Dérapage Incontrôlé

Chapitre 18 ✨

La soirée se passait chez un certain Mike, un gars de l'équipe de football. Il l'avait rejointe en début d'année, n'étant que en seconde, et n'était pas très populaire parmi les lycéens. Si Célestin était plutôt ignorant sur tout ce qui concernait la popularité, il n'était pas aveugle. Il était évident qu'en organisant cette soirée, Mike essayait surtout de se faire bien voir et de coller au moule.

L'ambiance était totalement différente de celle de la soirée chez Mélodie. Celle-ci faisait plus adulte, plus mature, moins amicale, ce qui était paradoxale quand on savait que c'était un adolescent de quinze qui l'avait préparée.

À vrai dire, Célestin n'était pas tout à fait dans son élément. Il se sentait oppressé par toute cette foule, et l'odeur de la sueur était si forte dans la pièce qu'elle lui donnait envie de vomir. Inconsciemment, le blond n'avait pas quitté d'une semelle Solal. Ils s'étaient posés dans un coin du salon et observait d'un œil amusé (pour Solal) et médusé (pour Célestin) la soirée qui se déroulait devant eux.

_ Il fait chaud, rala Célestin au bout d'un moment. Comment tu fais pour ne pas transpirer ?

Solal esquissa un sourire amusé.

_ Je bois des bières fraîches.

Célestin fronça les sourcils quand son ami désigna d'un geste non-chalant la bouteille qu'il tenait dans sa main.

Célestin se sentait moite et avait trop chaud. Il avait la gorge sèche et la langue irritée. Il avait envie de boire mais il avait vu qu'au buffet, il n'y avait rien de pas alcoolisé. Alors, d' un mouvement un peu brusque, Célestin attrapa la bière de Solal, posa ses lèvres sur le goulot en plongeant ses yeux dans ceux verts de son vis-à-vis et en ingurgita une grande gorgée.

_ Eh doucement ! P'tit Ange !

Célestin n'avait jamais bu d'alcool auparavant. Il n'en avait jamais vraiment ressenti le besoin jusqu'à maintenant. Il voulait impressionner Solal et lui montrer qu'il pouvait être comme lui.

Mais rien ne l'avait préparé au goût affreux de la bière dans sa bouche. Il essaya de ne pas grimacer, pour ne pas laisser paraître son dégoût à Solal. Toutefois, vu le regard amusé qu'il portait sur lui, il n'avait pas très bien réussi son coup.

_ Tu bois de l'alcool maintenant ?

_ Faut croire, répondit-il sobrement, tentant toujours de ne pas grimacer.

_ Qui êtes-vous et qu'avez-vous fait de mon meilleur ami ?

Célestin sourit, amusé et ils reportèrent leur attention sur la piste de danse. Des adolescents se trémoussaient collés-serrés devant eux. Le blond ne put empêcher le rouge de colorer ses joues.

_ Comment on peut danser comme ça ? chuchota-t-il.

Il n'attendait pas vraiment de réponse, il n'avait fait que le souffler pour lui-même, exprimer une question à voix haute.

_ L'alcool joue un rôle là-dedans, fit Solal. Il rend les gens plus joyeux et plus... tactiles.

_ Ah oui ?

_ Ouais, sourit Solal.

Ils se regardèrent à nouveau dans les yeux, et Célestin sentit quelque chose remuer dans son ventre. Il ne savait pas si c'était l'intensité du regard émeraude de Solal ou bien le peu d'alcool qu'il avait bu mais il se sentait déséquilibré. Il eut soudainement besoin de bouger. Il attrapa le poignet de Solal et le tira en avant.

_ J'ai bu de l'alcool.

Leurs visages étaient à quelques centimètres l'un de l'autre. Célestin avoua dans un souffle :

_ Moi aussi je veux danser comme ça.

Célestin ne savait pas vraiment d'où lui venait cet élan de courage pour inviter Solal à danser mais il ne se posa pas plus de questions lorsque les mains de ce dernier trouvèrent le chemin de ses hanches. Ils commencèrent à se déhancher au rythme de la musique, les yeux dans les yeux, alors que le monde autour d'eux disparaissait. Les mains de Solal raffermirent leur prise. À leur contact, Célestin sentit sa peau brûler.

Il ne savait pas ce qu'il se passait, ni pourquoi cela se passait, tout ce qu'il voulait était profiter de cet instant avant le retour brutal à la réalité, une réalité dans laquelle ils n'étaient que deux meilleurs amis. Célestin devait se le répéter : une danse ne signifiait rien. C'était juste pour s'amuser ensemble. Ils ne faisaient rien de mal. Il fallait qu'il se décoince un peu.

À cette pensée, Célestin se rapprocha encore de Solal, les bras autour de son cou. Leurs torses frottaient pratiquement l'un contre l'autre et la température grimpa rapidement en flèche. Célestin avait le cœur qui battait à mille à l'heure dans sa poitrine. Il contrôlait ce moment, c'était complètement grisant. Solal avait lui également les joues rouges et paraissait tout aussi troublé que le blond.

La musique se termina finalement mais Célestin et Solal ne s'écartèrent pas, restant dans les bras l'un de l'autre, profitant de la chaleur rassurante. Les yeux scotchés dans ceux de son vis-à-vis, les secondes passèrent et petit à petit, leurs visages s'approchèrent. Leurs lèvres se frolaient presque, Célestin pouvait sentir le souffle de Solal s'écraser contre elles.

_ Je vais aller fumer dehors, fit Solal au bout d'un moment. Tu veux... tu veux m'accompagner ?

Mais Célestin ne voulait pas être le petit toutou qui suivait partout Solal. Il ne voulait pas être le cliché du meilleur ami amoureux qui ferait n'importe quoi, quitte à ne plus avoir de personnalité propre. Célestin ne voulait pas jouer se rôle.

_ Non, c'est bon. Je vais aller boire un coup.

Solal hocha la tête, et ses mains quittèrent ses hanches. Célestin frissonna, comme si il ressentait un grand vide.

_ N'oublie pas de manger un peu si tu bois. Je n'ai pas envie de te retrouver ivre mort.

La remarque piqua un peu Célestin mais il cacha son irritation derrière un sourire. Solal était tout de même gonflé de lui dire ce qu'il avait à faire ! Surtout quand on repensait au nombre de fois où c'était Célestin qui avait retrouvé Solal ivre mort ! Pourquoi Célestin ne pouvait-il pas lui aussi boire à excès ?

Célestin regarda Solal quitter la pièce, un arrière-goût d'amertume. Il n'était pas ce petit ange à qui on disait ce qu'il pouvait ou devait faire.

Il ne l'était décidément plus.