Les confessions

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~Solal~

J'arrive chez Erell en trombe, les yeux entourés de fard à paupière jaune et les lèvres peintes en beige clair. Sitôt son message reçu, j'ai su que je n'avais pas le temps de me démaquiller, ni même de finir mon œuvre. Si Jean et Alexandre ont remarqué mon visage quand je suis descendu, ils n'ont fait aucun commentaire. De toute façon, je n'avais pas le temps de les écouter. Le message d'Erell disait « T'es là ? J'ai besoin de toi. » et j'ai seulement répondu « J'arrive » avant de me précipiter dans ma rue, Nairobi sur mes talons.

Quand elle sort de sa maison, les traits tirés et un sourire tremblant, je ne peux m'empêcher d'imaginer le pire. Nairobi se précipite sur elle et lui fait la fête. Elle lui fait deux caresses, histoire de lui faire plaisir et s'avance vers moi. Ma meilleure amie comprend aussitôt et se colle à elle pour faire sentir sa présence. Mais Erell n'y fait pas trop attention et se contente de lever distraitement les yeux vers moi et de me sourire tristement. Pour une fois, elle reste silencieuse. Je sais qu'elle fait comme si de rien n'était. Comme si tout allait bien. Pourtant, je vois bien que c'est faux. Je ne veux pas la forcer à me parler, d'autant plus que je ne saurais pas vraiment quoi dire. Alors, je lui prends la main et l'entraîne hors de son quartier.

Nous marchons plusieurs minutes en silence, nos mains entrelacées. De l'extérieur, nous ressemblons à un couple normal et à cette pensée, je m'empêche de libérer ma main. Je ne sais toujours pas ce que nous sommes, après avoir retourné la question cent fois dans ma tête. Je sais que ça paraît évident, mais je continue de mourir de peur à l'idée de faire une erreur. Mais après, il me suffit de regarder Erell pour comprendre que je ne la lâcherais pas. J'aimerais que toute mon appréhension s'envole parce que j'ai l'impression de la trahir quand je me pose toutes ces questions. Lorsque j'en ai parlé à Samuel, le seul de mes amis à être en couple et donc le seul susceptible de pouvoir m'apporter des réponses, il m'a dit que c'était normal d'être perdu. Que lui-même l'est très souvent malgré l'amour qu'il porte à Lou-Ann.

« Tu peux pas être sûr que ça durera toute la vie, mais t'es sûr d'une chose : aujourd'hui vous vous aimez. Contente-toi de profiter de ces moments où t'es heureux et de la rendre la plus heureuse possible », m'a-t-il conseillé. Il m'a avoué que ces derniers temps, il avait beaucoup pensé à quitter Lou-Ann, parce que c'était plus simple, mais que maintenant que les choses s'étaient un peu apaisées, il se rendait compte qu'il avait eu tort. Il y a toujours moyen, selon lui, d'arranger les choses si tant est que l'amour est encore présent. Il faut que j'essaie de nous faire confiance et de vivre au présent. Même si j'en n'en ai pas du tout l'habitude, parce que je suis toujours autre part, à penser au passé ou au futur. Mais aujourd'hui, je dois me focaliser sur le présent. D'autant plus que j'ai tout pour être heureux. Et je n'en demandais pas tant.

Nous descendons le boulevard et pour combler le silence, et pour lui changer les idées, je lui parle de moi. Ou plutôt, je prends mon courage à deux mains pour avouer l'un de mes secrets.

— J'adore me maquiller.

Erell tourne la tête vers moi, m'observe et sourit, sincèrement cette fois.

— C'est magnifique.

— Merci... Tu es la seule personne à le savoir.

— Pourquoi ?

— Tu as déjà vu des garçons qui se maquillent ?

— Oui.

— Qui ça ? je m'étonne.

— Toi.

— Arrête. A part moi, je veux dire.

— Sur les réseaux sociaux, j'en ai déjà vu. Et ils étaient aussi doués que toi.

Nos sentiments voilésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant