Dans les coulisses de L'esprit Du Temps

Mes persos et moi

SANS SPOIL

(légère répétition avec l'article "avec ou sans plan" mais en même temps, les deux sont intrinsèquement liés. mes excuses par avance)

Vous le savez, chaque auteur a un rapport à ses personnages différents. En tant qu'autrice abonnée à un certain nombre d'auteurs sur twitter et instagram, je me retrouve souvent confrontée à diverses catégories.

Les auteurs sadiques (ceux qui aiment blesser leurs persos, les tuer), les auteurs bricoleurs. Je les appelle comme ça car eux même appellent leurs personnages des outils. Ce sont des outils qui servent à fabriquer l'œuvre finale. Il y a les auteurs empathiques, ceux qui aiment leurs persos mais dont les persos ne vivent « que » dans leur livre. Ils ne pensent pas à eux le reste du temps et passent à autre chose une fois l'œuvre achevée. Il y a sans doute d'autres catégories, et tout un tas de nuances, mais aujourd'hui, si je cite celles là c'est pour deux raisons. La première, ce sont ceux que je vois le plus souvent, la deuxième... je ne m'y retrouve absolument pas.

J'ai l'impression de passer pour une folle à dire que oui, je parle avec mes personnages. Je ne me contente pas d'écrire sur eux, je vis avec eux. Souvent, la team premier degré me dit « mais ils n'existent pas ! ». Je me retiens toujours ironiquement de répondre « SANS BLAGUE ? ». Bien sûr qu'ils n'existent pas Joseph. Je ne dis pas que je les vois et les entends comme des humains qui me parlent. Je distingue parfaitement la réalité. Je sais qu'ils sont le produit de mon imagination. Merci.

Mais ils vivent. N'en déplaisent aux puristes, aux hyperrationnels. Et pourtant, Dieu sait que rationnelle je le suis. Mais là, c'est différent.

Pour tout un tas de raison, mes personnages ne sont pas et ne seront jamais des outils. Parce que pour ce faire, il faudrait que je me serve d'eux. Or je ne me sers pas de mes personnages. Je collabore avec eux. Le choix des mots est important. Ceux qui me suivent sur les réseaux sont témoins de mes nombreuses mésaventures d'écriture. Personnages qui débordent du scenar, qui ne font pas ce qu'ils sont censés faire, qui dévoilent des choses pas prévues ou au contraire sont incapables de parler le moment venu... Et contrairement à ce que certains affirment sur les reseaux (à savoir qu'un personnage qui décide de ne pas suivre le plan = auteur qui n'est pas discipliné) moi j'assume et affirme. Ça va devenir ma phrase sponsor : je ne suis PAS mes personnages, et ils ne sont pas MOI.

Je ne vois donc pas pourquoi le fait qu'un auteur laisse decider ses personnages soit qualifié d'auteur indiscipliné, qui ne sait pas où il va. Cela reviendrait à dire : votre enfant est hyperactif, quel mauvais parent vous faite.

Aucun rapport.

J'entends la team celsius crier MAIS OUI MAIS ILS SONT DANS TA TETE.

Mais oui mais, ça n'a aucune importance. Pour moi, me servir de mes personnages reviendrait à leur imposer un scenario, quitte à aller contre leur personnalité. Oui, l'écriture pour moi et eux, c'est de la negoce. Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai changé mes plans. Ou un personnage en a embrassé un autre à un moment pas prévu, ou deux personnages n'ont pas su communiquer alors que j'avais décidé que c'était le moment, ou un personnage m'a dit « je ne ferai jamais ça ». Parce que justement... ils ne sont pas moi et je ne suis pas eux.

Et cette façon de travailler avec eux, c'est l'assurance pour moi de les rendre réalistes.

Assurément, je n'aurais moi-même pas fait ou dit les mêmes choses que mes personnages au même moment et dans les mêmes dispositions. Mais mes émotions et mon expérience d'autrice ne doivent pas influer sur l'histoire. J'écris sur des adolescents de 16 ans. Si je leur imposais ma façon d'agir et de penser, ils ne seraient pas réalistes ! Ils ont seize ans en moyenne dans les tomes 1. Ils n'ont ni la même vie que moi, ni la même personnalité, ni la même expérience et surtout pas la même maturité. (même si la maturité n'est pas qu'une question d'âge, nous sommes bien d'accord, mais à trente ans j'ai plus de facilités dans la vie qu'à seize)