L'Écho des rois

Chapitre 2

Ayant accédé au trône en 496 ap. AA, Sa Majesté Corus d'Avarine, Fils de Mhell, partagea le pouvoir avec la reine Aube d'Erellond et le roi Siros d'Ephire. Malgré quelques guérillas au sein même du royaume, notamment dans la région d'Herombre, et des relations fragiles avec le royaume d'Epherios, Sa Majesté Corus d'Avarine hérita d'un pouvoir plutôt stable. Néanmoins, on ne retiendra de son règne que la fin j'en ai peur.

Rongé par une démence mystérieuse et persuadé de devoir régner seul, Sa Majesté Corus d'Avarine s'en prendra au deux autres souverains, leur ôtant la vie avec violence. Il éliminera également un des trois Gardiens avant de succomber à son tour sous les flammes de la Gardienne Silia Mered.

Pour la première fois dans l'histoire du royaume d'Argedhen, des Gardiens assumaient seuls le devoir royal.

Cercle des mémorialistes, La Lignée, 525 ap. AA

——

Le silence avait chassé la clameur. Reïs était allongé, immobile, enveloppé dans les draps précieux qui recouvraient son lit. Les yeux entrouverts, l'esprit encore embrumé de sommeil, il devinait à peine les formes du mobilier qui l'entourait. Peu à peu, sa vision se précisa et il redécouvrit la chambre dans laquelle il s'était endormi la veille. Ses yeux glissèrent sur les murs, son regard grimpant jusqu'au plafond, détaillant les tableaux et les ornements dispersés autour de lui. Alors qu'il se perdait dans l'immensité de la pièce, son esprit fut soudain submergé par un flot d'images, d'émotions. Il ferma les yeux, revoyant le Haut-prêtre debout sur l'estrade. Son souffle s'accéléra, s'alourdit alors que la sensation d'une masse invisible au sommet de son crâne se faisait de plus en plus réelle. Sous les draps, son pouce se tendit machinalement jusqu'à son annulaire et se heurta au métal froid de la chevalière qu'il n'avait pas ôtée. Persuadé d'être au beau milieu d'un rêve, il entrouvrit à nouveau les yeux, certain qu'il se découvrirait allongé dans sa petite mansarde de toujours, baigné par la lumière vive du soleil, entouré des vieux pots d'argile desquels débordaient des fleurs toutes plus odorantes les unes que les autres. Mais il n'en fut rien. Il ne vit que les longs rideaux rougeoyants à travers lesquels filtrait une douce lumière mordorée, flottant le long des murs de pierre blanche qui se dressaient en colosses autour de lui. Alors il remua encore un peu, glissant sa main dans sa nuque pour effleurer sa peau, cherchant du bout des doigts la Marque. Cependant, quelque chose bougea dans l'ombre à sa droite et il se figea aussitôt.

— Qui est là ? lança-t-il après quelques secondes, sentant son cœur accélérer de plus belle dans sa poitrine.

En réponse à sa question, une silhouette se détacha du mur et avança jusqu'au lit. Reïs détailla un instant l'homme en chemise rouge qui se tenait près de lui et fixait désormais le sol.

— Qui es-tu ? demanda-t-il, confus.

— Je suis valet, Votre Majesté, répondit ce dernier sans lever la tête.

— Et donc ? Qu'est-ce que tu fais ici ?

— Je suis là pour vous aider à vous habiller, Votre Majesté. À vrai dire, vous êtes attendu.

— Je suis... attendu ? Par qui est-ce que je suis...

Reïs secoua la tête, cherchant à remettre toutes ses idées en place. Inspirant profondément, il posa à nouveau son regard sur le valet.

— Quel est ton nom ?

— Je... Tasus, Votre Majesté, articula-t-il, visiblement surpris par la question.

— Très bien Tasus, reprit le jeune roi, maintenant regarde-moi et dis-moi : qui m'attend ?

Le valet releva prudemment la tête, décollant ses yeux du parquet pour répondre.