Le Rituel (L'arche de Ta Prohm)

Chapitre 10 - Un an déjà

Comment ne pas être raide dingue de ce ptit con ! Déjà un an et je suis toujours autant accro même si c'est un crève-cœur de ne pas pouvoir être vraiment avec lui. Heureusement que je peux désormais compter sur le soutien de mes parents et des siens. Tout le monde a fini par se résoudre et s'adapter à notre situation. Aujourd'hui c'est un jour un peu spécial d'ailleurs, ça fait pile poil un an que l'on s'est rencontré dans ce fichu temple. Pour l'occasion, nos deux familles ont voulu marquer le coup en préparant une sorte de repas de fête. Je ne sais pas si je m'habituerai vraiment un jour à ces apparitions/disparitions quotidiennes mais j'entends déjà le brouhaha des convives présents pour l'occasion. A peine le temps de me doucher que Clément est déjà en train de tambouriner sur la porte.

– Dépêche ! Dépêche Hélène, on t'attend tous en bas. En plus, tonton à encore pris son vidéoprojecteur. Grouille !
– J'arrive. Je fini juste de me sécher les cheveux. Dis à Papa maman que j'arrive.
– Dac !

Bon au moins c'est clair, ma mère a encore vu les choses en grand et ma nuit va être courte (ça j'y peux rien) mais surtout ça va pas être du repos. Ça me fera du bien de me changer les idées en famille. Je descends les escaliers aussi silencieusement que possible mais à peine à mi-chemin, c'est mon père qui, aussi discret qu'un poissonnier, m'annonce fièrement.

– Ah ! La voilà ma grande ! Descend vite, on attendait plus que toi pour commencer.

A ma grande surprise c'est le cas, tout le monde est encore debout devant l'énorme table préparée pour l'occasion. Et me voilà valsant d'étreintes chaleureuses en bises affectueuses. Chacun prend le temps de me dire quelques mots réconfortants, avec la bienfaisance apportée habituellement aux grands malades. Je les rassure et continue mon périple jusqu'à enfin m'asseoir en bout de table. Comme Clément l'avait crié haut et fort, tonton Franck est déjà à s'affairer, tripatouiller son matériel vidéo. Je vais sûrement encore avoir droit à une énième série de photos d'enfance comme à chaque repas de famille. C'est mon père une fois de plus qui impose le silence à tout le monde tintant de sa fourchette contre un verre en cristal. Plutôt efficace à vrai dire.

– Ne vous inquiétez pas, je voulais un peu de silence mais pas pour vous faire un discours. Simplement dire à ma fille que je l'aime. Même si malheureusement le soleil me vole mon bien le plus précieux chaque jour que Dieu nous donne. Cette soirée un peu particulière, j'aimerais la partager avec ceux qui endurent cette même peine. Alors si ça ne te dérange pas ma chérie, j'ai demandé aux parents de John d'être avec nous ce soir. Franck, c'est à toi.

La toile blanche prend soudain vie. Les parents de John apparaissent tout sourire, accueillis d'un bonsoir presque collégial des convives. Ils sont si adorables. Moi qui au départ les imaginais comme un obstacle entre moi et John... Ils sont devenus plus que jamais ma deuxième famille. Et les voir ce soir en webcam interposées me fait chaud au cœur. Je les imagine avoir dû dire bonne nuit un peu plus tôt à leur fils tout en gardant le moral et participer à cette fête un peu particulière. C'est sa mamounette comme il l'aime l'appeler qui prend la parole.

– Bonsoir Hélène. Alors surprise ? c'était hors de question de louper cette superbe fête. C'est vrai qu'on aurait préféré venir te voir mais je sais aussi que tu comprendras qu'on ne pouvait pas laisser John tout seul pour cette journée aussi spéciale.
– Oui, mais déjà vous avoir avec moi, même comme ça c'est juste énorme ! Merci à tous. Je sais pas quoi dire pour vous exprimer à quel point ça me fait plaisir.
– Tu sais, tout ça c'est une idée de John.
– Vous le remercierez infiniment.
– Tu peux le faire toi-même.
– Bonsoir charmante demoiselle.
– John !!!!!!!!!

Tout se mélange, je suis figée. Les larmes coulent sur mes joues sans que je ne puisse rien y faire. Je me sens vidée de toute mon énergie. Heureusement je suis vite soutenue par les bras de mon père qui me murmure de pas avoir peur. C'est bien lui, en chair et en os. Mais comment ? !! Je vois John quitter soudain l'écran, et mon téléphone sonne à son tour. C'est lui, c'est John... Mon père m'aide à me lever.

– Aller décroche, tu comprendras. Monte dans ta chambre et profitez de ce moment tous les deux. Je te ramènerais de quoi grignoter là-haut.