardonnez-moi.
Elle quitta mon bureau d'un pas ferme, tentant au mieux de masquer sa colère, tandis que je laissais échapper la mienne en frappant du poing sur mon bureau. La douleur du choc me fit lâcher une insulte, et le jeune homme qui attendait à l'embrasure de la porte de mon bureau eut l'air déconfit. Je repris tant bien que mal un air calme, et lui fit signe d'entrer. Il s'empressa de s'exécuter, et déposa sur mon bureau le rapport du médecin-légiste. La dernière victime, une femme de 26 ans, avait été, comme les autres, attaquée en pleine nuit, et entièrement vidée de son sang. Sur sa nuque apparaissaient deux marques, semblables à celles d'une morsure. Je soupirai. La journée allait être longue...
Les cloches de l'église sonnaient douze coups, alors que le ciel tacheté d'étoiles renvoyait une faible lumière sur la place de la mairie. Les dernières lueurs disparaissaient derrière les fenêtres tandis que les habitants s'endormaient peu à peu. Personne ne semblait prêter attention aux trois silhouettes sombres adossées à un mur, discutant à voix basse.
— Mes frères, commença le plus grand des trois, nous devrions nous calmer. La rumeur selon laquelle des vampires arpenteraient nos rues se propage de plus en plus. Je vous espérais plus discrets.
— J'ai même aperçu une tresse d'ail clouée à une porte, nota le second en riant.
Le troisième se contenta de sourire, faisant apparaître deux longues canines d'un blanc éclatant, tranchant avec sa capuche noire.
— Il n'y a rien de drôle, vociféra le premier. Le Maître a formulé une requête. Continuons à nous nourrir, mais nous devons changer de méthode. Il nous faut faire croire à la population que des humains ont commis ces crimes. Disposez, maintenant. Il nous faut une victime pour ce soir. Et pensez à apporter du sang au Maître.
Le plus grand des trois s'éloigna, faisant mine de ne pas entendre le "Le Maître n'a qu'à se nourrir seul" grommelé derrière lui.
Le lendemain, mon adjointe m'attendait à la porte du bureau, l'air encore plus renfrogné que d'habitude. Je lui ouvris la porte pour la laisser entrer, puis la rejoint et m'assis, sirotant mon café.
— Encore une victime cette nuit. Un homme, 41 ans. Quelque chose a changé, cependant.
Face à mon regard interrogateur, elle continua.
— Il a été poignardé à plusieurs reprises sur le torse.
— Donc, ce n'est pas l'œuvre de votre prétendu vampire, répondis-je calmement.
— Je suis persuadée que si, chef. J'attends le résultat du légiste, mais il avait, lui aussi, des marques sur la nuque. Nous devrions organiser des patrouilles la nuit. Cela ne peut durer.
— Je suis totalement d'accord avec vous, répondis-je en souriant. Il faut que ça s'arrête. Puisque vous y tenez tant, je vous affecte à la première patrouille. Prenez trois officiers, et ratissez la ville, cette nuit.
— Bien... Merci, chef.
Une fois l'adjointe sortie du bureau, je me mis à sourire. En effet, il fallait que ça s'arrête. Et mon meilleur élément serait sur le coup, ce soir. Je décrochai le combiné du téléphone, et composai un numéro. Au bout de trois sonneries, une voix se fit entendre. "Bonjour, Maître. Quels sont vos ordres?" Le sourire que j'eus à ce moment révéla mes canines acérées. Tout se terminerait ce soir.
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Le Second Carnet
NouvellesLa plume de @SuccubeCeltik griffonnant le carnet, le pinceau de @Pepper_Nodhem enluminant ces fragments tourmentés, entrez dans le Second Carnet de nouvelles. Vous en ressortirez... Changés. ~ Gagnant du concours Les Francos - Première édition, caté...