Mia n'était pas ce qu'on pourrait qualifier d'enfant difficile. Certes, elle ne répondait pas lorsqu'on lui parlait et semblait ne pas écouter ce qu'on lui disait mais elle ne faisait jamais de bêtises et forcément, elle ne contredisait jamais personne. Son comportement énervait particulièrement son père qui avait décidé de ne plus lui adresser la parole, laissant Mia enfermée dans son mutisme au lieu de l'en sortir. Elle était dans cet état depuis la mort de sa mère. Elle s'était retrouvée seule avec son père puisqu'elle était la seule enfant de la famille mais l'homme n'était pas resté célibataire très longtemps et avait fini par se mettre en couple avec une femme que Mia n'aimait pas beaucoup. Elle la traitait comme un moins que rien et n'hésitait pas à l'accuser lorsqu'elle faisait quelque chose de mal. La petite fille, âgée alors d'à peine cinq ans, passait son temps enfermée dans sa chambre ou quand elle n'était pas là, à la lisière de la forêt, où elle jouait tout seule, sans faire d'histoire.
Le jour de ses six ans, alors qu'elle était, comme à son habitude, en train de jouer dans les bois avec des petites voitures, quelque chose bondit sur Mia, la faisant tomber à la renverse. La petite fille laissa échapper un cri de terreur en se mettant en boule pour se cacher le visage et tenter de se protéger. Elle resta dans cette position quelques secondes et lorsqu'elle s'aperçut que plus rien ne bougeait, elle retira une main de son visage et ouvrit un œil pour voir ce qu'il se passait. Elle fut surprise de voir un petit chiot de couleur blanche en position de jeu, la tête au ras du sol et les fesses en l'air, sa petite queue battant l'air. Mia se remit en position assise et regarda curieusement l'animal qui sautait dans tous les sens dans l'espoir de pouvoir jouer avec elle. Comme ça n'allait visiblement pas assez vite à son goût, il fit un bon en direction de Mia qui recula vivement, apeurée. Le chiot couina piteusement en s'asseyant avant de baisser tristement la tête. La petite fille regarda autour d'elle et prit un bout de bois qui se trouvait juste à côté d'elle. Son geste raviva la joie du chiot qui abaissa le haut de son corps et se remit à remuer gaiement la queue. Mia regarda le bout de bois avant de le lancer un peu plus loin. L'animal s'empressa de courir pour aller récupérer le bout de bois et vint le déposer devant la petite fille. Ce manège dura de longues minutes, les réactions du chiot amusant Mia. Soudain, la voix de sa belle-mère retenti, appelant la petite brune pour qu'il vienne manger. Elle soupira avant de se pencher pour ramasser ses jouets et se leva, surprenant l'animal qui s'assit en la regardant curieusement, la tête penchée sur le côté. Mia le regarda tristement et agita la main de droite à gauche pour ensuite faire volte-face et courir vers la maison.
Les jours suivants, dès qu'elle rentrait de l'école, Mia se dépêchait d'aller à la lisière de la forêt pour jouer avec son nouveau compagnon. Le chiot était toujours au rendez-vous, ne sortant de sa cachette que lorsqu'il était sûr que c'était bien La petite fille qui se trouvait là. Ce manège dura deux ans. Deux ans au court desquels Mia et le chiot qu'elle avait affectueusement nommé Quixy étaient devenus presque inséparables. Évidemment, ni son père ni sa belle-mère n'en savait rien car la petite brune ne s'était toujours pas décidée à ouvrir la bouche. Pourtant, Mia finit par se rendre de moins en moins à la lisière du bois, préférant passer du temps avec ses nouvelles amies qui se fichaient bien qu'elle ne parle pas. Elles s'amusaient ensemble et cela suffisait. Parfois, elles jouaient dans le jardin de la grande propriété pendant que le pauvre Quixy les regardait tristement de sa cachette, espérant que son amie humaine revienne jouer avec lui. Seule. En effet, Mia avait essayé d'amener ses amies dans la forêt mais celles-ci avaient été effrayées et Quixy ne s'était jamais montré.
Mia ne retourna plus dans les bois jusqu'à son année de terminale. Désormais adolescente, elle avait été confrontée à la cruauté des jeunes de son âge qui ne rataient jamais une occasion pour se moquer de son mutisme. Cela était allé jusqu'à cette soirée à laquelle son prétendu petit ami l'avait invitée. Il avait profité qu'elle refusait de parler pour abuser d'elle, et d'en faire profiter ses amis. Ce soir-là, lorsque son calvaire fut terminé, Mia se rhabilla et courut jusqu'à chez elle sans passer par la maison et laissa ses jambes la porter vers la forêt où elle s'effondra en pleurs dans une petite clairière, juste au bord d'une rivière. Elle se recroquevilla sur elle-même, assise sur le sol, ramenant ses jambes contre sa poitrine et les entourant de ses bras pour y cacher son visage. Elle resta ainsi de longues minutes avant de sentir quelque chose de froid et humide contre son bras. La brune sursauta et leva brusquement la tête tout en se reculant et ouvrit de grands yeux lorsqu'elle s'aperçut qu'un grand loup blanc se trouvait devant elle et que c'était lui qui avait appuyé sa truffe contre son bras. L'animal tenta de s'approcher mais Mia recula davantage, effrayée mais elle fut surprise de voir qu'il semblait triste de la voir agir de la sorte. Cela lui rappela son compagnon à quatre pattes quelques années auparavant et réalisa que son petit Quixy n'était pas un chiot mais un louveteau. Elle renifla légèrement avant de tendre une main tremblante vers le loup qui y frotta doucement sa tête d'un air soulagé. Mia grattouilla l'arrière de ses oreilles avec un sourire triste avant d'à nouveau éclater en sanglots, surprenant Quixy qui s'empressa de se coller à elle pour essayer de la consoler. Il posa son museau sur l'épaule de la jeune femme qui passa ses bras autour du cou de l'animal pour le serrer contre elle. Épuisée, elle finit par s'endormir là, appuyée contre son ami à quatre pattes. Précautionneusement, le loup s'allongea, emportant Mia qui se retrouva couchée elle aussi, entourée de la masse de poils de l'animal qui posa sa tête sur ses jambes dans un signe de protection et s'endormît à son tour.
À nouveau, la jeune femme retournait tous les jours dans la forêt pour passer du temps avec son compagnon poilu. Leur rituel était toujours le même ; Mia était assise par terre, occupée à réviser tandis que Quixy était roulé autour d'elle, montant la garde. De temps en temps, il tournait sa tête vers elle et montrait son mécontentement en soufflant bruyamment et la jeune femme, amusée, prenait un moment de pause pour le grattouiller derrière les oreilles puisqu'il aimait particulièrement ça. Mais un jour, alors qu'ils étaient tranquillement installés comme à leur habitude, ils furent dérangés par une voix criarde que Mia détestait plus que tout.
« Toi ! Qu'est-ce que tu... c'est quoi ça ?! Fiche le camp ! » cria sa belle-mère en lançant un bout de bois sur Quixy qui n'apprécia pas la chose.
Mia se retourna et se leva vivement en voyant la femme de son père prête à lancer un gros caillou sur le loup. Elle m'en empêcha en lui tenant le bras mais sa belle-mère ne se laissa pas faire. Elle lâcha le projectile avant de saisir le poignet de Mia et de l'entraîner a sa suite, vers la maison. Quixy tenta de les suivre mais la brune lui fit un signe de tête pour le maintenir a l'écart. Et comme elles sortaient de la forêt, l'animal n'osa pas désobéir et resta là, impuissant. Mia, quant à elle, fut forcée de suivre sa belle-mère jusqu'à sa chambre. Une fois dans la pièce, elle lui jeta au visage un sac de voyage qu'elle pointa rageusement du doigt.
« Tu prends tes affaires et tu te casses d'ici ! »
Sur ce, la belle-mère de Mia sortit de la chambre et claqua violemment la porte, laissant la jeune femme seule et complètement sous le choc. Mais ne voulant pas rester là une minute de plus, elle obéit et rassembla les quelques affaires qu'elle possédait et à peine eut-elle terminé qu'un cri déchirant venant du fond du jardin retentit, lui glaçant le sang et faisant immédiatement couler ses larmes le long de ses joues. Elle finit par se reprendre après quelques secondes et se hâta de partir de la maison, sans oser retourner vers les bois, de peur de découvrir ce qui était arrivé à Quixy.
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Wolfgang
FanfictionSouffrant de troubles post traumatiques à la suite du décès de sa mère, Mia s'est enfermée dans un mutisme dont personne n'a jamais réussi à l'en faire sortir. Elle se réfugie régulièrement dans la forêt où elle fait la connaissance d'un petit louve...