Chapitre huit

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Rey et Ben s'observaient, sans bouger, scrutant chaque indice d'un plausible mouvement chez l'autre. Les sourcils froncés de Rey, la transpiration sur son front, sa bouche entrouverte sur sa respiration haletante se reflétaient à l'identique sur le visage du jeune homme face à elle. Seuls leurs sabres brisaient le silence, dans un grésillement parasite. Ils lisaient en l'autre comme un livre ouvert, un livre évident. Chaque mouvement à peine pensé était contré. Rey feinta en déplaçant légèrement son talon droit, et donna l'assaut en pivotant sur son autre pied. Il ne baissa pas sa garde et les coups de sabres reprirent à une cadence presque insaisissable. L'herbe s'arrachait sous leur pas et même si la pluie les menaçait, aucun ne laisserait l'autre s'imposer. Ils s'étaient accordés sur le non-recours à la Force, ils avaient besoin d'un combat physique, purement mécanique. Rey se doutait aussi que cela serait trop à supporter pour Ben. Sa fragilité était inquiétante. Il devait exprimer ses émotions et la violence colérique de Kylo Ren était juste l'exacerbation de son besoin d'extérioriser dans l'effort physique sa douleur. Mais les bienfaits de l'exercice était partagé. Rey éliminait aussi sa frustration et l'épuisement qu'elle commençait déjà à ressentir lui était salvateur. Ils combattraient jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus se mouvoir et leurs esprits seraient alors en paix pour quelques instants.

La pluie mit sa menace à exécution, et leurs gestes se retrouvèrent moins précis, leurs appuis moins solides. Rey glissa, et c'était avec un genoux à terre qu'elle para les assauts de son partenaire impitoyable, pendant de longues minutes. Il la combattait avec honneur et sans aucune retenue. Elle finit par trouver l'occasion de se relever, d'un bond vers l'arrière, sans cesser de repousser le sabre à la lumière perçante. Elle le fit reculer, il s'enfonçait dans la boue, incapable de correctement s'éloigner pour riposter dignement. Le pluie collait les cheveux sur leurs visages. Ça devait difficile. Dans un réflexe qu'il parvint à peine à contenir, Ben eu envie d'utiliser la Force. Il reprit ses esprits dans la seconde suivant le mouvement faible de ses doigts mais cela avait suffit à Rey. Elle intensifia son attaque, jusqu'à le faire plier. Il tomba en arrière, et déjà elle s'asseyait, victorieuse, sur son torse, les jambes enserrant les côtes. Elle posa son sabre désactivé sur le sol, les gouttes de pluie glissant de son visage sur le sien. Il posa sa main sur sa cuisse. Il se fichait d'avoir perdu: sentir son poids sur lui, son regard satisfait qui le toisait, c'était grisant. Bien plus que ne l'était la victoire.

Elle finit par bondir sur ses pieds pour l'aider à se relever. Sa main gelée tremblait. La sienne aussi. Mais sa prise était solide et ils se pressèrent jusque chez eux, sans se lâcher. Ils étaient trempés. Ils considérèrent un instant de se déshabiller et de jeter dans le lit. Mais il fallait d'abord s'étirer. Ils attisèrent le feu, pour se réchauffer plus rapidement et tendirent au maximum leurs muscles endoloris. Ils laissèrent finalement leurs vêtements sécher et s'enroulèrent dans les couvertures, assis en tailleur, contre le mur. Ben se concentrait sur la douleur qui le tiraillait. Chaque picotement, chaque contraction de muscle était appréciable et lui rappelait sa faiblesse. Il était humain et naturellement limité. Il ne pourrait aller au-delà de son corps et de ses limites. Si cette pensée l'avait rendu fou dans le passé, aujourd'hui, elle le rassurait, comme s'il renouait pour de bon avec Ben.

Rey faisait quant à elle face à un tout autre combat intérieur. Son envie de plus était revenue. Elle devait trouver des réponses. C'était comme lorsque la Force s'était éveillée en elle, Luke lui avait appris à la contrôler et à s'en servir. Elle ferma les yeux, bien décidée à essayer de le consulter à ce sujet aussi. Dès que le pluie cesserait elle irait brusquer sa rencontre, sur leur rocher. Elle savait qu'il répondrait à son appel. Et elle avait besoin de ses conseils.

Elle s'était excusée auprès de Ben qui somnolait, la tête sur son épaule. Elle embrassa sa joue :

« Dors un peu, je reviens. »

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