Chapitre 4

31 3 2
                                    

— Je viendrai aussi, m'informe Marvin.

J'ai laissé mûrir l'idée tout le week-end pour enfin me décider à faire cette fameuse demande à mon ex. Il m'en coûte de lui réclamer une faveur, mais je le fais en songeant aux jumelles. Je sais qu'elles s'amuseront et qu'il est important pour leur intégration que nous participions aux activités proposées par l'école.

— J'ai déjà remis le talon-réponse à l'institutrice, mens-je, espérant que ma manœuvre le dissuadera.

— Pas grave, je vais lui envoyer un mail. Après tout, j'ai moi aussi le droit de m'impliquer dans l'univers de mes enfants et de découvrir leurs amis.

Et surtout les parents des copains de classe...

Comme tu veux. Tu n'auras qu'à les reprendre après le souper, dans ce cas, capitulé-je.

Je n'ai pas le droit de m'opposer à ce qu'il vienne. Néanmoins, il est certain que ma soirée sera à moitié gâchée s'il est présent, guettant dans l'ombre mes moindres faits et gestes.

— Vous serez contentes de nous voir ensemble, pas vrai, les filles ?

Elles acquiescent pour lui faire plaisir, mais ne semblent pas franchement comprendre de quoi il en retourne.

— Tu ne penses quand même pas que nous allons manger côte à côte comme un couple ? m'étonné-je, modérant mes élans furieux.

Il fait mine d'être surpris.

— Les petites voudront être avec nous deux, tu ne vas pas les obliger à choisir entre leur père et leur mère, si ?

Utiliser nos enfants est sa manœuvre favorite. Il sait qu'elles sont mon point faible, celui qui me fera craquer le plus rapidement.

— Je me suis fait des amis parmi les parents, et je compte bien rester auprès d'eux. Quant à Vanina et Léna, elles préféreront sans aucun doute jouer avec leurs camarades plutôt que de rester près de nous.

— Tu t'es fait des amis, hein ? reprend-il en croisant les bras.

J'en ai trop dit. Je sais pourtant que je dois mesurer chacune de mes paroles car il s'arrange toujours pour retourner contre moi la moindre de mes révélations.

— À force de croiser les mêmes têtes chaque jour, on finit par sympathiser.

Je ne devrais pas me justifier, mais c'est plus fort que moi, même si je déguise en partie la vérité.

— J'aurai donc la joie de revoir le preux chevalier qui t'a porté secours le jour de la rentrée ? ironise-t-il, un air de défi dans le regard.

— Joachim sera là, effectivement. Nos enfants sont dans la même classe.

Un éclair de colère scintille au fond de ses prunelles trop bleues. M'entendre parler d'un autre homme fait remonter en lui l'agressivité qu'il tente de dissimuler sous une apparence irréprochable.

— Joachim... Voyez-vous ça... Il est gentil avec vous, Joachim ? questionne-t-il à l'intention des jumelles, qui observent patiemment notre joute verbale.

— Arrête ça, le prié-je, sentant que la conversation risque de s'envenimer.

Il m'intime le silence en posant un doigt devant mon visage, à quelques millimètres de mes lèvres, comme si je n'étais rien de plus qu'un insecte qu'il serait en droit d'écraser sous sa chaussure immonde.

— Qui ? demande Léna.

— Joachim, vous savez, l'ami de maman, insiste leur père d'une voix mélodieuse.

Dans l'ombre de Narcisse (BMR Edition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant