7] Paul

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Je suis assis sur un banc. J'attends Talia. Je sais qu'elle passera par là, enfin, je l'espère.

Cette fille m'intrigue, et mon instinct me dit de l'aider, de lui parler.

Bien que nos histoires soient différentes, elle me fait penser à moi.

Je la vois arriver, le dos courbé, les cheveux légèrement emmêlés.

Elle semble si innocente...

Nos regards se croisent.

Je me lève, mais comme d'habitude, elle ne m'attend pas.

Petit pas de course pour la rattraper.

- Salut !

- Qu'est-ce que tu fais toujours là, à m'attendre ?

- Ben, tu l'as dit, je t'attends !

Elle soupire.

- Pourquoi tu m'attends ?

- Ben je sais pas... j'avoue en baissant la tête. Je ressens comme un besoin de te parler, de te voir, de... T'aider.

- Je n'ai pas besoin d'aide.

Je me tourne vers elle. Ses yeux d'un vert troublants rencontrent les miens.

- Tu sais très bien que si, Talia.

- Je...

Elle baisse la tête.

Après quelques secondes de silence, elle lance un murmure presque inaudible :

- Merci, merci d'être là...

Je lui prend la main doucement en guise de réponse.

Elle me regarde, ne frissonne plus, ne me repousse pas.

Ces yeux perçants sont si clairs, mais paraissent pourtant si sombres...

Mais je perçois quelque chose de différent.

Avant, son regard était vide.

Mais maintenant...

Je ne sais pas.

Je sens juste que quelque chose a changé.

De peu, certes, mais c'est déjà beaucoup.

- Tu n'as pas Instagram ?

Je la regarde, yeux exorbités. Je ne m'attendais pas du tout à cette question.

- Je heu... Non. Pourquoi ?

- Pour savoir. Pourquoi tu n'as pas ?

- Ben j'ai déjà subi du harcèlement, tu le sais ça. Mais aussi sur les réseaux sociaux. Alors j'ai décidé de couper.

Elle me regarde dans les yeux. Les siens sont incroyablement troublants.

***

Cela fait trois mois pile que je connais Talia.

Je la revois encore, tandis que je marchais vers mon lycée, et elle, seule, près d'un arrêt de bus, voulant en finir.

Elle, qui me semblait si triste et perdue.

J'essaye de lui parler tous les jours.

Mais je ne peux pas, évidemment.

Même si mon père ne s'occupe pas de moi, il m'oblige à aller au lycée. Pour pouvoir être chef d'entreprise, moi aussi.

Mais je ne veux pas.

Enfin, là n'est pas le sujet.

Pour Talia, je lui parle donc tant que je peux.

Je sais qu'elle se balade une à deux fois par jours.

Quelques fois vers les 9 heures et une fois vers les 18 heures.

J'essaie de la rejoindre sur les deux horaires, je séchais des cours au début même, mais mon père m'a cramé.

Je continue tout de même, et maintenant, nous arrivons mieux à communiquer.

Aujourd'hui, elle m'a enfin tout raconté, les détails, tout.

Nous sommes assis sur un banc, elle, les yeux embués, moi, la tenant dans mes bras.

Elle ne méritais pas ça, pas tout ça.

Elle, si innoncente...

- On... Je peux venir chez toi ? balbutie t-elle.

Je me redresse.

- Quoi ?!

- Nan mais si tu veux pas...

- Non non ! C'est pas ça. Je... Je ne m'y attendais pas quoi. Heu... Oui oui tu peux venir. Mon père n'est pas là de toute façon.

- Au travail ?

- Oui ... Ou alors en train de baiser une de ses putes.

Elle incline la tête.

- Les hommes...

Elle se lève.

- Je te suis.

Je la prend par la main et l'entraîne vers ma maison.

Je m'assure que je ne vais pas trop vite.

Je la regarde.

Ses cheveux d'un noir brillant volent au vent, je remarque qu'ils sont brossés.

Ils sont plus clairs à certains endroits, rendant sa chevelure voluptueuse et... Magnifique.

Son visage est moins pâle, et je sens dans ses yeux magnifiques une étincelle parmi la noirceur. Un grain de sable dans ce vide immense.

Elle est belle, vraiment belle.

Tandis que nous arrivons devant ma maison, je me rend compte que, même si je le voulais, rien ne serait possible entre nous.

Elle a trop peur des hommes, et si jamais je m'y mettais également, elle serait détruite à vie.

Noir [[TERMINÉE]]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant