A la recherche de Proust - [1]

Chapitre 28

♪If you Lie Down with me - Lana Del Rey

Il avait fini par se rendormir, profitant de la chaleur des draps encore imprégnés de l'odeur du noiraud. C'est une main caressant l'arrière de sa nuque qui le réveilla, la nuit commençant à pointer le bout de son nez. Il était trop bien là, emmitouflé dans l'énorme couette, seul le dessus de son crâne dépassait de celle-ci. Il poussa un léger grognement à peine perceptible qui arracha un petit sourire à l'homme qui essayait de le sortir de sa journée d'hibernation.

"Allez, debout la marmotte... Ton ami palefroi s'inquiète de ton absence et m'a harcelé toute la journée pour savoir où est-ce que j'avais enterré ton joli corps. Si ça ne t'embête pas trop, j'apprécierais que tu le contactes rapidement avant qu'il ne prévienne la police de ta soudaine disparition."

Eren gloussa, imaginant très bien Jean tourmentant son amant dans les longs couloirs de leur université. Il se décida enfin à sortir la tête de son cocon, ses yeux embués de sommeil croisant ceux, amusés et cernés de l'Ackerman. Il ne ressemblait plus du tout au jeune homme sexy et enjôleur de leur rencontre, là, son visage légèrement bouffi par la sieste dont il sortait petit à petit, toujours somnolent. Il paraissait tellement plus jeune, tellement plus fragile avec son visage enfantin et ses cheveux en pagaille. Comment la simple vision de ce garçon pouvait-elle déclencher autant de tendresse et d'amour chez l'adulte qui peinait à calmer les battements hiératiques de son pauvre cœur ?

Le jeune s'étira disgracieusement, baillant à gorge déployée devant un Levi blasé, les yeux levés vers le ciel.

" 'lut... L'est quelle heure ?"

"Pas loin de 19 h 00. Bouge-toi feignasse !"

Il écarquilla les yeux de surprise, ne s'attendant clairement pas à une heure aussi tardive. Il entendit son ventre émettre un bruit tonitruant en se contractant. N'ayant pas mangé depuis la veille à midi, il était affamé. Levi lui lança un regard moqueur, un sourcil en l'air alors que le jeune homme se frottait vigoureusement le ventre, essayant de calmer les gémissements douloureux de son estomac vide.

"Va prendre une douche le temps que je prépare de quoi sustenter la bête, tu en as bien besoin..."

"De la douche ou du repas ?"

Il lui lança un clin d'œil taquin avant de se diriger vers sa cuisine, laissant au brun le temps de se lever tranquillement.

C'était tellement simple, tellement naturel entre eux. Ils n'avaient pas à se forcer, ni à jouer la comédie. Tout était fluide et spontané, comme s'ils avaient toujours fait cela ensemble. Levi, qui n'était pourtant pas habitué à partager son quotidien avec d'autres êtres humains, s'était très vite fait à la présence du jeune, sachant instinctivement comment se comporter avec lui. Réciproquement, Eren avait réussi à se caler aux habitudes et aux humeurs de l'adulte, réussissant à l'apprivoiser mieux que personne. Il commençait à le comprendre, cernant ses envies et besoins, interprétant ses comportements aussi bien que ses proches. C'est grâce à l'adaptation et la patience du brun que Levi avait fini par s'ouvrir à lui, laissant enfin parler son cœur et ses sentiments. Aujourd'hui, il pouvait le dire, il éprouvant plus qu'une attirance physique pour Eren. Il s'y était attaché plus que de raison, faisant grandir en lui l'excitation et la peur face à cette connexion entre eux. Il restait bien évidemment sur ses gardes, toujours craintif de la désillusion mais avait l'envie irrépressible de faire confiance aveuglement au jeune Jaeger. Il sentait que les paroles du beau brun n'étaient pas que du vent.

Celui-ci venait justement de se lever, le corps anchylosé de ce trop long sommeil, une horrible douleur dans le bas du dos. Il récupéra son smartphone qu'il avait laissé dans son jean par terre pour rassurer son ami. Il paniqua un peu lorsqu'il vit apparaître les nombreux appels manqués et textos sans réponses du châtain. Levi avait dû morfler toute la journée, le jeune espérait vraiment qu'il avait réussi à garder patience. Il composa le numéro de Jean et n'eut à attendre qu'une seule sonnerie pour entendre le timbre de voix quelque peu rassuré du garçon à tête de cheval.