le silence est à présent écouté
on l'entend
on le voit
et on l'apprécie
il fait noir
tout noir
très noirpendant une seconde de noir il peut se passer toute une vie
une infinité de choses dont personne ne connaîtra jamais l'existence
c'est la beauté du noir
il inspire le silence et le rapprochement des corps
chacun
chacune
chacun-e
se rapproche de son voisin
de sa voisine
de saon voisin-e
la barrière invisible commence à disparaîtreet puis
lorsque le noir commence à être un peu pesant
une respiration fend le silence
elle le tend, l'étire et le rompt ;
il n'y a plus de silence
une deuxième respiration la rejoint
et puis une troisième
et des centaines d'autres encore
tel un chant reprit à l'unissonnéanmoins le noir est toujours roi
mais ce n'est qu'une question de temps
carsoudain
un mot fuse
et une lumière douce et tamisée le poursuit
avec une vitesse similaire à celle des étoiles
une lumière chaude et délicate
qui vient effleurer les peaux de la foule avec sensualitépersonne ne comprend le mot
c'est un mot inventé
baragouiné
mal dit
un mot mal aimé
jeté au plus vite pour ne plus jamais le penseret puis d'autres mots viennent troubler le souvenirs du silence
d'autres lumières viennent se superposer sur le noir
si bien qu'ils finissent par disparaître
comme s'ils n'avaient jamais existé
mais la foule ne les oublie pas
c'est difficile d'oublier un noir profond
ce noir intense et révélateurmais
la foule reste obnubilée par la scène
la piste
les respirations
les mots
les voix
les corps
marchant avec détermination
les pieds claquant sur le sol lisse— le sol sacré —
des pieds nus
des chaussettes blanches
des chaussons noirs avec une semelle antidérapante
des basketsleurs pas son réguliers
le son de leurs voix ne l'est pas
mais ils marchent
elles marchent
iels marchent
et semblent réciter la plus ingrate des poésies
puis iels s'arrêtent
elles s'arrêtent
ils s'arrêtent
tout s'arrêtela foule attend le noir
avec une impatience non maîtrisée
mais il ne revient pas ;
maintenant les artistes sont là