Ding ! Le tintement de l'ascenseur résonne, annonçant l'arrivée à un nouveau niveau de mystère. Un regard rapide au panneau électrique, et je prends une profonde inspiration avant de m'échapper de cette boîte métallique. L'éclairage de l'immeuble est faible, à peine 17 heures, mais l'atmosphère semble plongée dans la pénombre d'une nuit bien plus tardive. Ma course effrénée pour attraper mon bus me pousse à fouiller frénétiquement les replis de mon manteau à la recherche de cette maudite carte que j'ai une fois de plus égarée.
Soudain, l'arrêt net de mes pas. « Mademoiselle Brown ! » Je me retourne vivement pour faire face à Edgar, le gardien de cet imposant édifice. « Vous avez oublié ceci hier, je pense que cela vous serait utile. » Distrait par mes regards impatients vers les portes coulissantes, j'avais ignoré qu'il détenait mon précieux sésame vers le repos.
« Merci beaucoup ! » Je saisis ma carte de bus et le gratifie d'un baiser rapide sur la joue. « Tu n'imagines pas à quel point tu me sauves la vie. »
« Eh bien, mademoiselle, » Edgar prend une pause pour replacer ses gants derrière son dos. « C'est la trente-et-unième fois que vous perdez ou oubliez vos affaires, mais c'est toujours un plaisir de vous apporter mon aide. »
« Autant de fois que ça ? » Je souris malicieusement. « Ne serait-il pas temps pour vous de consulter ? » Il ne semble pas le moins du monde touché par ma plaisanterie, se tenant encore plus droit qu'auparavant.
« Pour tout vous dire, à la suite de mes examens médicaux, je peux vous assurer que j'ai conservé la forme de ma jeunesse. » Je lui souris sincèrement, lui fais un signe de tête et poursuis ma route vers la sortie. « À bientôt et merci encore ! »
« À bientôt, mademoiselle Brown, faites bonne route. Henry... mais que faites vous, la cliente est partie il y a une heure. Cessez de faire cette tête et retournez à votre poste. Les jeunes... Ils finiront par me rendre fou. » Je ris face au comportement du gérant du Millennium Palace, me remettant à courir en apercevant mon bus arriver. Bousculant les passants sur mon chemin, je frappe aux vitres du bus, déjà prêt à partir. Le chauffeur me lance un regard agacé et soupire. Je lui offre mon plus beau sourire tout en montrant ma carte, et finalement, il ouvre la porte.
« La prochaine fois, soyez à l'heure, sinon, envisagez la marche. Vous avez de la chance, je suis de bonne humeur. » Se retournant vers la route, il remet le contact vers le prochain arrêt. Je lui souffle un petit merci en baissant légèrement la tête, gênée. Tournant mon regard vers les sièges du bus, je m'installe face à la route.
Depuis des années, je souffre du mal de la route, mais je m'efforce toujours de m'orienter dans la direction du trajet. Souriant à quelques âmes dans l'habitacle, je sors mes écouteurs et me plonge dans l'observation du paysage. En ce mois de novembre, le froid s'est emparé de New York, nous forçant à troquer nos tenues estivales contre des vêtements plus chauds. La vitre contre laquelle je m'appuie commence à témoigner de l'hiver imminent. Des gouttes d'eau ruisselantes apaisent mes pensées pendant ce long trajet.
Un sourire béat se dessine sur mon visage en repensant à ma discussion avec Edgar. Récemment installée à New York, j'ai rejoint une vieille amie du lycée, Julie Millenium, héritière de la célèbre chaîne d'hôtels du même nom. Edgar était à Londres avec Julie et sa mère pendant plus de cinq ans. C'est là que j'ai rencontré Julie lors de notre rentrée en seconde. Perdue, incapable de trouver ma salle d'espagnol, je me suis résignée à interpeller cette tornade blonde. Elle m'a proposé de nous y rendre ensemble, et après de longs moments à discuter et rigoler, nous sommes devenues inséparables. Nos études supérieures nous ont malheureusement séparées, mais nous avons toujours gardé le contact, et me voilà de nouveau à ses côtés.
L'annonce de Lennox Avenue me fait retirer mes écouteurs. Observant l'avant du bus, je m'assure que personne n'a encore demandé l'arrêt. Soulagée, je remets mon sac à dos, salue le conducteur et les autres passagers avant de descendre. Tendue à cause du froid, je resserre les pans de mon manteau, cachant mon visage dans le col. Fixant mes Converse blanches, dont les lacets sont tachés par mes nombreux trajets à pied, je ne remarque pas la voiture qui fonce droit sur moi. Sursautant, je me décale sur la gauche et tombe dans la précipitation. Grognant d'énervement, je me relève en fixant avec dégoût la tache sur mon jean. Peu habituée à ce genre de comportement, je reste régulièrement surprise lorsque j'y suis confrontée. Fixant la ruelle déserte, je reprends ma marche avant d'arriver devant une vieille bâtisse.
Julie a insisté pour que je vienne dormir à l'hôtel avec elle, arguant que c'était « de son devoir de m'héberger ». Cependant, je refuse son aide, préférant conserver mon indépendance.
Poussant difficilement la porte de mon immeuble, j'allume la lumière du hall, qui a une fois de plus rendu l'âme. Mon sac sur l'épaule droite, je tire la fermeture éclair de mon sac à dos pour en sortir une lampe torche que la gardienne m'a tristement donnée la semaine dernière, au cas où une panne se reproduirait. Je monte les deux étages qui me séparent de mon appartement, insère ma clé et abaisse la poignée. Plongée dans le noir, l'ambiance est calme pour un mardi soir. Appuyant sur l'interrupteur avec espoir, la lumière inonde la pièce, confirmant qu'il s'agit d'une panne de la lampe du hall, pas générale. Je lance mon sac sur le canapé, puis me dirige vers ma chambre, pressée de me détendre. Changer d'appartement n'est pas dans mes moyens, mais je n'y passe que très peu de temps. Ce n'est pas une priorité, mais plutôt une question de nécessité.
Je travaille dans un café à quelques pas du Millennium Palace. Le Hollow's, le meilleur café de la ville, est très fréquenté. Diplômée en marketing d'une école de commerce, je suis arrivée récemment pour fuir Londres. Le Hollow's est dirigé par une vieille amie de la mère de Julie, Holly. Elle m'a accueillie comme sa propre fille et m'a formée pour travailler dans son établissement. Depuis, j'ai commencé cette nouvelle vie entourée de personnes bienveillantes qui ne cherchent qu'à me rendre heureuse. Rappelant les événements qui m'ont poussée à quitter ma ville natale, un frisson parcourt mon échine. J'attache mes cheveux blonds ondulés et me glisse dans mon pyjama. Après avoir vérifié que tout est bien fermé, je m'allonge dans mon lit et ferme les yeux.
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un nouveau départ
RomanceDémarrant une nouvelle vie à New York, Éléonore tente tant bien que mal d'échapper aux douleurs de son passé. Après une rencontre hostile, des évènements étranges se succèderons. Elle sera entraînée malgré elle vers la violence et l'aspect morbide d...