et BOUM
c'est de nouveau le noir
le noir profond
noir corbeau
noir de jais
noir néant
noir infini
noir
oh noir
noir
noir
noirla foule sait
elle sait juste
elle sait toutc'est la fin.
alors il y a une salve d'applaudissements
qui fait bruisser les vêtements
les plis des peaux, les cicatrices sur le corps, les ongles rongés et les doigts qui craquent
tout ça se tait, tout ça devient beau
ne reste plus que le bruit sec et cassant des applaudissementsles mains les unes contre les autres, les une avec les autres font trembler la toile du chapiteau de façon semblable au souffle du vent
la comparaison est frappante, marquante et chacun-e entend ce vent si particulier, ce courant d'air qui ne sépare plus personnele noir rend ivre
et l'ivresse est comme celle de la nuit
une ivresse impossible
qui fait vivre plus grand
et plus fort
les vies qui nous attendent
paisiblement rangées
tranquillement amassées
à l'extérieur du chapiteau— inspiration
expiration
inspiration
expiration —pour la première fois depuis le début du spectacle les souffles des artistes et ceux de la foule sont mélangés
chacun-e se sent puissant-e et rempli-e d'une vie de moments éternelsla morosité est partie en vacances
les absences ont retrouvé leurs présences
et les cœurs sont heureux, transparents, en transe
oh les sentiments sont pesants, lourds dans les corps déjà deboutle quatrième mur a disparu
il n'a jamais existé ;
la lumière réapparaît un peu
avec douceur et grâce
elle est tamisée
et c'est beau
ça brûle les yeux de beauté
oh la beauté coule par torrent
elle détruit sur son passage
oh la beauté
la beauté des corps, des arts et des êtresles artistes sont de nouveau visible
mais les masques sont tombés
iels sont toustes souriant
même erwan
et c'est important
ça rend vivant les sourires comme çaiels se tiennent la main et la foule s'imagine tenir celle de saon voisin-e
alors chacun-e est lié-es, comme des âmes sœurs
iels ont partagé une chose précieuse, une chose qui reste qui ne s'oublie même pas dans la mort ou dans la folieet puis d'un mouvement commun, comme un seul être
(ce qu'iels sont en réalité)
les artistes saluent
leurs mains viennent frôler le sol sacré
leurs jambes restent miraculeusement tendues
c'est l'illustration finale de leurs prouesses, de leurs places dans ce monde sans pitiéles artistes sont des divinités
alors la foule est debout pour les adorer, pour les vénérer
la foule rêve de leur ressembler, d'avoir leurs corps, d'avoir leurs douleurs et leurs joies
oh c'est un sentiment si vil, si volage et éphémère
car tout est beau dans cette fin, dans ce noir parsemé de lumière
car tout est beau dans ces êtres solaires qui viennent d'exposer l'absurdité de leurs faiblessesles regards se croisent, artistes et foule se mélangent désormais
finalement, sont-iels si différent-es?
la foule comporte elle aussi ses artistes
des artistes de sensibilité, qui font du spectacle vivant une vie à part entièreoh oui tout est beau
chacun-e le sait
le ressent
le comprendet lorsque les corps des artistes de cirque s'échappent peu à peu de la piste le sol sacré est quitté, abandonné, laissé pour mort
oh c'est un moment triste, après tout ce qui a été dit ou ce qui ne l'a pas été ;
c'est dur de se quittermais les artistes le doivent bien
une foule est éphémère, délimitée dans le temps et dans l'espace
mais pour cette même foule le spectacle, les artistes sont éternel-les
iels vivent toujours ici ou bien là
et le cycle ne sera jamais réellement briséc'est impossible :
les rideaux (inexistants) ne se sont pas fermés
et, dans l'absurdité de la vie ils resteront levés pour toujoursfin
voilà voilà c'est la fin de cette nouvelle que j'ai eu un peu de mal à écrire mais que j'ai quand même beaucoup aimé faire et imaginer :)
j'espère qu'elle vous a plu, merci d'avoir lu en tout cas c:je vous mets le lien pour voir le spectacle si vous le souhaitez :
https://mobile.france.tv/spectacles-et-culture/theatre-et-danse/2629509-le-cycle-de-l-absurde-par-raphaelle-boitel-pour-le-centre-national-des-arts-du-cirque.html
passe une belle journée/nuit/soirée :)
fau ☀️