barcelona [matthijs&frenkie]

5. saint-valentin

– paper rings, taylor swift

C'était le jour de la Saint-Valentin quand Frenkie a offert son bouquet à Matthijs. Il pleuvait fort ce jour-là. Amsterdam était enveloppé dans cette grisaille qui lui est tant familière, effaçant les structures massives des grands buildings que Frenkie voit souvent à travers l'étage qu'il occupe dans l'immeuble où il habite.

Une petite sonnette mélodieuse annonce leur arrivée et une femme âgée relève ses perçants yeux bleus de son livre. Plusieurs effluves s'emmêlent dans la pièce, chatouillent leurs nez et leur rappellent à quel point la nature peut être tendre et radieuse.

Frenkie n'est jamais descendu chez la fleuriste depuis qu'il a emménagé ici. Et bon sang, combien de fois a-t-il hésité à le faire... pour Matthijs. Parce qu'il a toujours trouvé l'idée d'exprimer des sentiments à travers des choses aussi poétiques que des fleurs extrêmement charmante. Et que certaines fleurs qu'il voit dans les présentoirs des vitrines du magasin lui rappellent toujours Matthijs.

Les tournesols pour ses cheveux dorés.
Les quelques marguerites qui traînent pour toute l'innocence qu'il discerne parfois dans ses gestes, quand son bras n'est pas serré par son brassard de capitaine. Il est encore jeune.
Les roses parce qu'il l'aime...

Il n'a jamais eu l'hardiesse de le faire. Au début, il avait eu peur que Matthijs se moque de lui. Puis, c'était que par un douloureux concours de circonstances des gens de leur entourage apprennent pour eux deux. Mais aujourd'hui, il se fiche bien de savoir ce qui pourrait arriver en offrant un bouquet à son cher et tendre. C'est la Saint-Valentin. Il se sent obligé d'honorer leur couple malgré le silence dictateur qu'ils s'imposent, pour cette joie et cette affection qu'il éprouve chaque jour d'avoir trouvé une âme à aimer, et qui l'aime en retour.

Derrière lui, Matthijs effleure du bout des doigts des feuilles de toutes les formes et de toutes les textures. Il y a des fleurs de lys en plastique, brillant sous la lueur électrique d'un néon blanc. Des livres sur les jardins botaniques, le langage des fleurs et ce que les saisons offrent de plus beau hors de terre. Une certaine quiétude envahit Frenkie devant ces merveilles pourtant si courantes de la vie, qu'il ne prend jamais vraiment le temps d'observer.

La dame aux cheveux grisonnants vient l'accueillir après avoir glissé un marque-page à l'endroit où sa lecture se trouve interrompue. Frenkie hésite un peu, tergiverse pour trouver la bonne excuse pour cacher que le bouquet qu'il souhaite offrir est pour le garçon qui admire la verdure colorée derrière lui.

Il a toujours autant de mal à improviser presque deux ans après.

« Hum... C'est la Saint-Valentin et mon ami veut déclarer sa flamme. Je viens l'aider parce qu'il est un peu timide, vous voyez... »

Il semble que ça marche. Il a parlé doucement pour ne pas que Matthijs l'entende et qu'il devine déjà son intention. Et qu'une expression trahisse leur mensonge indirectement commun. Et qu'il proteste en rétorquant qu'il n'est pas timide. Il l'est.

Avec un regard admiratif, Frenkie écoute la fleuriste. Elle s'exprime avec passion de cette voix enveloppée par l'âge qui la dépasse, lui précisant ce que signifie le nombre de fleurs dans un bouquet, puis que, bien évidemment, il n'y a rien de meilleur que des roses pour entamer une déclaration silencieuse. Frenkie écoute tout, vraiment tout, essayant d'imprimer toutes ces informations dans sa tête pour, peut-être, une prochaine fois. Une prochaine fois, dans un futur qu'eux deux ne connaissent que partiellement. Frenkie va à Barcelone. Et Matthijs ?

Il ne veut pas y penser. Ils se sont disputés pour ça il y a quelques jours.

Il aurait pu demander pardon avec des roses. Il a retenu : c'est deux roses. Dualité, fusionnalité, complémentarité. Sur le terrain comme en dehors. Mais le cours des choses leur a offert une réconciliation plus sensuelle.