De toi à moi (with love) - Partie 1 -

Chapitre 5

Il était près de minuit. Alex et moi étions attablées à une terrasse éclairée par des lumières orangées, tandis qu'une chanson du groupe The Police emplissait l'air d'une atmosphère mélancolique.

Les gens autour de nous discutaient, certains riaient, bien que l'ambiance restât plutôt calme et détendue. Il s'agissait d'un bar branché de la ville où ma sœur appréciait se rendre après le travail.

Karl, un de ses amis — et accessoirement le gérant du lieu, s'approcha de nous :

— Vous voulez un autre verre, les filles ?

— ça ira pour moi, lui répondit Alex.

— Et pour moi aussi, rajoutai-je en souriant.

Et ça l'était. Je ne buvais pas souvent et les trois Margaritas que j'avais avalées me suffisaient amplement. J'avais un peu trop chaud et la tête me tournait. Alex, quant à elle, s'était contentée d'un soda : ma sœur ne buvait jamais.

— Si vous avez besoin, sifflez-moi et je rapplique dans la seconde !

Karl rit et me fit un clin d'œil avant de s'éloigner. Il était plutôt sympathique, même si depuis notre arrivée, il s'était montré un peu trop attentionné envers moi.

Je ne comprendrai jamais l'intérêt des hommes à mon égard. Je me maquillais peu, m'habillais simplement. Je n'étais pas complexée par mon physique, en revanche je trouvais mon corps trop mince et mon visage trop banal.

A l'adolescence, je rêvais d'avoir une forte poitrine, des hanches généreuses comme certaines filles qui faisaient tourner les têtes. Lorsque j'avais compris que je n'aurais jamais de jolies formes, à moins de passer par la case chirurgie esthétique — ce qui était évidemment hors de question, j'avais appris à m'accepter, sans chercher à séduire quiconque.

— Karl n'est pas méchant, tu sais, me lança Alex, comme si elle lisait dans mes pensées. Un peu séducteur, c'est tout.

Ils se connaissaient depuis quelques années et ils étaient devenus amis. Enfin, au départ, il s'agissait d'une connaissance de Julian. Il avait ouvert ce bar quelques mois plus tôt, dans le quartier d'Echo Park, et nous étions venus ici directement depuis la maison de Jared.

En chemin, Alex m'avait expliqué ce qu'il s'était passé pendant que j'attendais dans le jardin ; il refusait toujours de faire la promotion, quitte à payer une importante somme d'argent pour rupture de contrat. Elle ne comptait pas baisser les bras, même si de son propre aveu, cela semblait difficile, puisqu'il était incroyablement têtu.

Elle avait tout de même remporté une petite victoire, puisqu'elle avait réussi à le convaincre de se rendre à une soirée de charité le week-end prochain, ce qui lui permettrait peut-être d'améliorer son image au sein des médias. Apparemment, le conflit entre lui et les producteurs du film, un blockbuster hollywoodien, avaient fuité et la presse s'était déjà emparée de l'affaire.

Je n'arrivais toujours pas à croire que je m'étais rendue chez lui, et qu'il s'était montré si odieux. Je ne savais pas qui je devais blâmer le plus ; lui, pour s'être comporté de la sorte, Alex, pour m'y avoir conduite de force, ou moi, qui n'avait pas plus insisté pour rester dans la voiture.

Alors que mes pensées vagabondaient, je triturai nerveusement mon bracelet ; malgré son côté enfantin, il m'était sûrement ce que j'avais de plus cher. Cela faisait plusieurs fois aujourd'hui que je ressentais une certaine nervosité que je ne comprenais pas vraiment.

Pourquoi est-ce qu'il me faisait cet effet-là ? Pourquoi me mettait-il si mal à l'aise ?

— Allo, Charlie, ici la terre, me dit Alex, tout en bougeant énergiquement ses mains devant mon visage. On y va ?