Chapitre 6

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Après une seconde manche tout aussi intense, Joachim et moi remportons le deuxième prix qui n'est autre que des entrées pour un parc aquatique. Folle de joie, je m'empresse d'aller chercher notre cadeau et de le brandir fièrement devant moi de retour à notre table.

— Il y a deux places adultes et deux places enfants, constaté-je. Tiens, prends-les. Tu n'auras qu'à y aller avec Ève.

Je tends les tickets à mon partenaire, heureuse de pouvoir leur faire plaisir.

— Tu plaisantes ?! C'est toi qui as fait tout le boulot ! Sans tes interventions, j'aurais fini bon dernier, admet-il.

— Allez, ça me fait plaisir que tu les prennes. Je suis sûre que ta fille sera enchantée de passer cette journée avec son papa. Et puis, c'est aussi une façon pour moi de te remercier pour cette soirée. Ça fait longtemps que je ne m'étais plus amusée comme ça.

Il me lance un sourire désarmant qui me donne des papillons dans le ventre. Je reconnaîtrais cette sensation entre mille...

— Tu sais quoi ? On n'a qu'à y aller tous ensemble. Toi, moi et les petites. Qu'en dis-tu ?

Sa proposition me fait un peu trop plaisir. Je songe surtout au fait que je vais pouvoir passer une journée avec lui, loin du contexte de l'école.

— Je pense que cette idée est excellente !

— Magnifique ! Est-ce qu'il y a une date de validité ?

— Oui, nous avons trois mois pour les utiliser.

— Bien. Que dirais-tu de samedi prochain ? Tu as tes filles, je crois ?

Je confirme en vérifiant dans l'agenda de mon portable que je n'ai rien de prévu ce week-end-là. Joachim en profite pour me donner son numéro de téléphone que j'enregistre comme un précieux sésame dans ma machine. Poliment, je lui fournis également le mien.

La soirée touchant à sa fin, nous décidons de rentrer chez nous. Je les raccompagne jusqu'à leur voiture. Il porte Ève encore tout endormie dans ses bras et l'installe dans son siège-auto et se tourne ensuite vers moi pour me dire au revoir. Je crois apercevoir un semblant d'hésitation dans ses yeux tandis qu'il se penche pour me faire la bise.

Sa joue pique légèrement, mais je regrette que ce contact soit si bref. J'ai envie de me blottir dans ses bras. Ça fait si longtemps qu'un homme ne m'a pas tenue réellement contre lui ! Quand j'y réfléchis, il me semble que des années se sont écoulées depuis ma dernière étreinte sincère et désirée.

Marvin me prenait souvent contre lui. Ça ne durait que quelques secondes pendant lesquelles il me tapotait le dos, comme si j'étais un brave toutou qu'il fallait encourager. J'ai toujours détesté ça, mais il n'a jamais cessé de le faire. Un câlin doit être une manifestation d'amour. Dans les bras de mon ex, je ne ressentais rien que de l'indifférence et même parfois un certain agacement de sa part.

J'ai oublié la sensation d'être enlacée par des bras solides et virils. Ce soir, cet acte physique me manque atrocement. Juste être tenue, fermement. Juste ça...

L'âme en peine, je me recule et lance un dernier « au revoir » à Joachim, qui fait le tour de sa voiture pour monter à son bord. Je rejoins ensuite mon véhicule garé quelques mètres plus loin.

Une sensation douloureuse compresse ma poitrine. Pour une fois, ce n'est pas Marvin la cause de ce mal, mais bien le manque.

Le manque d'être aimée pour ce que je suis.

Durant tout le trajet jusqu'à mon appartement, je ne cesse de penser à Joachim. Son épouse est décédée il y a deux ans. Depuis, il ne s'est pas remis en couple. Ressent-il cette absence d'amour aussi douloureusement que moi ? Peut-être a-t-il connu des femmes de passage, partageant son lit uniquement pour une nuit. Des partenaires à usage unique...

Dans l'ombre de Narcisse (BMR Edition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant