L'OBSESSION

Chapitre 15

Gray

J'ai du mal à lâcher prise. J'ai du mal à laisser s'échapper la jeune femme fragile qui s'éloigne de mes bras malgré tout. Juvia plonge ses beaux yeux saphirs dans les miens. Sa demande n'en est pas vraiment une. C'est plutôt une exigence.

Une juste contrepartie aux confidences que j'ai provoquées.

Ce soir, j'ai vu ses murs s'écrouler un à un, et la vraie Juvia, mêlée de force et de failles s'est enfin dévoilée. Et putain, je ne sais même pas quoi ressentir. Mes sentiments oscillent dangereusement entre la plénitude devant sa confiance absolue, la fureur envers ce José que je pourrais pulvériser de mes propres mains, et la honte face à moi même. Et derrière tout ça germe discrètement la graine que je refoule depuis des semaines, celle qui me fait me sentir bien, dès que Juvia se trouve près de moi..

Je dégage de son visage les mèches trempées qui lui barrent les joues, et je n'ai qu'une envie, la ramener dans mes bras. La protéger.

Cruelle ironie n'est-ce pas?

Je suis certainement la dernière personne à pouvoir la protéger.. Mais je lui dois bien la vérité. Tout au moins, une partie.

Dehors, l'orage fait rage, la houle se déchaîne et le vent siffle dans la grotte. La nature explose alors que Juvia, face à moi, attend un geste de ma part, un tout petit geste source d'espoir. Je la trouve juste magnifique en cet instant. Son visage aux traits délicats est à peine éclairé par la lune qui joue à cache cache avec les nuages. Je pose mes mains de part et d'autre de ses joues et capture délicatement ses lèvres. J'ai besoin d'y puiser ma force, mon courage. Je ne cherche pas à approfondir notre étreinte, ni même à détourner son attention.

Mon nez plonge dans sa chevelure ciel et j'inspire son odeur, comme un drogué. Juvia se laisse faire, passe ses bras autour de ma taille et s'abandonne une fois de plus entre mes bras avec un soupir d'aise qui me fait louper un battement.

-Je veux que tu aies confiance en moi, murmure t'elle le front contre mon torse.

Qu'est ce que je peux répondre à une telle demande? Ma confiance, elle l'a déjà. Ce n'est pas pour ma confiance que je crains le plus, non. C'est pour mon cœur, qu'elle accapare de plus en plus..

-Pourquoi tu es venue jusqu'ici?

-Je te l'ai dit, je m'inquiétais pour toi. Meredy m'a dit.. pour aujourd'hui.. pour ta sœur..

Juvia me regarde avec crainte. Le fait que Meredy lui en ait parlé devrait m'irriter, mais j'en suis bien incapable, et soudain, je me rends compte d'une chose. J'ai besoin que Juvia sache. J'ai besoin de lui raconter, c'en est vital. Ultia n'excuse rien de mes faits et gestes, mais au moins, elle saura, pour plus tard.. et moi.. je serai libéré..

-Ultia est morte il y'a trois ans. Il pleuvait aussi ce soir là.

Mes yeux dérivent vers l'extérieur. C'est à mon tour de replonger dans le passé.. je me laisse glisser a même le sol de la grotte. J'ai trop peur de flancher, de m'écrouler devant elle.

Juvia s'installe à mes côtés sans me regarder, puis insère doucement sa main frêle dans la mienne. Je me rends compte qu'elle tremble encore, alors je passe un bras autour de ses épaules, pour lui transmettre un peu d'énergie, mais finalement, c'est elle qui devient la mienne..

-Comme tu le sais, mes parents ont divorcés lorsque j'avais cinq ans. Ultia, elle, en avait six. Mon père venait d'apprendre que ma mère avait eu une liaison juste avant leur mariage et qu'Ultia n'était pas sa fille. Il était dans une rage folle et lui a fait payer son infidélité. Il ne lui a pas donné un seul centime. Ni pour Ultia, ni pour moi. Je crois qu'il m'en a toujours voulu en fait. Peut être même qu'il se demande toujours si je suis bien son fils.. on a vécu chez ma grand mère pendant près d'un an. Elle, elle n'a pas compté. Ni le peu d'argent qu'elle avait, ni son temps, encore moins son amour.