Capítulo Catorce : Lorsque la lumière inonde les ténèbres

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L'atmosphère au sein du Hueco Mundo n'avait pas pour habitude d'y être agréable, encore moins chaleureuse. Partout dans le palais le froid brûlait les chairs, les ténèbres dominaient l'espace et le silence demeurait assourdissant. Pourtant, cela ne semblait pas réellement embarrasser Aizen, qui, malgré ce changement radical de vie se plaisait à régner sur ce monde chaotique. Assis sur son imposant trône de granit, il patientait les mains posées sur les accoudoirs, la tête droite, fixant la monumentale porte à quelques dizaines de mètres de son siège. Par symétrie, ses doigts se soulevaient et s'abaissaient successivement avec lenteur. Le contact de sa chair sur la pierre rompait le vide auditif présent dans la salle. L'endroit était d'une telle tranquillité qu'Aizen pouvait ressentir les battements de son cœur, paisibles et réguliers, cogner contre sa poitrine. Ses lèvres s'étirèrent lentement sur ses joues lorsqu'il se remémora le putsch prodigieux qu'il avait orchestré. Un véritable jeu d'enfant pour lui que d'avoir réussi à faire ployer le genou aux créatures à la réputation d'insoumises. Personne avant lui n'avait réalisé l'exploit d'unifier ce qui n'était que discorde. De rassembler, en un même lieu, en une même armée, tant d'âmes aussi puissantes que malfaisantes.

Bien qu'au sommet d'une dimension auparavant indomptable, cela ne parvenait pas pleinement à le satisfaire. L'ancien Shinigami voyait grand et désirait plus. Ce qu'il voulait, c'était posséder les pleins pouvoirs sur trois mondes singulièrement différents, et ainsi s'élever au rang divin. Sans cette pierre, impossible de penser à détrôner l'actuelle pourriture qui avait l'impertinence de se faire appeler roi, et de rivaliser contre l'armée de Shinigami prête à se sacrifier pour sauver cet être inutile et abject. Le chemin était encore long, les marches jusqu'aux cieux tant convoités étaient actuellement bien trop frêles pour être empruntées sans risquer la chute.

Agacé, l'ancien capitaine releva le bras droit, serra le poing et déposa délicatement la mâchoire sur ses métacarpes. Sa tête était maintenant légèrement inclinée sur le côté. A l'intérieur, son sang bouillonnait de rage, toutefois, aucune preuve de son exaspération n'apparaissait sur son visage. D'apparence, il restait le même, parfaitement impassible. Fidèle à lui-même, ses traits étaient détendus bien que son reiatsu laissait s'échapper un nuage de fines particules sombres. Son cœur, quant à lui, était empli d'une rancœur sans commune mesure envers l'homme que tous glorifiaient aveuglément. Un pouvoir incommensurable aux mains d'un incapable... quelle ineptie !

« Misérable... » souffla-t-il la mâchoire serrée comme pour essayer d'alléger ce poids qui pesait sur son organe vital. Une fraction de seconde, il sembla que ce fardeau s'allégeait avant de reprendre sa place comme à chaque fois depuis ce jour particulier où sa vie avait pris une tournure inattendue.

Malgré toute cette causticité, un profond sentiment de lassitude commençait à prendre le pas sur sa détermination. Ce monde n'avait pas pour réputation d'y être divertissant, mais il était à des lieux de s'imaginer qu'une dimension peuplée de monstres aussi violents et sanguinaires allait être ennuyeuse à mourir. Il aurait bien fait revenir son jouet, mais il devait être très probablement encore hors d'usage. De toute manière, à quoi bon ? Même le contact de cette femelle Arrancar ne lui était plus aussi agréable. Bien sûr, chacun de leur rapport avait été récréatif. Cette traînée parvenait à le faire jouir, mais cela était bien loin d'être exaltant. Aizen recherchait bien plus qu'un plaisir guidé par de banales réactions biologiques sous l'action de diverses hormones et d'influx nerveux. L'orgasme du corps était bien peu de chose en comparaison de celui de l'esprit...

Nouveau soupir d'agacement. Ses prunelles se baissèrent finalement sur ses membres, elles furent attirées sur ses mains marquées par de fins liserés noirs. Etrange adaptation. Elle parcourait sa peau claire en suivant ces marques énigmatiques qui semblaient ancrées profondément dans sa chair. Les tracés ressemblaient aux sillages qu'empruntaient les vaisseaux sanguins, mais d'une teinte autrement plus obscure. C'était comme si, lors de l'injection de la larme de la désolation, un nouveau système circulatoire s'était mis en place et parcourait désormais son corps, l'inondant d'une énergie nouvelle, dense et méphitique...

De l'ombre à la lumière étincelanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant