Les Rescapés de Salem - Tome 2: Le shaman

Chapitre 1.

Salem, vendredi 21 mai 2021
20h, commissariat de police de Salem

- Tu n'es pas encore parti mon grand ?, demande Denise, derrière son comptoir d'accueil.

- J'y vais justement, répond le loup-garou. Ne t'inquiète pas.

- Si je m'inquiète pour toi, chaque jour qui passe.

- Il n'y a aucune raison.

Alistair se penche sur le comptoir et embrasse la joue de sa collègue. Denise a tendance à trop s'en faire pour le personnel du commissariat. À plus de 55 ans, elle s'est donnée la mission de protéger ses poulains qu'elle a vu grandir. Ce bout de femme, humaine, a les épaules les plus solides que le loup-garou n'ait jamais vu. Elle est pour cet établissement, ce que Susann est pour Asa. Mais comme son homonyme, Denise s'oublie au détriment des autres. Elle part toujours après tout le monde et arrive la première.

- Rentre aussi Denise, lui conseille-t-il d'une voix douce, démontrant l'affection qu'il éprouve envers elle. L'équipe de nuit est là.

Comme pour appuyer les dires d'Alistair, le collègue qui est chargé de prendre la relève de Denise, se fait remarquer et lui lance un clin d'oeil. Ali voudrait lui poser une question qui lui brûle les lèvres. Elle prend soin des autres, mais au final, lorsqu'elle quitte son bureau, qui prend soin d'elle ? Étant divorcée et ses enfants éparpillés aux quatre coins du pays, elle est seule. Depuis peu, il comprend ce qu'elle vit. Enfin lui, il a Riley. Son meilleur ami l'empêche de sombrer.

Le regard bienveillant de Denise veut tout dire. Elle est restée parce qu'elle voulait s'assurer qu'Alistair ne quitterait pas son bureau à point d'heure, ni ne se noierait dans le travail toute la nuit. Chose qu'il fait un peu trop souvent ces derniers temps, depuis mars pour être exacte. Depuis que Sidney a décidé de faire une pause dans leur relation, dans leur mariage.

Il force un sourire rassurant sur son visage. Le coeur qui bat sous la poitrine de Denise n'est qu'amour et il refuse de lui faire de la peine. Il a rarement vu de coeur aussi généreux.

- Je devais discuter avec Gordon, lui dit-il sans détailler la conversation.

- Ce n'est jamais bon quand l'un d'entre vous reste discuter avec le patron, souligne-t-elle, une mine soucieuse sur le visage.

- Ce sont les aléas du boulot, ne t'inquiète pas. À demain.

- Tu es censé être de repos ce week-end.

- J'ai demandé à être dans l'équipe de garde.

Ce qu'il ne peut pas avouer à sa collègue, c'est qu'il fait des heures supplémentaires pour éviter de passer son dimanche à ruminer. Ça détournera son esprit de la réunion familiale chez Virginia, la 3ème qu'il manquera. Pourtant, les sorcières ont essayé de le convaincre de venir, que sa place était toujours parmi eux. Non, il ne veut pas passer une journée au milieu de sa famille d'adoption, comme s'il n'était pas séparé de son mari. Ni à faire semblant de ne pas être anéanti par cette situation.

- Ne te surmène pas, lui ordonne-t-elle gentiment, ce qui lui vaut une grimace moqueuse.

- Dit-elle, réplique Alistair. Toi aussi Denise, rentre chez toi.

- File vilain garnement qui me déclenche des cheveux blancs.

- À ton âge, tu n'en as pas déjà ?, s'amuse-t-il.

- Espèce d'ingrat. File d'ici !

- À vos ordres sergent.

Denise repousse son épaule, sans méchanceté. De toute façon, avec sa force humaine, il y a peu de chances qu'elle parvienne à faire mal ou même à faire reculer un loup-garou alpha d'une simple pression de la main. Il l'embrasse une dernière fois avant de partir.