Lèvres scellées (Partie 8)

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Le lendemain matin je descendais directement à l'agence en emportant avec moi un café fumant. Je m'installais sans perdre de temps à mon bureau et me plongeais plus sérieusement dans les articles de journaux que Georges m'avait amené. Robin descendit près d'une heure plus tard, peut-être moins, ou plus, je ne faisais pas vraiment attention à l'heure. La seule chose que je comptais était le nombre de café que j'avais bu depuis que je m'étais levée.

« -Déjà debout ? Me questionna Robin en baillant aux corneilles.

-Oui, j'ai de nouveau une piste.

-Sérieusement ? Laisse moi avaler quelque chose et j'arrive t'aider ; ajouta-t-il en s'engouffrant dans ce qui servait d'arrière boutique. »

Je ne répondis pas, je restais concentrée sur les articles et en préparais une petite pile pour Robin. Lorsqu'il revint il saisit le feuillet et s'installa à son propre bureau pour reprendre les recherches. Il s'arrêta néanmoins peu après.

« -On cherche quoi d'ailleurs ?

-Un policier qui aurait fait un esclandre à l'issue du procès Marsan ; répondis-je le nez dans les papiers.

-On est toujours sur cette affaire ? L'entrevue avec Madame Marsan s'est montrée utile ?

-Oui et non. Elle m'a parlé de ce fameux policier mais c'est tout ce qu'elle a pu dire de vraiment utile. Je crois qu'elle ne m'apprécie pas vraiment.

-Si tu t'es montrée aussi délicate que d'habitude dans tes propos c'est peu étonnant... ; fit Robin, la voix pleine de jugement.

-J'ai un tueur en série à coincer alors excuse moi de ne pas faire dans la dentelle ; répliquai-je, agressive.

-Je trouve que tu prends cette affaire un peu trop à cœur Plume. Tu es sûre que tout va bien ? Tu devrais peut-être reprendre rendez-vous avec le docteur Penanech.

-Je vais bien...

-Visiblement pas tant que ça. Regarde toi, depuis quand tu n'as pas été obsédée à ce point par une affaire ? »

Sa voix était inquiète, je le sentais. Je sentais aussi qu'il fallait que je lui parle des notes trouvées chez le juge et chez Rémi mais je ne savais pas vraiment comment aborder la chose. Il fallait tout de même dire à Robin, grand partisan de l'ordre et de la loi, que j'avais « emprunté » des objets sur deux scènes de crime. Mais concernant la deuxième ce n'était pas tout à fait un vol puisqu'elle m'était destinée.

Pour toute réponse je me levai lentement de ma chaise et posai les deux notes sur le bureau de mon collègue, bien en face de lui. Il les observa, blêmit devant la deuxième, et enfin tourna son visage déjà trop pâle vers moi.

« -Tu en as parlé à l'inspecteur ? »

Je fis non de la tête.

« -Où les as-tu trouvé ? »

Je baissai la tête.

« -Ne me dis pas que tu les as prise sur une scène de crime ?! »

Je détournai les yeux, la tête toujours basse.

« -Tu connais l'expéditeur ? me demanda-t-il avec une voix calme mais teintée de reproche. »

Je fis non de la tête pour la seconde fois. Je sentis la déception émanée de mon partenaire. Je jouai à un jeu risqué en dissimulant des preuves à la police, je le savais. L'inspecteur ne pourrait pas fermer les yeux sur une telle faute, mais je sentais, comme mue par un instinct que je n'expliquai pas, que ces notes n'avaient pas de réels liens avec cette affaire mais venaient d'un tout. Un tout plus grand. Un tout que l'on ne comprenait pas encore mais qui s'éclaircirait à un moment.

Le bureau des affaires étranges : les enquêtes de Plume et RobinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant