Jamais je n'avais été aussi nerveuse. Pourtant, mon métier me soumet souvent à la pression. Mais chanter est naturel pour moi. C'est ma maison, c'est ce que je suis. Rencontrer un beau garçon, en revanche, ce n'est pas dans mes habitudes. Alors je stresse.
Au vu de ma maladresse, j'ai peur de faire d'autres gaffes. De toute façon, je ne pourrai pas faire pire que ce que j'ai fait récemment. C'est censé m'encourager, de penser ça ? Seigneur, je n'ai jamais ça avec les hommes, habituellement. Pourtant, j'ai eu plein de rencards. Avec des musiciens, des chefs d'orchestre, des ministres, des multimillionnaires, des mannequins, des beaux inconnus aux quatre coins du monde... ça n'a jamais abouti, mais ça ne m'a jamais rendue fébrile non plus.
Le directeur de l'Opéra d'Oslo a accepté de me laisser le restaurant pour ce soir. J'ai fait dresser la plus belle table, près de l'immense baie vitrée et tout près de l'ascenseur, pour Ivar. Je lui ai trouvé la chaise la plus confortable et Ricardo, le chef cuistot, a accepté de travailler pour moi ce soir. J'espère vraiment que tout sera parfait. J'avais demandé à Lang de jouer au piano pendant la soirée, mais il doit partir à Londres demain matin. Quant à Clarisse, c'est hors de question, elle ne ferait que fouiner toute la soirée. Je mettrai une petite playlist de jazz ou de musique de chambre sur les enceintes.
J'applique un rouge à lèvres aussi rouge que ma robe, corrige mon mascara et laisse mes cheveux noirs onduler le long de mon dos et de ma poitrine. Mes longues boucles d'oreilles en faux diamants sont discrètes mais contrastent à merveille avec ma chevelure. Ce soir, je suis très belle. Je suis fière de moi. Je vais réussir à me rattraper et arrêter de stresser.
Je prends ma voiture et roule jusqu'à l'Opéra. Évidemment, j'ai ma propre place de parking, et je remarque la Mercedes de la famille royale qui est garée non loin de moi. J'ai fait exprès d'avoir un peu de retard, pour qu'Ivar puisse prendre place sans être gêné. J'entre et présente en soupirant ma carte d'identité aux gardes du corps d'Ivar. Voilà pourquoi je ne voulais pas d'un homme important. On ne sera jamais vraiment seuls lui et moi.
Je prends l'ascenseur et pénètre dans le restaurant. Le serveur me débarrasse de mon manteau de fausse fourrure. Je croise le regard d'Ivar, qui m'observe de bas en haut, et je me sens soudain très mal à l'aise. Suis-je assez jolie pour lui ? Il semble être taillé dans du marbre, et ses yeux sont comme les abysses. Moi, je n'ai rien de tout ça.
Je me dirige vers la table en rassemblant toute la confiance que je peux avoir, et je lui souris chaleureusement.
- Bonsoir, je murmure en m'asseyant.
Il a le visage fermé, l'espace de quelques secondes, mais il semble se reprendre et il m'adresse un sourire. Est-ce un sourire froid ou timide ? Je suppose que je ne le saurai jamais.
- Tu es en retard.
Adorable.
- La chanteuse n'est jamais en retard. La soirée ne commence que quand elle est là.
Il lève les yeux au ciel mais sourit en coin.
- Peut-être, mais je suis Prince.
J'esquisse un sourire amusé et commence à me détendre.
- Si on se contentait d'être Ivar et Lisa, ce soir ?
- J'en serais ravi, il me répond.
Nous sommes interrompus par le serveur qui nous demande ce que l'on souhaite boire. Désirant briser la glace, je m'autorise pour une fois un peu d'alcool, et je demande un Spritz. Ivar prend un Martini et repose les yeux sur moi.
- Moi non plus je ne savais pas qui tu étais quand je t'ai invitée. Je suis tombé par hasard sur un article qui parlait de toi, Aïda.
Je souris, gênée.
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Art dramatique
FanfictionIvar Lothbrok est le dernier fils du roi Ragnar II de Norvège. Le jeune homme est cependant né avec une infirmité rare, l'empêchant d'utiliser ses jambes, et sa condition difficile fait de lui un prince colérique, solitaire et aigri. Lisa de Maestri...