Le roi des fées

Chapitre 7

Les trois amis se tiennent droits dans la campagne déserte, tournant sur eux-mêmes pour scruter l'horizon. Instinctivement, Bryn et Virgile se sont placés autour de Sandro et même si le jeune homme râle d'être ainsi pris en sandwich, ses deux compagnons ne cèdent pas un pouce de terrain. Le jour est désormais complètement levé et malgré l'heure matinale, le ciel est déjà blanc de chaleur. Bien que l'horizon soit dégagé, le trio ne voit rien venir.

- Tu es sûr de toi, demande Bryn soupçonneuse, tournant la tête dans tous les sens.

- Oui, bredouille Sandro. Enfin ... pas vraiment.

- C'est sinistre cette campagne déserte et silencieuse, murmure Virgile. On se croirait dans un film de Roméro. Vous aussi, vous vous attendez à voir surgir une horde de zombies en haut de cette colline ?

Ses deux compagnons se retournent vers lui d'un air interloqué et Virgile lève les paumes en signe de reddition face au regard noir de Bryn.

- Tu étais obligé de dire ça ? murmure Sandro. Tu me files la chair de poule maintenant.

- Vous allez arrêtez de faire vos chochottes tous les deux, s'exclame Bryn – et le ton de sa voix fait sursauter les deux garçons – et vous n'avez pas besoin de chuchoter, il n'y a pas de horde de zombies qui attend le moindre bruit pour se jeter sur nous ! Et tant qu'à faire, tu pourrais citer The Walking Dead, c'est de notre génération au moins ... ou Danny Boyle, là on aurait du soucis à se faire avec ses hordes galopantes.

La jeune femme conclut par un clin d'œil et un sourire cruel et les deux garçons se regardent, se rapprochent et scrutent l'horizon avec encore plus d'intensité.

- Regardez ! S'écrie enfin Virgile.

Le jeune homme tend son bras et ses deux compagnons se tournent aussitôt dans la direction qu'il pointe. Un nuage de poussière s'élève dans le ciel, presque invisible sur le fond laiteux. Puis des silhouettes sombres en émergent, des cavaliers sur leurs montures, approchant à grande vitesse.

- Amis ou ennemis ? Demande Virgile inquiet.

- J'ai envoyé un message à des amis, ou en tout cas de possibles alliés, murmure Bryn son regard plissé tourné vers les nouveaux arrivants. Mais Titania a ses propres moyens d'information et pourrait très bien les avoir devancés.

- Quels moyens d'informations ? S'étonne Sandro.

L'attention de Bryn quitte un instant l'horizon alors qu'elle se tourne vers Sandro et le regarde en plissant les yeux.

- Comment as-tu su que ceux là arrivaient ?

Le jeune homme bafouille, incapable de répondre à cette question. Et il est de toute façon rapidement plus préoccupé par les cavaliers qui les rejoignent et les entourent, dans un concert de hennissements et ronflements des montures ; leurs sabots battent bruyamment sur le sol et leur brouhaha se mélange aux cliquetis des éléments métalliques de leurs harnachements. Virgile fait barrage d'un côté de toute sa hauteur, une main rassurante posée sur celle de Sandro ; Bryn de l'autre côté fait face aux cavaliers, dans une posture qui se veut nonchalante mais ses mains sont crispées sur la poignée de son épée.

Les cavaliers les entourent sans rien dire puis s'écartent pour laisser passer l'un d'entre eux ; la monture s'approche très tranquillement et l'homme qui la chevauche se balance lentement au rythme chaloupé de ses pas. Il porte un pantalon en coton écru dont les pans amples aux cuisses battent sur les flancs de son cheval, serré par un laçage complexe sous le genoux et disparaissant dans des bottes de cuir lacées sur ses mollets. Il est torse nu, les cheveux aussi noirs que sa peau est pâle, tirés en arrière et retenus par une petite queue qui pend dans son cou. Il porte un harnais de cuir noir à la poitrine ; les sangles des entourent ses épaules et celle, horizontale, qui lui barre la poitrine, sont accrochées à deux anneaux de métal. Le harnais retient une épée dans le dos du cavalier, dont le manche émerge derrière sa tête. La fée qui s'avance et semble être le chef de la troupe est mince et la blancheur de sa peau fait ressortir encore plus les angles pointus de ses os et ses muscles fins.