Le roi des fées

Chapitre 8

Trois des fées, dont Lysandre lui-même, ont laissé leurs montures aux nouveaux venus et c'est d'un pas lent, pour leur permettre de suivre le rythme, que la petite cohorte se met en route.

Sandro, Bryn et Virgile restent en arrière ; les deux premiers restent silencieux tandis que le troisième revit l'affrontement qui vient d'avoir lieu avec enthousiasme. Bryn l'écoute en levant les yeux au ciel d'un air agacé et Sandro, en souriant, attendri.

- Je suis une Vertu, imite-t-il d'une voix aigue. Tu as insulté mon père, continue-t-il d'une voix plus grave, prépare toi à mourir !

- Du calme Princesse Bride, se moque Sandro. Cela n'est pas exactement comme ça que cela s'est passé.

- Mais c'était excitant non ? Bryn prête à tous les affronter et ...

- C'était surtout imprudent de ma part, l'interrompt Bryn.

- Comment ça ?

La jeune femme hésite, regarde le reste de la troupe et les fées qui chevauchent devant eux puis se penche vers ses compagnons.

- C'était du bluff, murmure-t-elle discrètement. Contre une dizaine de fées ? J'aurai pu m'en sortir toute seule mais ils s'en seraient pris à vous pendant que j'étais occupée et je n'aurais pas pu vous défendre. Donc à l'avenir, il vaut mieux ne pas trop les provoquer et faire profil bas. De plus, nous avons besoin de leur aide. Ce n'était pas très intelligent de provoquer et d'agresser la seule fée en Sidh prête à nous aider à échapper à Titania.

Les deux garçons la regardent d'un air inquiet et l'entrain de Virgile s'envole.

- Et on ne sait toujours pas de quelle magie dispose Sandro, ni s'il est capable de la maîtriser, alors vraiment ... profil bas !

Le jeune homme repense aux regards effrayés des fées et au mot qu'ils répétaient entre eux, Ensauvage ; au comportement de leurs montures, agissant exactement comme il le voulait, surtout celle de Lysandre, prête à piétiner son maître.

- Je ... J'ai des pouvoirs alors ?

- Bien sur ! Tu es le fils d'Obéron et Hermia était une fée puissante. Je pense que tu dois avoir accès à de sacrées magies. Mais lesquelles et comment ? Et quand vas-tu réussir à les maitriser ?

Bryn lève les épaules et gonfle les joues en expirant. Virgile se penche sur sa selle pour poser une main sur l'épaule de Sandro.

- Le fils d'un roi et doté de supers pouvoirs ! Est-ce que ça n'est pas excitant ?

Sandro le regarde droit dans les yeux et son cœur fait un bond dans sa poitrine. Le large sourire de Virgile, les deux fossettes dans ses joues et Sandro envie encore une fois la spontanéité et l'enthousiasme de son ami, à la facilité avec laquelle il réussit à se fondre dans cette nouvelle situation, sans jamais se départir de son assurance.

C'est lui qui devrait être à ma place, pense Sandro. Un fils de roi et des pouvoirs ... je ne suis pas fais pour ça, je ne suis pas taillé pour ça. Lui en a l'allure, le charisme.

Mais la main posée sur son épaule et le regard bienveillant qui ne le quittent pas, rassurent Sandro, font battre son cœur un peu plus vite et creusent son ventre ; mais d'une façon différente que le stress et l'angoisse qu'il a l'habitude de combattre. Sans s'en rendre compte, le jeune homme soutient le regard de son ami pendant de longues secondes et c'est Virgile qui finit par se racler la gorge. Il tourne la tête et sa main quitte l'épaule de Sandro.

Tout sourire, Sandro presse ses talons dans les flancs de sa monture et le cheval accélère en trottinant. Cavalier novice, Virgile n'ose pas faire de même et reste en arrière. Il sourit à Sandro qui s'éloigne en lui jetant un coup d'œil par-dessus son épaule et inspire profondément, droit sur sa selle. L'air de Sidh est déjà chaud bien qu'il ne doive pas être encore midi et rempli de parfums fleuris, de bouquets de jasmins et de chèvrefeuille. Leur petite troupe suit un chemin de terre, qui serpente au milieu d'un paysage vallonné, couvert d'une herbe sèche, presque jaune. Des bosquets épars bordent leur sentier et offrent par moment une ombre bienvenue sous le ciel blanc.