Chapitre 3

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Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent.

- Sarah ! Alors comment ça s'est passé ?

Le regard d'Elisyan, illuminé par l'espoir, interrogea Sarah avec enthousiasme.

- Très bien ! répondit-elle
- Mais encore...
- Je crois que je suis prise !

Elisyan ne lui répondit pas mais lui sauta dans les bras.

- Euh... Je ne te connaissais pas aussi tactile, dit Sarah surprise.
- C'est l'émotion !

L'ascenseur descendit jusqu'au 30ème étage. Durant le cours trajet, la nouvelle venue observa l'endroit où elle risquait de passer le plus clair de son temps. L'ascenseur était constitué de trois parois métalliques et d'une vitre transparente offrant un magnifique panorama sur le quartier de la Défense.

Les portes s'ouvrirent à nouveau et elle suivit Elisyan à travers les couloirs jusqu'à son bureau.

- C'est l'heure de ma pause. Tu veux qu'on aille manger quelque part ? lui demanda-t-elle.
- Oui, allons-y.
- Tu ne préviendrais pas Enzo ?
- Je l'appelle.

Enzo était le cousin de Sarah au second degré. C'était un des rares garçons dont elle était très proche. Tous deux étaient nés et avaient grandi ensemble dans une petite ville d'Espagne de la province d'Alicante. Il était son ami, son confident, la personne sur laquelle elle pouvait tojours compter. Il travaillait dans cette entreprise depuis deux ans en tant que comptable.

- Allô ? l'interrogea la voix de son cousin à travers le téléphone.
- Salut, Enzo ! Elisyan et moi allons déjeuner dehors. Tu veux venir ?
- Ok ! On se rejoint dans cinq minutes dans le hall de l'immeuble.
- D'accord, à tout de suite !

Elisyan sortit de son bureau avec ses affaires.

- Qu'est-ce qu'a répondu Enzo ? demanda-t-elle.
- Il nous rejoint dans le hall dans cinq minutes.

Côte à côte, les deux amies s'en retournèrent vers les ascenseurs. Cette fois-ci, elles peinèrent à entrer. L'espace n'était pas très restreint mais il grouillait de monde. Sarah n'avait aucun problème à vivre en société, mais la promiscuité dans une foule dense avait le don de l'exaspérer au plus haut point. Une fois au rez-de-chaussée, elles traversèrent le hall de l'immeuble, au bout duquel elles aperçurent Enzo. Il leva le nez de son téléphone et leur fit signe de la main.

Après de brèves salutations, le trio se dirigea vers un restaurant italien qu'Elisyan avait l'habitude de fréquenter. Ils s'installèrent tranquillement sur la terrasse. La douceur d'une brise légère de septembre, transportant encore les dernières chaleurs d'été, leur caressa la peau et fit flotter leurs cheveux. L'atmosphère était douce et les rayons du soleil venaient se refléter sur les vitres du restaurant. Leurs discussions allaient bon train, dans le rire et la bonne humeur.

- Les filles, j'ai besoin de votre avis, dit Enzo.
- Par rapport à quoi ? répondit Sarah.
- Une fille.

Elisyan manqua de s'étouffer avec sa boisson. Enzo la regarda, intrigué. Ne voulant rien laisser paraître, elle se redressa et fit mine d'être intéressée par les propos du jeune homme. Ce dernier se força à faire abstraction de la réaction d'Elisyan.

- C'est un ami qui me l'a présentée en soirée. On a discuté et elle m'a laissé son numéro. Depuis, on se parle un peu tous les jours.
- Depuis combien de temps ? dit Sarah curieuse.
- Depuis deux semaines. Je voulais vous en parler pour savoir ce que vous en pensez.

Voyant qu'Elisyan ne disait rien, Sarah continua de nourrir la conversation malgré elle. Elle était certes préoccupée par cette annonce quelque peu inattendue, mais la réaction de son amie ne la laissait pas indifférente. Pourquoi réagissait-elle ainsi ? Elle ne lui avait jamais confié avoir des sentiments pour son cousin, dont elle n'avait jamais été si proche que ça.

- Comment elle s'appelle ?
- Mathilda. Elle a 27 ans et elle est italo-américaine.
- Italo-américaine ? C'est...atypique !
- Oui, dit-il en riant, mais elle est tellement belle...

Elisyan se racla la gorge et fixa sa meilleure amie en lui laissant comprendre qu'il valait mieux faire taire ce charmeur qui n'avait, au fond, jamais su faire perdurer une relation amoureuse pendant plus de deux ans. Fatigué de ces enfantillages, le jeune homme perdit le peu de patience qu'il avait et dévisagea, à son tour Elisyan, mais contrairement à elle, n'hésita pas à se faire entendre.

- Qu'est-ce que tu as ? Ça te dérange que je flirt avec une fille ? Il ne me semble pas qu'il y ait quelque chose entre nous ! dit Enzo énervé.
- Je n'ai absolument aucun problème avec ça ! répondit-elle vexée de s'être fait quelque peu humiliée.
- Alors s'il n'y a aucun problème, pourquoi ne fais-tu que soupirer, tousser et lancer des regards bizarres à Sarah ?
- Je ne fais rien de tout ça ! Je n'ai pas le droit de tousser ?
- C'est bon, laisse tomber... Je n'ai pas de temps à perdre avec tes gamineries.
- Mes gamineries ?! s'indigna Elisyan.

Tandis que Sarah essayait de les calmer, le serveur arriva avec leurs plats, apaisant un peu l'atmosphère. Après quelques bouchées de spaghettis, Enzo reprit la parole et décrit à Sarah cette Mathilda qui posait tant problème à Elisyan avant même qu'elles ne se soient rencontrées.

C'était une jeune femme d'assez grande taille. Elle était mince et avait de longs cheveux châtains, presque blonds, qui lui descendaient le long du dos. Elle avait les yeux noisette, de fines lèvres roses et un teint plutôt clair. Elle avait un style vestimentaire assez moderne et qui la mettait bien en valeur, pour le plus grand plaisir d'Enzo.

- Tu crois que je pourrais la rencontrer ?
- Oui, pourquoi pas ? Mais seulement quand notre relation sera officielle. Nous n'en sommes qu'au début, pour l'instant.

Le repas se termina sans encombre, non sans une ambiance assez lourde. Elisyan n'avait plus adressé la parole à Enzo. Sarah se retrouva à supporter les nerfs de l'un et de l'autre sans pour autant pouvoir prendre parti. Elle les raccompagna jusqu'à leurs bureaux respectifs. Avant qu'elle ne sorte de celui d'Elisyan, cette dernière l'attrapa par le bras.

- Écoute moi, lui dit-elle, je compte sur toi pour faire en sorte que ton imbécile de cousin reste célibataire.

Sarah ne parvint presque pas à discerner le sens de cette phrase. Pour seule réponse, elle n'eu qu'un rire venant du cœur. Elle trouvait son injonction tellement étrange et puérile. Qu'est-ce qui lui passait par la tête ?

- Donc tu l'aimes ?
- Bien sûr que non ! lui répondit-elle avec un ton qui trahissait son mensonge.
- Alors pourquoi t'en préoccupes-tu ?
- C'est dans son intérêt que je dis ça. Ça n'a rien à voir avec moi !

Sarah la regardait amusée comme on regarde un enfant qui pense tout savoir du haut de son jeune âge.

- Il faudrait savoir ce que tu veux...

Sur ces mots elle sortit de la pièce, traversa le couloir jusqu'aux ascenseurs, qu'elle emprunta une énième fois. Elle se laissa porter jusqu'au bas de l'immeuble et en sortit une bonne fois pour toutes. Une fois à une vingtaine de mètres de l'entrée, elle se retourna et contempla cet imposant building vitré qui serait bientôt le centre de toutes ses préoccupations.

The Boss ManOù les histoires vivent. Découvrez maintenant