Incantation

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     Mes jambes m'avaient guidées d'elles mêmes hors de l'hôpital à la seconde où je compris que ma mère avait quitté notre monde. Ma vision s'était brouillée de larmes et un torrent de tristesse avait envahi mon cœur, mais la douleur que m'infligeaient mes nouveaux dons avait vite balayé mon chagrin pour le remplacer par une agonie profonde et envahissante. Je n'étais plus capable de penser à autre chose qu'à la tension de mes muscles noués douloureusement dans tout mon corps, ou bien au goût métallique qui ne quittait plus ma bouche et qui me faisait monter la nausée un peu plus à chaque seconde, ou encore ce bruit insupportable que seul moi était en capacité d'entendre. Ma tête me faisait mal à m'en déchirer les tempes, les sentant prêtes à rompre sous le joug de ces nouveaux pouvoirs ayant envahi ma tête et tourbillonnant sans cesse comme si une tempête s'était déclenché dans mon crâne. C'était en tout point semblable à un concert de percutions se déroulant entre mes deux oreilles, des centaines de baguettes battant simultanément leurs tambours à un rythme erratique. Je n'entendais plus rien d'autre que le tonnerre qui grondait tout autour de moi alors même que le ciel obscurci par la nuit n'arborait pas le moindre nuage.
     Sans m'en être rendu compte, je m'étais à nouveau enfuis vers la forêt par laquelle je me laissais maintenant inexorablement absorber. Je ressentais un besoin viscéral de m'y enfoncer et de la laisser m'engloutir complètement pour ne plus jamais en ressortir. J'étais comme attiré, mu par la force irrésistible d'un immense aimant dont j'incarnais l'autre moitié. Je n'avais pas besoin de réfléchir pour deviner vers où mes pas me guidaient, bien que je m'en voyais de toutes façons bien incapable pour le moment. C'était l'instinct qui parlait. "J'appartiens au Nemetton désormais", me disait-il intérieurement.
     Cependant, lors d'un nouveau coup de tonnerre bien plus haut que les autres, je fus frappé d'un éclair de lucidité. L'espace d'un instant, je pris conscience qu'aucune des questions que je me posais concernant la relation entre Jennyfer et la balise n'avaient été répondues et que j'accourais inévitablement comme un toutou auprès de Stiles alors même que je ne savais rien de nouveau à ce sujet. Mais comme s'il s'était agit d'un rêve lointain cette pensée s'estompa, devenant si floue qu'elle finit par totalement disparaître dans le déluge qui faisait toujours rage dans ma tête. Écrasé par la force tourbillonnante de mes nouveaux pouvoirs, je me laissai tomber sur les genoux en frappant le sol de mes poings fermés, hurlant de toutes mes forces pour essayer d'outrepasser la tempête, en vain. Je pris conscience des feuilles mortes contre mon visage que je n'avais pas senti retomber contre le sol, l'écume au coin de mes lèvres se mélangeait à la terre que j'avais dans la bouche.
     C'est alors que je me sentis saisi avec force par les bras, contractant mes muscles endoloris alors que l'on me forçait à me remettre debout sur mes jambes tremblantes. J'entendais appeler au loin, une voix rauque et abîmée par l'âge criant à pleins poumons pour essayer de m'atteindre. Je n'arrivais plus à distinguer quoi que ce soit, mes yeux embrumés par de nombreux nuages obstruant ma vision. Après de nombreux essais, les appels cessèrent et je me sentis traîné sans considération au travers de la lande dans laquelle je me repérais sans mal bien qu'il m'était impossible de distinguer quoi que ce soit, comme si la surface du sol était inscrite de manière détaillée dans ma mémoire. Ce ne fut cependant pas une mince affaire que de réussir à me faire faire demi-tour, me sentant toujours viscéralement attiré par le Nemetton que mon corps brûlait de rejoindre. Stiles. Stiles ! STILES ! Il fallait que je retourne auprès de lui, auprès de la balise, là où était ma place. Mais je fus finalement absorbé par le néant, perdant totalement conscience de tout ce qu'il était entrain de m'arriver.

     Les yeux se rouvrirent finalement, éblouis par la lumière bien trop vive du soleil qui était probablement levé depuis un certain temps. Je dû mettre ma main au travers des rayons lumineux pour essayer d'épargner mes yeux d'une cécité définitive, les laissant lentement s'habituer à leur environnement. 
     Je fus tout d'un coup frappé du calme olympien dans lequel j'étais maintenant plongé, contrastant totalement avec la tempête dans laquelle je me débattais la veille. Je sentis une sérénité molle m'envahir à ce constat, me laissant presque trop détendu. Pourtant, lorsque je pris conscience de mon corps, je me rendis compte que la couchette sur laquelle j'étais étendu n'était autre qu'un banc de pierre raide et froid juxtaposé à un mur doté des mêmes qualificatifs. Cet endroit me parut soudain terriblement familier. Je me redressai sur la dalle inconfortable, jetant un regard tout autour de moi pour analyser la situation. J'étais enfermé dans une cellule du poste de police de Beacon Hills.
     Nonchalant, je quittai ma place pour m'avancer d'une démarche chaloupée jusqu'à la porte faite uniquement de barreaux, les saisissant entre mes paumes tout en essayant de passer la tête au travers bien que je sache pertinemment que c'était tout à fait impossible. L'action m'épuisa immédiatement, ayant pour conséquence de me faire m'appuyer sans manières contre la porte en attendant que quelqu'un ne m'explique ce que je faisais là.
     Mon souhait se réalisa en quelques minutes à peine lorsque j'aperçus le Shérif Stilinski en personne pénétrer dans le couloir donnant sur les cellules de dégrisement. Le doute sur le motif de sa venue m'envahit quand je le vis se stopper auprès d'un des officiers dont il croisa le chemin dans le couloir, mais ils se saluèrent bien vite et le Shérif reprit le pas en ma direction. Par politesse, je fis l'effort de me redresser et de l'accueillir d'un geste simple de la tête. 

Le garçon de l'autre monde ( Sterek Fanfiction FR )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant