Enfance

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Pour autant qu'Harry sache, ses parents avaient cru attendre un garçon. Ou du moins, iels l'avaient beaucoup voulu. Toujours est-il que lorsqu'il était né, non pas que ses parents avaient été déçu·e·s, mais iels n'avaient pas prévu de prénom plutôt féminin.

Ainsi, iels avaient gardé le prénom choisi : Harry. Après tout, quelle idée d'attribuer un genre aux prénoms ?

Bref, Harry avait toujours été Harry. Et puis, élevé par une mère comme Lily, il ne risquait pas d'intégrer des stéréotypes genrés, en tout cas assez peu. Cependant, on ne changeait pas la mentalité d'une société en un clin d'œil, aussi les habits de bébé que ses parents lui mettaient avaient été perçus comme des habits de garçon, d'autant qu'ils avaient principalement été achetés dans ce rayon.

Bien sûr, Harry ne tirait pas ces informations de nulle part, mais des histoires de Sirius et Remus.

Puis, un an après sa naissance, Harry était arrivé chez les Dursley.

Elleux avaient un fils, aussi iels ne s'étaient pas embêté·e·s à acheter des habits pour Harry, féminins ou masculins, puisqu'iels pouvaient lui passer les anciens de leur fils. Le Gryffondor se demandait même si iels s'étaient aperçu·e·s, à un moment, qu'il n'avait clairement pas la même anatomie que son cousin.

Son oncle et sa tante avaient compris, au moment quelconque où Lily avait dit à sa sœur qu'elle attendait un enfant, que cet enfant était un garçon. Sa tante l'avait parfois genré au féminin, mais son oncle, dans sa mauvaise volonté, n'avait pas changé ses "habitudes" (si l'on pouvait parler d'habitudes pour mentionner quelque chose ou quelqu'un·e qui avait occupé nos pensées une seule fois jusqu'alors).

Ainsi, Harry avait été un enfant au pronom changeant, bien que ses tuteur·ice·s évitaient bien évidemment de lui adresser la parole ou de parler de lui, tout simplement.

D'autant que ses habits et sa coiffure courte n'informaient pas sur ce qu'il avait entre les jambes.

Ce fut l'entrée à l'école qui changea tout.

Il entrait dans ce monde genré et stéréotypé où il existait en tant que fille.

Au début, cela n'avait pas été un problème. Il était habitué à toutes les appellations allant de "Harry" à "Hé, toi" en passant par "Mon garçon", et aux deux pronoms.

Cependant, Harry était loin d'être un garçon bête. Il avait bien remarqué la différence entre lui et les autres. Les filles, avec qui il allait aux toilettes lors de la récrée, lui ressemblaient physiquement, mais il sentait que leurs comportements et vies étaient différent·e·s des sien·ne·s.

De l'autre côté, il avait bien vu que quelque chose différait physiquement entre lui et les garçons auxquels ils s'identifiaient plus - quand bien même ils soient tous aussi bêtes que leurs pieds, ce que leur "allégeance" à Dudley n'arrangeait pas.

Mais Harry n'avait pas vraiment eu le temps de se poser ces questions puisque ses années d'écoles avaient surtout consisté à se cacher de son cousins et ses chiens de garde.

Cette conscience d'une certaine différence s'était accentuée avec le temps. Il avait commencé à se poser des question bien trop sérieuses pour un enfant de son âge, sur qui il était.
Telle était la question. Pourquoi les autres enfants le regardaient avec incompréhension lorsque lui ou Dudley, pour une quelconque raison, parlaient de lui au masculin, puis que les instituteur·ice·s le genraient au féminin juste après ?

Et puis un jour, sans prévenir, et sans même le comprendre vraiment, il s'était senti très mal lorsque sa maîtresse l'avait genré au féminin.

Ce sentiment était revenu de plus en plus souvent, et le pronom "il" était de plus en plus régulièrement utilisé.

Il commençait à comprendre que pour les autres, contrairement à ce qu'il avait perçu lors de son enfance, le "il" et le "elle" étaient différents, que chacun de ces deux pronoms étaient associé à des choses bien particulières, et que lui penchait bien plus vers ce "il" et ce à quoi on l'associait, s'il se calquait sur ce que les autres attendaient.
Cela avait été source de grandes questions, car lui avait toujours pensé que le il et le elle pouvait aller à la même personne, que tout le monde pouvait utiliser les deux sans disinction, ou bien celui qu'iel souhaitait.

À 7 ans, Harry était persuadé d'une chose : il était un garçon.

Et il savait une autre chose : ce n'était pas normal aux yeux d'à peu près tout le monde, même si certain·e·s n'y faisaient pas attention, comme sa famille.

Le seul endroit ou Harry, étrangement, se sentait bien, c'était chez Mrs Figg.

Bien entendu, la vieille dame avait eu un instant d'incompréhension lorsqu'elle l'avait vu pour la première fois, même si Harry n'avait pas su pourquoi sur le moment.

À présent, il sait qu'en tant que Cracmol et "gardienne" de sa personne, elle avait très probablement dû entendre parler de la fille de James et Lily, et non pas du fils de James et Lily, ou du neveu de Vernon et Pétunia Dursley.

Mais la femme n'avait pas bronché pour autant, et Harry avait bien vite été "son garçon".

Un jour qu'Harry était chez elle, alors que sa famille était partie au restaurant, après une rude journée d'école et un mal-être grandissant, le garçon avait "il ne savait comment" cassé un verre qu'elle lui avait servi et sa nourrice lui avait demandé pourquoi il était si énervé.

Et incompréhensiblement, le Survivant avait réussi à mettre des mots sur son ressenti et à l'exprimer.

Et bien que ses mots aient été ceux d'un enfant de 9 ans à cette époque, Harry avait exprimé son incompréhension, son mal-être et sa certitude d'être un garçon.

Une semaine plus tard, comme par magie, tout le monde le genrait au masculin sans problème, comme si personne n'avait jamais su quel genre on lui avait assigné à la naissance.

Harry avait maintenant une hypothèse de ce qui s'était passé pour que cela soit possible, grâce à ses nombreuses lectures - Hermione ne le croirait jamais s'il lui disait.

Et puis il avait eu 11 ans, Hagrid était arrivé, et il était entré à Poudlard.

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Publié le Mardi 24 Mai 2022 (Journée de internationale de la visibilité pan, tiens donc, encore de la queerness !)


Un garçon comme un autreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant