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   Vêtus d’un joli uniforme, cartable à la main ou au dos, les élèves franchissaient le portail de l’école l’un après l’autre. Oui, c’était la rentrée des classes. La joie et la gaieté se laissaient voir sur le visage de tout un chacun. Certains retrouvaient leurs anciens camarades, et d’autres un peu perdus cherchaient à s’intégrer. A chaque rentrée, une réunion se tenait avec tous les élèves dans une salle polyvalente, pour accueillir les nouveaux arrivants ainsi que les anciens.
La réunion terminée, chacun rejoignit sa classe respective. Les cours débutèrent donc. Dans sa classe Khadidja était la plus jeune en âge ; à cet effet, elle ne voulut pas se faire remarquer dès le début et resta sagement dans son coin. Ce matin-là, on commença par le cours d’anglais. Le professeur se présenta tout d’abord, et donna ensuite la parole à tout un chacun pour en faire de même. Une fois terminé, il questionna des élèves au hasard pour lui dire ce qu’ils avaient eu à faire l’an dernier. Ainsi fait, il prit une barre de craie et débuta son cours.
   A 12 heures, la sonnerie retentit, annonçant la fin des cours. Une vague humaine se précipita vers le portail, chacun se dépêchant de rentrer. Khadidja restée la dernière en classe, rangeait vite ses effets pour s’en aller, lorsqu’une personne lui tapota l’épaule, et dit : « ça va Khadidja ?
- Oh Zeynab ! Oui je vais bien et toi-même ? » Elles s’embrassèrent, et Zeynab répondit qu’elle se portait également bien. C’est une bonne amie à Khadidja, et elles sont très complices. Plus grande qu’elle de deux ans, elle aussi était en Terminale. Les retrouvailles terminées, elles rentrèrent donc ensemble. Le jour suivant, c’était la même routine que celle d’hier. A seulement deux jours de classe, Khadidja commençait déjà à se faire des amies. Oui elle avait cette facilité à côtoyer les autres et était une personne ouverte. Enfin en pause, elle alla rejoindre Zeynab qui l’attendait. Elles mangèrent ensemble, tout en regardant les allées et venues effectuées par les élèves. Tout d’un coup, Khadidja s’arrêta de manger et observa. Qu’observait-elle ? Quelque chose d’important sans doute, ou quelqu’un en particulier. En tout cas, elle était très submergée. Remarquant l’absence de son amie, Zeynab bouscula Khadidja qui revint à elle. « A quoi penses-tu ainsi ? Interrogea Zeynab
- Oh ! A rien de vraiment particulier. Viens, on y va, on a sonné. »

A la sortie des cours, les deux filles rentrèrent encore une fois ensemble. Sur le chemin, alors qu’elles traversaient la rue, Khadidja fut bousculée par une personne et se retrouva au sol. Cette personne n’était autre que Ahmad. Il se dépêcha d’aider la personne à se relever, jusqu’à ce qu’il se rende compte que c’était Khadidja. Gêné, il ne savait pas quoi dire. Il voulait s’excuser mais était paralysé, les mots sortaient à peine de sa bouche. « On dirait qu’à chaque fois qu’on va se croiser, je vais être bousculée. » Dit Khadidja.
Il n’en revenait pas. « Elle m’a reconnu », pensa-t-il. Perdu dans ses pensées, et ne s’en rendant pas compte, il prit ses jambes à son cou, laissant son frère et les filles stupéfaits. «  Ooh ! On dirait bien que tu l’as effrayé Khadidja. Wadud, dépêche-toi d’aller réconforter ton frère. » Dit Zeynab riant aux éclats. Il fit ainsi, s’excusa et partit.

Ahmad arriva chez lui suant, honteux de ce qu’il avait fait. Il avait honte. Il alla dans sa chambre en ayant toutes sortes de pensées « là c’est clair qu’elle va me détester, oui elle me détestera… » A cet instant, son frère le rejoignit en souriant. Il n’arrêtait pas de se moquer de lui. Dans ces situations, ne pouvant supporter les moqueries de son frère, il l’aurait convenablement corrigé. Mais pas cette fois. Il n’en avait pas la force, il se contentait de le regarder, tel un damné attendant son jugement. « Frangin arrête d’être ainsi, hein, ça ne te ressemble pas. Tiens écoute, t’as pas à t’en faire, Khadidja n’est pas fâchée. Juste que t’aurais pas dû t’enfuir comme ça, c’était ridicule frère.
- Hmm, ça je le sais très bien. Mais je je sais pas ce qui m’est arrivé. Bon ça suffit, on n’en parle plus.

Le jour se leva, découvrant un Ahmad éveillé depuis de bonnes heures. C’est vrai qu’il est matinal, mais cette fois-ci, il n’avait pas bien dormi la nuit à cause de la scène d’hier. Il hésita entre le fait de se rendre à l’école ou non. Il tarda vraiment avant de se lever de son lit ; finalement, se levant de manière nonchalante, il se dirigea vers la salle de bain. A l’école, il ne sortit à aucune pause, craignant de croiser Khadidja ; et se fit ainsi durant presqu’une semaine. A la longue, il avait fini par oublier l’incident et reprit ses bonnes vieilles habitudes : jouer avec ses potes, papoter… Oui il avait fini par oublier.
Le week-end arriva et chacun était chez soi. Wadud était à l’école coranique, et de son côté Ahmad resté à la maison, décida de sortir pour prendre un peu d’air. Il se trouvait chez un boutiquier qu’il connaissait bien, et où il avait l’habitude de venir regarder des matchs de football. Il s’apprêtait à se lever et rentrer, et là une douce voix qu’il reconnu étrangement l’interpella. Il se retourna et vit Khadidja. « Comment vas-tu Ahmad ? Dit-elle. Il voulait une nouvelle fois s’enfuir, mais il resta fort. Son cœur, il battait très rapidement ; il lui tourna le dos et lui dit qu’il préférait discuter avec elle ainsi.
« D’accord Ahmad ça me va.
- Très bien… Heu je je suis désolé pour la dernière fois… Dit-il d’une voix étouffée.
- Ne t’en fais pas, c’est déjà oublié. Elle regarda l'endroit où il se trouvait, puis revint vers lui. Mais dis-moi, enfin si je peux me le permettre. Que fais-tu là, alors que Wadud se trouvait à l’école coranique avec nous ?
- Ben… Je me suis réveillé en retard.
- Je ne te crois pas.
- Bon ok, je je n’ai  plus le temps d’y aller maintenant voilà tout.
- « Le temps » dis-tu ? Et que fais-tu là à ne rien faire, tu le perds ce « temps » ? Suite à ces questions, frustré, il se retourna, la regarda et dit : « ce n’est pas cela… » Khadidja se mit du côté droit de Ahmad et lui dit : « ne dis pas des choses que tu regretteras un jour. Ce temps là tu ne le contrôles pas Ahmad. Réfléchis y. » Puis elle partit. Ahmad se contenta de la regarder partir, jusqu’à ce qu’elle disparût de son champ visuel. En rentrant chez lui, il ne cessait de penser à cette journée et à tout ce que Khadidja lui avait dit. Il réfléchissait également au fait qu’il était toujours destabilisé chaque fois qu’elle était près de lui. Réalisant enfin, il s’écria : « oui, oui je suis amoureux de toi… Et si Allah le veut, je ferai de toi mon épouse. »

Il n’était pas le seul à vouloir cela. Son rival Ousmane la voulait également comme épouse. A la différence de Ahmad, Ousmane lui était proche du père de Khadidja et ils s’entendaient bien, ce qui était pour lui un avantage. Ce qu’il veut en ce moment, c’est gagner la confiance de Khadidja, et bien sûr il use de tous les moyens. Déjà pour cette nouvelle semaine qui commençait, il eut comme idée d’attendre Khadidja à la sortie des cours. Il fit ainsi une, deux et trois fois de suite sans même l’aborder, de peur de la brusquer, mais aussi car il avait un peu peur. Mais à la quatrième fois, il sortit de sa voiture, se rapprocha. Elle était avec son amie Zeynab. Il l’interpella donc : « Khadidja ?
- Oui… Se retournant et voyant que c’était Ousmane, elle se sentit gênée.
- Comment vas-tu ?
- Heu je vais bien, louange à Allah…
- Très bien. Je n’ai pas envie de prendre ton temps car je sais que tu t’apprête à rentrer. Hum voilà, je voudrais si possible te parler, faire connaissance, bien sûr si tu es d’accord.
- Heu je vois… Mais bon je vais y réfléchir.
- D’accord, merci. Je te laisse alors. »
Il fit un signe d’aurevoir à Zeynab, qui lui répondit également d'un hochement de tête, et il partit. Toute cette scène se passa devant Ahmad. Zeynab quant à elle se contenta de sourire, et les deux filles rentrèrent.

KhadidjaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant