Chapitre 3 : l'invitation

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Alors que l'aube pointe à peine à l'horizon, je suis déjà debout

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Alors que l'aube pointe à peine à l'horizon, je suis déjà debout. Enfermée dans mon grenier, j'étale sur le sol boisé des toiles et des pinceaux. Les pots de peinture m'encerclent et je suis à deux doigts de les nommer.

J'ai encore la soirée dans la tête. Ma dispute avec Holden. Ses mains sur ma gorge. Ses menaces sifflantes.

Les deux heures où j'ai pleuré compulsivement dans la chambre, retirant encore et encore mes bagues de mon doigt, comme il l'avait si bien fait devant cette sale garce de Jill...

Sauf qu'à ses antipodes, je ne pouvais m'y résoudre. Je ne pouvais possiblement me séparer de leur étreinte sur mon annulaire. Alors même si j'ai passé la nuit sur les rebords de notre lit conjugal, évitant ne serait-ce que de toucher une parcelle de la peau de l'homme qui m'avait pourtant juré amour et fidélité pour le restant de notre existence... aujourd'hui, je me vide la tête dans mon atelier de peinture.

Loin des tons monochromes du restant de la demeure, le grenier est mon antre de couleurs. En plus d'écrire plus compulsivement encore qu'un sténographe lors d'un procès, j'ai toujours su trouver refuge dans la peinture. Non pas que je plaide avoir un quelconque talent, simplement que jeter de la peinture sur une toile, c'est la meilleure façon pour moi d'imaginer Holden se prendre une gifle.

Ou accessoirement un coup de genoux dans ses précieuses.

J'attrape un pinceau en rampant jusqu'au plus grand pot et retrousse les manches de mon sweat sur mes coudes. La peinture rouge est la première à gicler. Ma haine me pousse à grogner. Un peu plus et les jets furieux viendront déchirer ma toile.

C'est ce qu'il faut peut-être...

Au moins quelque chose que je peux déchirer à mon tour.

Cependant, j'ai à peine le temps de presser un pinceau plus fin sur la toile que la porte du grenier s'ouvre. Dans un petit sursaut de surprise, je me retourne, mais la peinture se projette... sur le t-shirt blanc de Holden.

N'est-ce pas ironique ? Il a presque l'air innocent, comme ça...

Presque, est bien le mot. Car quand il redresse la tête, je peux voir l'agacement noyer ses prunelles déjà sombres. Il soupire en passant sa main dans sa barbe pas encore proprement rasée et referme la porte derrière lui.

Toujours silencieuse, je déglutis, recule d'un pas et enfonce mon cou dans le col de mon sweat à capuche.

Comme un animal blessé, je me cache de lui.

Comme une âme brisée, je me sens incliner l'échine.

Je déteste ce que tu fais de moi, Holden... Un mariage ne devrait jamais être la relation dans laquelle on se sent aussi démuni.

Je prends donc mon courage à mon cou et essuie lentement mes mains remplis de peinture sur mon pantalon.

- Bonjour...

Stains Never Fade | En Cours Où les histoires vivent. Découvrez maintenant