Dans ce chapitre-ci, nous sommes toujours au bal, mais d'un autre point de vue.
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« Les femmes sont terribles les unes pour les autres dès que la moindre rivalité les met en présence. »
Henri-Frédéric Amiel
Amélie passe la seconde partie du bal dans un délicieux état second. Comme si son esprit était empli de brouillard. Elle se souvient d'Henri qui lui tend la main pour la première danse, la guidant au centre de cette salle de Paris où commençaient déjà à danser le Roi Soleil et la reine Marie-Thérèse d'Autriche, ainsi que d'autres couples de nobles. Mademoiselle de Beaulieu se laisse aller au son de la musique jouée par un orchestre.
Une danse, puis une autre... Elle remplit son carnet de bal. La danse se finit, elle applaudit de concert. Une personne lui touche doucement l'épaule, elle se retourne, une main se tend, un visage sourit. Elle accepte ladite main sans y prêter attention, se laissant guider une nouvelle fois. Elle songe à sa mère qui avait passé des heures à lui apprendre à danser et l'en remercie intérieurement.
Elle émerge doucement du brouillard et se rend compte qu'elle danse à présent avec François de Hautecourt. Il est un homme plutôt délicat, elle s'en est aperçu lors de sa toute première soirée d'appartements à laquelle Henri les avait invité elle et sa meilleure amie. Il mène la danse avec souplesse et douceur. Elle regarde son visage et se laisse guider dans un sourire.
La soirée continue, puis la danse se termine définitivement. Mademoiselle de Beaulieu reprend tranquille ses esprits tandis que Monsieur de Hautecourt la conduit à l'écart de la foule. Elle se laisse tomber sur une chaise avec soulagement, ses pieds la faisant légèrement souffrir.
- Vous commencez à prendre goût aux soirées d'appartements, ma chère Amélie.
- Il semble, cher François. Les habitudes d'Henri ont quelque peu déteintes sur moi.
- Et quand vous déciderez-vous enfin à lui admettre votre attirance ?
- Plaît-il ?
Amélie reste interdite. Son interlocuteur se force à ne pas rire. Mais après tout, c'est une règle d'ordre générale : Les concernés en amour ne remarquent jamais leur affinité l'un pour l'autre, les autres figurant autour d'eux l'observant d'un œil clair et net sans toutefois faire un quelconque geste pour essayer de faire avancer la situation.
- Inutile de le niez, ma mie. Je connais Henri depuis plus longtemps que vous ne le pensez. Je peux vous confirmez que vous n'avez pas à craindre un éventuel rejet de sa part le jour où vous trouverez le courage de vous confessez.
- Très bien, je me rend. En dépit d'avoir été fiancée à un jeune homme somme toute sympathique, jamais je n'ai pu me départir de ce penchant pour le frère de ma meilleure amie.
- En parlant d'elle, elle est certainement au courant de l'infatuation de son aîné pour vous. Probablement, il aura lui aussi été prévenu.
- Je dois admettre que la présence d'Isabelle ce soir m'a quelque peu surprise, connaissant son aversion pour ce genre de réjouissance. Mais cela ne rend les choses que meilleures.
- Meilleures d'autant que son état mental est bien différent du mois dernier.
- Tous le mérite vous revient. C'est grâce à vous si elle a pu recouvrer le bonheur après un mois entier de dépression. Elle est enfin en paix par rapport à la mort de son fils.
François secoue humblement la tête en signe de négation.
- Non, Amélie. Il faut plutôt remercier l'œil de notre roi.
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La Comtesse du Lys
Historical FictionEn 1676, dans la France du roi Louis XIV. Isabelle Constance Madeleine de Langlois, comtesse de Vauboyen, est une jeune veuve de vingt-huit ans plongée dans une profonde dépression suite à la perte de son unique enfant. C'est pour tenter de lui fai...