Chapitre 46

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J'étais assise raide comme un piquet dans un fauteuil à haut dossier dans la petite bibliothèque de ma grand-mère qui détonnait complètement avec le reste de la maison. L'atmosphère de l'endroit évoquait une bibliothèque d'une école de sorcier avec la fausse cheminée en marbre où brulait un feu artificiel, les appliques en métal vieilli aux murs, les lourds rideaux en damas d'un rouge sombre accrochés aux grandes fenêtres en vitre et les étagères en bois sombre croulant sous les ouvrages qui formaient comme un cocon rassurant autour de nous. Nous étions assises toutes deux au coin du feu et j'attendais avec fébrilité que ma grand-mère daigne briser le silence.

Elle aimait faire cela avant une confrontation pour déstabiliser ses vis-à-vis. Et cela marchait très bien car je me tordais les doigts avec nervosité.

- Je ne savais pas que le monde de la mode t'intéressait à ce point.

- Je ne veux pas t'offusquer grand-mère mais tu ne connais pas grand-chose de mes centres d'intérêt.

Je me mordis la lèvre inferieure jusqu'au sang me maudissant d'avoir ouvert la bouche trop vite. C'était la première fois que j'osais répondre ainsi à ma grand-mère et je ne savais pas vraiment d'où m'était venu ce soudain courage. Même elle, paraissait légèrement étonnée puisqu'elle avait les sourcils haussés tout en me regardant avec un air indéfinissable sur le visage. D'ailleurs, je décidai de continuer sur ma lancée tant que j'avais encore cette force sortie de nulle part. J'aurais le temps de regretter plus tard quand je paierai mon impertinence.

- Ce n'est en aucun cas une lubie, je me suis renseignée sur les différends débouchés qu'il y aura après et je me sens prête à relever le défi. Au pire, si je me plante, je pourrai toujours me réorienter dans quelque chose de plus terre-à-terre. Mais je m'en voudrais à mort si je n'essayais pas alors peut importe ce que tu me diras, ça ne me fera pas changer d'avis. Ce n'est pas conventionnel je le sais mais c'est mon choix. Tu pourras toujours dire je t'avais prévenu si j'échoue...

Il y eut un silence angoissant où j'essayais de calmer ma respiration après mon envolée lyrique. Ses yeux clairs me dévisagèrent avec intransigeance alors que j'attendais le cœur battant qu'elle daigne réagir.

- Tu es ma petite-fille, l'échec n'est pas une option, déclara-t-elle d'un ton implacable qui me fit frissonner.

Je me figeai, la regardant n'osant croire ce que cela sous-entendait.

- Donc...

- Fais ton école de stylisme mais ne me déçois pas.

Je déglutis avec difficulté devant la pression supplémentaire qu'elle mettait sur mes épaules. Mais ma grand-mère avait toujours été ainsi, exigeante et encore plus avec ceux qu'elle aime. Alors je n'en attendais pas moins de sa part.

- Je n'en ai pas l'intention.

Elle hocha la tête d'un air grave, avant d'ouvrir sa bouche pour surement continuer à me mettre encore de plus de pression sur les épaules.

- Est-ce que c'est sérieux avec ce garçon ?

Alors, ça, je ne m'y attendais pas. Je croyais que Kélian avait réussi à gagner son cœur de glace. Où voulait-elle en venir ? Je décidai d'être la plus franche possible car c'était le seul moyen de m'en sortir face à elle.

- Je ne crois pas... Je l'aime vraiment mais il doit partir et je ne sais pas si je pourrai me lancer dans une relation à distance.

- S'il n'y a que ça pour vous empêcher de vous aimer. C'est un problème qui peut vite être résolu. Il suffit que vous y mettiez du votre. Je l'aime bien ce garçon, il est bien élevé bien que je trouve qu'il est beaucoup trop tatoué pour son âge. Et puis, il a du cran et ça c'est quelque chose que je respecte...

Valse ou Tango [EN CORRECTION ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant