5 - Différente

89 8 4
                                    


- Alors petit frère ! On a une amoureuse ?

Hvitserk sourit malicieusement en arrachant mon portable de mes mains. Je tente de me relever, agacé, mais Sigurd attrape mes béquilles avec un air moqueur.

- On fait comment maintenant ?

Si Hvitserk fait ça par pure camaraderie, je sais que ce n'est pas le cas de Sigurd. Il prend plaisir à m'humilier et me voir souffrir.

- Rends-les moi tout de suite, espèce de con, je grogne.

- Arrêtez, râle Ubbe. On était censés travailler.

- Plus tard, indique Hvitserk. Ivar a reçu un message vocal d'une fiiiille...

- Arrête ça ! je m'écrie.

Mais c'est déjà trop tard. Hvitserk a mis le haut parleur et la voix de Lisa résonne dans le bureau.

« Salut Ivar, c'est Lisa, euh... tu m'as invitée à boire un café il y a quelques jours, je ne sais pas si tu te souviens de moi ? »

Elle marque une pause, hésitante, et alors que mes frères laissent échapper des onomatopées pleines de sous-entendus, je grogne:

- J'ai pas alzheimer, je suis infirme.

« En fait je viens de me rendre compte que j'ai fait une gaffe. Euh... je t'ai reconnu. Je veux dire, tu es le prince Ivar. Alors quand tu m'as demandé si ça me dérangeait, je pensais que tu parlais de ta notoriété, mais je viens de me rendre compte que tu parlais peut-être de tes jambes. Alors si c'est le cas, sache que ça ne me dérange pas du tout, en fait je m'en fiche. Juste, j'ai pas envie d'être constamment suivie par la presse parce que c'est déjà le cas avec mon métier et... »

Le message se coupe et je soupire de soulagement. Elle est frustrante, cette fille. Elle semble prendre des pincettes constamment et tourner autour du pot. Que me veut-elle ? S'excuser ?

- Qu'est-ce qu'elle fait comme métier ? Elle est actrice X ? me questionne Hvitserk avec un sourire bête.

- En tout cas, elle a l'air aussi déséquilibrée que toi. Vous ferez une belle paire, me dit Sigurd avec un sourire moqueur.

Bizarrement, ce qu'il dit m'énerve. Ça m'énerve vraiment. J'ai l'habitude qu'il se moque de moi et me provoque. Mais qu'il ose parler d'elle me met hors de moi. Pourtant, je la connais à peine. Mais son côté enfantin m'attendrit.

- Ferme ta grande gueule, Sigurd.

- Tiens, me dit Hvitserk en me rendant mon téléphone. Je suis désolé si je t'ai mis mal à l'aise. Je pensais pas que ce serait personnel.

Il ne pensait pas que ce message, sur mon téléphone personnel, serait privé ? Il me prend pour un idiot ?

Ubbe me rend mes béquilles et je quitte le bureau, m'installant dans le salon. Je décroche mon téléphone et écoute le deuxième message vocal.

« Voilà, donc je disais, parce que mon message était trop long, que, euh... j'aimerais bien te revoir. Dans un endroit peut-être plus intime, parce que les journalistes me suivent tout le temps et je suppose que c'est pareil pour toi. C'est vrai que j'aurais préféré inviter un homme normal, je veux dire, un homme pas connu, enfin lambda, je suis maladroite, pardon. Mais ce que je voulais surtout te dire, c'est que je n'ai pas envie de passer à côté d'une belle rencontre juste à cause des paparazzis. Voilà. Bonne soirée, enfin bonne journée. Bisous. »

Je ne sais pas si je dois rire ou pleurer. Cette femme, qui est presque aussi connue que moi, enchaîne les gaffes. Je me demande comment elle se débrouille devant les journalistes. D'une certaine manière, je trouve ça mignon. Mais ce n'est pas élégant. Ma mère voudrait que je fréquente une femme adroite, habituée aux codes de la haute société.

Art dramatiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant