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PDV S.
Je jette un regard vers Harry pour le voir dormir profondément, une main posé contre sa joue et la bouche légèrement ouverte. Je souris puis je pousse un soupire et je m'extirpe du lit, faisant bien attention de ne pas le réveiller. J'attrape mon portable et un verre d'eau pour ensuite me poser sur le balcon. Je pose mes avants-bras contre la rembarde noire pour prendre appuie dessus. Je regarde les lumières de la ville de Phoenix qui s'allument petit à petit, créant une magnifique scène. Je frissonne lorsque le vent se lève et je sens quelque chose se poser sur mes épaules. Je me retourne et je découvre Harry tenant une couverture dans les mains. Il s'approche d'un pas hésitant puis me la pose délicament.
" Tu ne dors pas ?
- Je t'ai entendu sortir.
- Je suis désolée..."
Il secoue énergiquement la tête, s'humidifie les lèvres et se pose à mes côtés, dans la même position que moi. Il prend une grande bouffé d'air et croise ses mains.
" C'est moi qui devrait s'excuser, je t'ai laissé en plan dans un couloir. "
Je pose ma main sur son épaule et je lui répète une nouvelle fois que je ne veux plus en entendre parler.
" Pourquoi est-ce que tu n'es pas rentrée à New York ?
- Je le voulais, je voulais prendre le prochain bus pour rentrer chez moi et te laisser en plan comme un idiot, mais je ne sais pas ce qui c'est passé, j'ai changé d'avis à la dernière minute.
- T'aurais peut-être dû partir.
- Pourquoi ?
- Comment est-ce que tu peux rester encore ici, avec moi, après ce que je t'ai fais ? A ta place je serai parti. "
Je hausse les épaules et je fixe un point vide devant moins. Je me demande pourquoi je ne suis pas partie, pourquoi je n'ai pas pris le bus pour New York. Je serai rentrée chez moi, je serai enfin tranquille et je n'aurai plus besoin d'entendre Harry se plaindre pour tel ou tel chose, l'entendre me crier dessus quand je conduis ou me dire de me taire quand je commence à chanter une chanson qui passe à la radio. Je crois que dans un sens, je me suis un peu attachée à lui, à ses manières.
" Tu pourrais me parler un peu de toi ?
- Ma vie est vraiment ennuyeuse Sarah.
- Je suis sûr que ce n'est pas vrai, tu dois avoir beaucoup de chose à raconter. "
Il baisse la tête en gloussant puis il finit par se redresser et tirer une chaise en plastique vers lui. Il s'assoit et je fais de même, serrant bien la couverture pour ne pas qu'elle tombe. Harry passe sa main sur sa nuque, gardant toujours le regard fixer devant lui. Il s'éclaircit la voix dans un toussotement.
( Mettre la musique )
" Je n'ai jamais rencontré mon père. Ma mère m'a dit qu'il était mort à la guerre en essayant de sauver un soldat d'une bombe, sauf qu'au final ils ont péri tous les deux. Ma mère a dû se battre pour me nourrir puisqu'on avait pas beaucoup d'argent. Je sais qu'elle se prostituait même si à chaque fois elle me disait que ce n'était pas le cas. J'ai arrêté l'école vers seize pour aider ma mère dans son magasin de légumes, mais ça n'a pas suffit, on a dû fermer. J'ai donc pris des cours par internet, c'était le seul moyen pour moi de rester avec elle et en même temps de continuer mes études. J'ai réussi mon examen d'entrée à la fac de droit et maintenant j'attend ceux du dernier. Ma vie n'est pas très joyeuse. "
Je lui présente mes condoléances pour son père et il hausse les épaules ajoutant que ça ne lui fait rien puisqu'il ne l'a jamais connu. Puis il me retourne la question.
" Tu veux vraiment que je te raconte ma vie ?
- Oui. "
Je coince une mèche derrière mon oreille et je mords ma lèvre inférieure.
" Mes parents m'ont abandonné à ma naissance d'après ce que ma dit ma grand-mère. Ils ne voulaient pas de moi, ils m'ont confié à elle et ils sont partis vivre leur vies. J'ai terminé le lycée, j'ai eu mon diplôme et je suis partie vivre à New York. C'est là que j'ai rencontré Nadine, elle était ma voisine de palier. Quelques mois plus tard on m'a diagnostiqué une tuberculose vraiment petite, on m'a juste prescrit des médicaments mais ça n'a pas fonctionné et ça a empiré. Je suis passée d'un stade primaire à un stade avancé en quelques mois et les médecins m'ont affiché en tête de liste pour recevoir un nouveau poumon, mais aucun ne me correspond, donc maintenant j'essaye juste de vivre ma vie. "
PDV H.
Je la fixe longuement pendant qu'elle parle de sa vie. Je coince quelques fois sa lèvre inférieure entre ses deux ou bien elle boit un peu l'eau qu'elle a versé dans un verre. J'esquisse un sourire lorsque je la vois baisser la tête et poser sa main sur sa cuisse. Je ne lui dirai jamais par fierté, mais je suis bien heureux qu'elle ne soit pas retournée à New York et qu'au contraire, elle soit encore avec moi, assise sur cette chaise en plastique, une couverture entourant son petit corps. Je ne pense pas que j'aurai pu continuer de faire ce Road Trip si elle n'était pas revenue.
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