22 Décembre

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Je confie les clés de la boutique à Laurent vers 18h30, ce qui nous laisse le temps de nous préparer pour nos soirées respectives. C'est le deuxième soir de suite que je le quitte aussi tôt. Même si je suis heureuse qu'il ait un deuxième rendez-vous consécutif avec Yasmine, je ressens une certaine mélancolie dans ma cage thoracique. Pratiquement trois ans ont passé depuis notre rencontre. Au fur et à mesure, une routine s'est installée. Du statut du SDF de la rue, il est devenu mon ami ; puis du statut d'ami, il est devenu un frère.

De même qu'avec Ryme, nous ne partageons pas les mêmes gênes, le même sang, ni le même nom. Néanmoins, l'identité de nos cœurs résonne de la même symphonie. Laurent est un homme qui me rend meilleure chaque jour, et ce même si je ne lui offre pas une vie plus propice.

Vers 18h45, je suis de retour à mon appartement. Ma grand-mère s'est encore endormie devant la télé, son carnet de mots croisés ouvert sur sa poitrine. Je tente de faire le moins de bruit possible en me rendant dans ma chambre.

Si je veux pouvoir arriver à la pizzeria à temps, il faut que je me prépare en moins d'une heure. C'est faisable.

Avant toute chose, je prépare ma tenue. Je pourrais tout aussi bien y aller munie de mon pull de Noël et de mon jean délavé, mais je profite de l'occasion pour m'apprêter. Il y a bien longtemps que je ne me suis pas sentie jolie. Je veux dire vraiment jolie. C'est l'inconvénient du métier d'artisan : il est déconseillé de porter une combinaison rouge chic, centrée par une ceinture dorée.

J'hésite un moment. Je ne suis pas du genre à me faire remarquer, alors une couleur aussi vive n'est peut-être pas recommandé. Autrement, tous les regards seront rivés sur moi.

Je me fige un instant.

Tous les regards. Sur moi.

Cette combinaison est peut-être l'arme du crime visant à me montrer différemment aux yeux du monde, aux yeux de Noël.

Je m'arrête une nouvelle fois. Il est hors de question que mon choix vestimentaire soit décidé par l'intermédiaire d'un homme. Mais si c'est pour cet homme ?

Ressaisis-toi, Fran ! Tu vas dans une pizzeria et tu as encore parfois besoin d'un bavoir. Même Taylor Lautner mériterait que tu tâches cette si belle tenue ?

Oui. Surtout Taylor Lautner.

Je finis par poser mon véto sur l'ensemble. Une si jolie combinaison ne devrait pas être destinée à moisir dans une buanderie. Surtout quand on sait le prix qu'elle m'a coûté. Si je décide de ne pas la porter, alors je resterais éternellement Fran, la petite commerçante sympa. Il ne faut jamais que j'oublie qu'avant toute chose je suis une femme.

Je pose à côté de ma tenue un legging et un châle noir. Même la beauté a une température limite.

19h04. Super, ce qui me laisse encore une quarantaine de minutes.

Je passe à la douche et j'en profite pour m'épiler grossièrement les jambes qui étouffent depuis quelques jours déjà. A une époque, je m'en moquais personnellement, mais j'obéissais à la pression sociale. A présent, je les fais plus particulièrement pour moi, même si je reste toujours esclave de cette fourbe idée.

Je m'enveloppe d'une serviette, tandis qu'une autre vient enrouler mes cheveux.

Il me reste en tout est pour tout une vingtaine de minutes pour m'habiller, me coiffer et juste un trait d'eye-liner. Alors que j'ajuste la ceinture autour de ma taille, la sonnerie retentit. Je me précipite discrètement dans le salon. Ma grand-mère n'étant pas réveillée, je vérifie son pouls avant d'aller ouvrir.

L'Etincelle { Noël }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant