Chapitre 7- Unyma

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L'élève et l'enseignante se toisaient mutuellement, attendant une réaction de la part de l'autre. Le silence était si pesant qu'on entendait distinctement les rires, suivis de jappements contents, jusqu'aux frémissements des feuilles de l'arbre. Elles étaient immobiles. Si bien qu'on aurait pu croire que le temps s'était arrêté.

D'un côté, Rhéa qui avait combattu sa propre peur des jours durant, avant de découvrir que la personne qu'elle redoutait tant n'était autre que son professeur de français. Les questions la submergeaient de tout part, engloutissant ses craintes. Car malgré tout ce qui s'était passé, Rhéa ne se sentait pas en danger en sa présence. Sa méfiance était plutôt dirigée sur ce qu'elle pourrait lui dire.

Face à elle, l'institutrice avait été aussi étonnée que soulagée. Elle s'attendait à revoir la fille de son ami. À lui demander de ses nouvelles, et en savoir plus sur l'évolution de Rhéa. Le fait que Gem soit aussi content lui confirmait que celle qu'elle voyait comme sa fille était revenue. Jamais elle n'aurait pensé qu'elle serait accompagnée. Surtout que d'après ses nombreux rapports, Rhéa n'avait pas l'air très pressé d'écouter ce qu'elle avait à lui dire. Par conséquent, elle fut incapable de dire quoique ce soit pendant un moment. Mais alors qu'elle s'apprêtait à rompre le silence, Rhéa la devança subitement.

- Vous ne pensez pas que ça aurait été plus facile de me dire tout de suite qui vous étiez, au lieu de me faire peur ainsi ?

Un 'bonjour' ne l'aurait pas tuée, mais Rhéa sentait que les politesses ne lui seraient d'aucune utilité. Autant aller droit au but...
Bien que décontenancée, elle se retenait malgré tout de parler trop sèchement. Elle adopta à la place un ton hésitant, bien qu'il contenait une infime once de reproche.
Les événements lui avaient prouvé que l'enseignante n'était pas ce qu'elle prétendait être. Elle ne voulait pas l'énerver d'une quelconque manière. Pourant, loin d'être fâchée, la quadragénaire lui sourit avec bienveillance.

- M'aurais-tu cru ?

- Peut-être pas, admit la collégienne. Et puis, je ne sais toujours pas ce que je dois croire...

- C'est juste, dit Corayline en penchant la tête d'un côté. Elle proposa alors à Rhéa de la suivre au salon pour discuter, en prétextant que le bureau contenait trop 'd'objets inflammables', faisant référence aux innombrables dossiers et feuilles de papier et livres posés ça et là.

Troublée par cette remarque curieuse, Rhéa lui emboîta le pas en songeant à l'aboutissement de leur entretien.
La seule chose dont elle était certaine était qu'à la fin de cette journée, elle saurait enfin qui, ou plutôt ce qu'elle était. C'était surtout ce qu'elle souhaitait.

Elle s'assit dans un fauteuil que Corayline lui désignait et observa le vase présent devant elle. Ce vase, qui normalement, devrait être aux ordures et qui autrefois, portait des fleurs d'un rouge vif. Elle demanda à Rhéa de patienter et sortit de la pièce. Quelques minutes plus tard, elle réapparut, un plateau en main. Elle posa celui-ci sur la table après avoir transféré le vase au sol. Sur ce plateau ce trouvaient des petits cookies et deux tasses contenant un liquide bleu nacré qui scintillait légèrement sous les rayons du soleil qui s'infiltraient à travers les rideaux fins. Rhéa examina de loin cette substance hétéroclite. Pour rien au monde elle n'aurait goûté à ce breuvage insolite. Ça ne ressemblait à aucune boisson qu'elle avait déjà eu l'occasion de croiser. Aussi, elle fit mine de ne pas avoir vu le plateau devant elle et se concentra plutôt sur ce vase qui lui avait causé tant de tourments.

- Il est si beau que je n'ai pas pu me résigner à le jeter, s'exclama Corayline en coupant court à la contemplation de Rhéa.

Cette dernière se retient de lancer une réplique cinglante. La supposée enseignante commençait à l'agacer avec ses remarques qui la prenaient au dépourvu, comme si tout était normal alors que rien ne l'était.
Évidemment, tout ça devait être tout à fait habituel pour elle, mais Rhéa aurait bien voulu qu'elle en vienne au fait. C'est à dire, pourquoi elle lui avait donné une lettre d'une soit disant école, et comment tout ce qui lui arrivait avait une raison plausible.

Corayline dut s'apercevoir du courroux de son élève, puisqu'elle reprit vite un air sérieux, pour ensuite prendre place dans le siège en face de la jeune fille.

- La première chose que tu dois savoir, c'est que la Terre a une... jumelle.

Face au froncement de sourcils de Rhéa après cette première révélation, elle dit alors :

- Imagine qu'il y ait deux systèmes solaires identiques. Je veux dire qu'il y a une autre Terre, semblable à celle-ci.

- Et elle est habitée, cette planète ? Elle se trouve où ?

- Oui, elle est habitée, répondit Corayline. Et elle se trouve très loin et pourtant exactement au même endroit que la Terre.

- Quoi ? s'enquit Rhéa avec une mine incrédule.

Pour répondre à cela, Corayline se saisit de deux feuilles de papier qu'elle dénicha dans un meuble à sa droite, ainsi qu'un crayon. Elle s'attela à la tâche non-aisée de dessiner un cercle aussi parfait que possible.
Elle en fit de même sur l'autre feuille. Puis, sous le regard fasciné de Rhéa, où s'ajoutait peu à peu la compréhension, elle plaça les deux fiches l'une sur l'autre, en faisant attention à ce que les cercles soient parfaitement superposés, démontrant ainsi ce phénomène des univers parallèles.

- Les deux Terres sont exactement au même endroit, dans des univers différents. C'est pareil pour tout le système solaire.

- Vous voulez dire qu'il y a peut-être une personne qui se trouve juste ici, en ce moment, mais dans un autre univers ?

- C'est... ça, lança la quadragénaire.

Elle semblait désemparée face à cette conclusion des plus singulières.

- C'est insensé...

Corayline lui sourit.

- D'autres questions ?

Rhéa secoua la tête. Elle préférait plutôt entendre ce que son interlocutrice allait dire. La suite s'annonçait intéressante.

- Avant toute chose, nous n'allons pas continuer à appeler ça l'autre Terre. Ça deviendrait lassant, surtout que nous allons en parler encore longtemps. La 'Terre' de l'autre univers à en fait un nom qui lui est propre: Unyma. Pour revenir au point le plus important, tu dois comprendre que la Terre et L'Unyma ont une différence majeur.

Elle marqua un temps d'arrêt pour avaler une gorgée du contenu de sa tasse. Rhéa scrutait ce liquide scintillant d'un oeil curieux, mais s'abstint de tendre la main pour y goûter. Il ne manquerait plus qu'elle se fasse empoisonner...
L'enseignante, après avoir reposé sa tasse sur le plateau et replacé correctement ses lunettes sur son nez, dit ensuite :

- La connection des humains avec la nature n'est pas vue comme importante par beaucoup sur Terre. La plupart n'en ont rien à faire. Il est vrai qu'une bonne partie de l'humanité lutte pour l'environnement et la préservation des ressources, mais c'est une minorité. Les gens ne se soucient pas de la nature comme ils le devraient. Mais passons. L'Unyma, n'est de son côté pas victime de l'humanité. Ce sont les personnes qui 'subissent' la nature. Car vois-tu, là-bas, lorsque les enfants naissent, ils reçoivent des dons spéciaux; des dons de la nature. On les appelle les élémentaires. Mais il arrive parfois que des enfants terriens se retrouvent aussi avec des dons semblables. Ils n'ont pas de parents élémentaires, ce qui est considéré comme assez rare. Les personnes issues de familles entièrement terriennes, mais qui ont tout de même l'honneur d'être des enfants de la nature sont connus comme les élémentaires terriens. Tu t'en doutes sûrement à présent; tu es l'une de ces personnes.

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Et voilà ! Un nouveau chapitre (de taille normale, cette fois-ci😅)
Comment l'avez-vous trouvé ?
Désolée du retard, mais comme je l'ai dit, j'avais un examen à passer la semaine dernière...
À bientôt pour la suite de l'histoire !

Et merci de continuer de la lire !❤
Le fait que vous ayez décidé de poursuivre votre lecture est très gratifiant et encourageant !😊

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