J'étais partie il y a 5 ans. À 22 ans, on m'avait nommé le prodige. Concours d'écriture remporté, 100 000 euros à la clé. Je me suis ensuite lancé dans un nouveau récit qui devait tout changer. J'avais mis 3 ans à l'écrire ce livre. À côté de cela, j'avais fait construire une petite maison dans les montagnes, loin de toute civilisation.
Un joyeux messager cherche de fines oreilles et je les avais trouvés. Mais l'idée n'a pas fait l'unanimité. On me visa plusieurs fois pour contrer ce nouveau courant que j'avais créé.
Je suis alors partie, comme je l'avais prévue, dans ma montagne en attendant que les ennemies s'effondrent d'eux-mêmes. J'ai donné les clefs de ma grandeur aux miens. Mais je ne partais pas que pour fuir. J'avais besoin d'être seul. Il fallait que je trouve la solution pour guider correctement.
J'avais quitté ma patrie et mes amis pour vivre seul, reclus. J'avais pris le plus de livres possibles et je m'étais plongé dans la solitude et le savoir.
Ce matin, je me lève en tant que trentenaire pour la première fois. Je sais qu'il est temps. Je prends mes affaires et me prépare à redescendre. Je me dirige vers mon point de vue favoris, une grotte en hauteur.
J'y observe une dernière fois le soleil qui se lève. Il vient m'éclairer comme il l'a fait ces 5 dernières années. J'aime à penser qu'il se lève jusqu'ici pour moi, qu'il se serait lassé de venir dans ces hauteurs si je n'étais pas là pour le contempler.
Et alors que j'admire une dernière fois ce spectacle, j'assiste à une scène étrange. Un aigle vole au loin et il porte dans ses griffes un serpent. Il ne semble pas l'avoir tué, c'est comme s'il le transportait dans les aires.
Je descends ensuite les montagnes pour arriver dans les bois. Tout du long de ma marche, j'aperçois l'aigle et le serpent au-dessus de moi, dans le ciel.
Une fois dans les bois, je rencontre un vieil homme. Je le connais bien, il vivait aussi reclus, mais lui n'étais pas allé en montagne. Il était resté dans la forêt.
Le vieux : Ah je te connais Adler. Mais tu as bien changé depuis la dernière fois. Tu n'es plus la même personne, je peux le voir dans tes yeux. Autrefois tu savais déjà bien danser, mais maintenant je vois que tu t'es encore amélioré, tu marches avec la grâce des danseurs.
Je te sens plus éveillé. Quand tu étais venu pour faire le chemin jusqu'en haut, tu semblais endormie comme tous les autres, mais maintenant je le vois dans tes yeux ; tu es réveillé.
Et que viens-tu faire ici ? Tu veux retourner en bas ? La leçon ne t'a pas suffi ? Tu retournes chez les dormeurs ?
Adler : Je suis un homme, ma solitude m'a suffi, je retourne parmi les miens car j'ai trop besoin d'eux. Et je ne reviens pas les mains vides ! J'ai un présent pour eux.
Il se mit à rire de mes paroles.
Le vieux : Aimer les hommes ? Il y a bien longtemps que j'ai arrêté cette fantaisie. L'homme est trop imparfait, cela me tuerait d'encore l'aimer.
Adler : Moi je l'aime et je l'ai toujours aimé. Je rejoins les miens à présent. Je dois juste régler quelques détails avant. Et toi, depuis tout ce temps tu es toujours dans cette forêt.
Le vieux : Oh moi, j'habite ici. Je compose des musiques, je joue de mon piano, je chante et je m'occupe des animaux qui m'entoure. Et je loue Dieu, oui, surtout, je prie Dieu tous les jours.
Adler : Tu pris, mais tu sais ce qu'il en est. Pourquoi encore prier ?
Le vieux : J'ai foi, je crois qu'il reviendra, qu'il ressuscitera dans quelques générations.
Adler : Tu es bien optimiste pour un vieux. La foi fait encore son effet sur toi, elle est belle à voir.
Le vieux : Oui, il faut bien en avoir en ces temps. Tu n'es pas au courant j'imagine.
Le vieux regarda ailleurs d'un air pensif.
Le vieux : Je te laisserais découvrir ce qu'a fait la civilisation en ton absence par toi-même.
Adler : Rien qui ne soit insurmontable je pense. Les hommes modernes de ce continent ont la tendance à être fort prévisibles.
Et je pris congé du vieux car je ne voulais pas lui rappeler trop longtemps la douloureuse vérité ; Dieu est mort.
J'arriva alors dans le village le plus proche, aux abords de la forêt. En arrivant ici avant d'entrer dans la montagne, j'avais déposé une œuvre importante dans cet endroit. Sur la place principale, une foule était rassemblé. Un spectacle allait se jouer.
Je me rejoignis à la masse et parla à une personne au hasard pour prendre la température.
Adler : Bonjour, je viens d'arriver ici, vous savez pourquoi il y a tout ce monde ?
L'étranger : Bonjour ... Oh, mais vous êtes le grand gagnant du concours national ! J'ai lu le récit qui vous a fait gagner, un chef d'œuvre incroyable.
Adler : Ah, merci. J'ai sorti un autre livre bien plus important après, vous l'avez lu ?
L'étranger eu l'air embarrassé.
L'étranger : Ah oui, j'en ai entendu parler, mais je dois admettre que je ne l'ai pas lu.
Adler : Et du coup, que se passe-t-il ici ?
L'étranger : Ah oui, ici, on attend les résultats du tirage.
Adler : Un tirage pour ?
L'étranger : Et bien voyons, le tirage national pour l'accès à l'immortalité. Tout le monde est au courant depuis le temps. Vous vous êtes retiré dans une grotte ou quoi ?
L'étranger rigolait à ses mots mais il ne savait pas à quel point il avait raison.
Adler : L'immortalité ? Et la puce NeuraBrain, j'en parlais dans le livre que vous n'avez pas lu. Tout le monde en parlait aussi à cette époque. Savez-vous ce qu'il en est advenu ?
L'étranger : Ah mais justement ! Le créateur de cette puce s'est retiré, comme vous, quelques années en dehors de notre monde. Mais lui, il n'était pas seul. Il a fait construire un dôme au-dessus d'une partie de la ville de Californie.
Il y est resté avec des milliers d'individus qu'il avait trié à l'avance. Quand il est ressorti, il annonçait au monde sa nouvelle création, l'immortalité. Il a alors précisé que la dose serait limitée et sous certaines conditions.
Adler : Ha, voilà que les hommes se prennent pour des dieux alors qu'ils ne se sont même pas surpassés.
L'étranger : Oui, chacun à son point de vue sur la question. Ceux qui pensent comme vous sont restés en Europe. Comment se fait-il que vous soyez ici vous ?
Adler : Je rejoindrai les miens quand j'aurais réglé les problèmes de ce continent. De votre côté, vous pensez que vous pouvez améliorer votre propre pensée rationnelle en utilisant la logique. Vous êtes dans l'erreur. L'humain est avant tout un être psychologique. C'est cela qu'il faut d'abord améliorer avant de chercher à savoir calculer plus vite ou à pouvoir vivre indéfiniment. Votregrand manitou n'est pas à la hauteur.
L'étranger : Mais regarder ce qu'il a accomplie, c'est bien la preuve qu'il a réussis à se rendre plus intelligent.
Adler : Vous avez vu l'état de la civilisation ? Quand j'étais partie il était déjà trop tard, ça n'a dû qu'empirer depuis. Un homme vivant indéfiniment mais n'ayant aucun objectif précis en tête ne sert à rien.
L'étranger : Vous êtes bien pessimiste. Ça doit être pour cela que vous êtes si seul ...
Adler : Mais j'ai les miens. Ils m'attendent. Mais je vois que je vous ennuie.
Il me dit un au revoir de politesse et je pars vers la station de train la plus proche. J'ai besoin d'aller encore plus loin dans cette nouvelle nature. Je me dirige vers la ville.
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Trop humain
PertualanganHumain, trop humain. Alex, un homme perdu dans une société obnubilé par l'accession à l'Utopia, la cité parfaite qu'a créée le Précepteur, va perdre son frère et accéder à cette société tant rêvée. Adler, le jour de ses 30 ans, décide d'enfin rejoin...