Chapitre 1 - VivreMusique en médias : Can't you see - Why don't wee
Quatre mois plus tard.
Monroe, Etat de Louisiane
Il faut du temps pour se reconstruire. Parfois les traumatismes sont si profonds qu'ils mettent des mois, des années, voir des décennies avant qu'on ne puisse en être guéri. Parfois au contraire ils sont si encrés en nous qu'on ne finit jamais complètement par s'en remettre.
On devient un parfait condensé d'imperfection et de tourments du passé. Mais il y a toujours de la beauté dans la souillure, non ?
Alors il faut apprendre à vivre avec, coute que coute.
T'as pas vraiment le choix si tu veux t'en sortir dans ce monde. Tu marches, ou t'es laissé à l'abandon derrière et personne – personne – ne viendra te tenir la main pour t'éviter de sombrer au fond du gouffre sans fin qu'est l'enfer.
Ce sera toi – et uniquement toi – qui devra t'arracher les ongles pour espérer en escalader les murs et fuir.
Alors je peux au moins faire semblant d'aller mieux.
Mon frère, Karl, ramène notre dernier carton et le pose sur le bord du canapé. Assise en tailleur sur le sol un peu plus loin, je relève mes genoux et pose mes coudes dessus, l'observant silencieusement.
Mon frère passe une main sur son visage fatigué. Ces derniers jours ont été compliqués pour nous avec notre nouvel emménagement dans cet appartement au nord de Monroe. Mais on a vécu pire. Bien pire en réalité.
Je laisse mes yeux vagabonder sur les murs autour de nous. Ils sont blancs, sans décoration. Purs. Sans visage. Rassurants, en réalité. Personne n'est là pour nous observer ou nous faire du mal.
J'observe ensuite le petite coin salon. L'espace sera parfaitement suffisant pour nous deux. En fait, on n'a jamais eu autant de place à disposition, avec un environnement sain.
Je reporte mon attention sur mon frère. Nous n'avons qu'un an de différence – je suis la plus âgée avec mes 19 ans – pourtant, j'ai l'impression d'être la plus jeune tant ses traits sont creusés.
- Salut, je débute avec un petit sourire.
Il s'installe lui aussi en tailleur devant moi. Ses cheveux blonds captent la faible lumière – les mêmes cheveux que les miens. Mais tandis que ses yeux sont bleus, j'ai hérité du regard vert de ma mère.
Penser à ma mère est si douloureux que je m'oblige à penser à autre chose. Mais c'est dur : je ne peux que me demander ce qu'elle fait actuellement, est-elle sortie du silence qu'elle a décidé de rejoindre des mois plus tôt ? Va-t-elle elle aussi s'en sortir ? Providence n'a pas laissé des cicatrices que sur moi et mon frère. Sur notre mère, aussi.
Mon frère pousse un soupir et me sort de mes pensées. Le sport est devenu l'un des échappatoires de Karl, si bien qu'il s'est épaissi ces derniers mois.
Ça lui permet d'évacuer la rage enfouie en nous. La rage face à ce que l'on a vécu. Sauf que je la sens grandir en lui et je me demande comment il va faire pour l'évacuer lorsqu'elle sera sur le point de tout emporter sur son passage.
Je ne le laisserai pas le détruire. Je veux qu'il se reconstruise. Il le faut.
- C'est un nouveau départ, j'annonce. On laisse tout derrière nous.
Il hoche la tête sans grande conviction. Je sais qu'il est encore plongé au cœur des marécages de la Louisiane, l'ancien QG de la Secte Providence avant qu'elle ne soit démantelée. Du moins...En partie démantelée.
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TOXIC HELL
Romansa♠️La pureté est le pouvoir de contempler la souillure. ♠️ Mon géniteur -l'homme qui a détruit ma vie - m'a kidnappée et presque brisée. J'ai réussi à m'en sortir et je ne souhaitais qu'une seule chose : mettre les ténèbres derrière moi et me reconst...