Chapitre 6

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Adie,

Marie et moi regardons les deux Allemands partir en direction de la route. Je ne peux m'empêcher de souffler de soulagement. Je récupère un rythme cardiaque normal.

_ Merci Marie. Tu viens de me sauver la vie.

J'ai du mal à ne pas céder à ma tristesse, savoir qu'elle est morte dans mon époque me fend le cœur. Je tente de savourer chaque minute passée avec elle. Elle répond gaiement.

_ C'est normal ! Tu veux venir chez nous ? Papa ne dira rien, surtout ce soir. Maman est un peu malade, mais vu la situation, elle n'y verra aucun inconvénient.

Nous regardons un avion passer, je réfléchis un instant à sa proposition, un repas chaud et un endroit à peu près sûr me tentent. Mais je ne dois pas perdre de vue mon objectif. J'ai réussi à sauver la vie de Nate et je dois à présent rentrer chez moi. J'aimerais connaître mon arrière-grand-père et grand-mère, mais surtout ma grand-mère. J'aimerais sauver plus de vie. Mais je n'ai pas le droit. Je dois sauver la vie pour laquelle je suis venue et rentrer chez moi. Je dois donc retourner à Bayeux. Le problème c'est comment ? Je pense un instant lui demander si on peut me déposer, mais je ne peux pas me permettre de faire prendre le moindre risque à ma famille. Je dois être à une heure de route à pied. La nuit me sera favorable et le débarquement occupera les Allemands.

_Merci pour ta proposition, mais je vais rentrer chez moi maintenant.

_Je suis contente de t'avoir connu, et n'hésite pas si tu as besoin. Tu sais où je vis.

_ Restez bien en sécurité. Bayeux sera libre dans à peine deux jours. Tout ira bien, lui certifié-je.

_Comment peux-tu en être aussi sûre ?

Elle croise les bras en me fixant, surprise.

_J'ai un instinct très fort. Je le sens.

_ Espérons que tu dises vrai.

Je lui accorde un clin d'œil et je la serre dans mes bras. Ma grand-mère est une jeune femme courageuse, cela me peine énormément de savoir que dans mon monde, elle n'existe plus. Elle me manque déjà. J'aimerais lui dire que son père va mourir d'une maladie dans moins de cinq ans et qu'elle devra s'occuper de sa sœur, car sa mère deviendra dépressive et sera morte avant ses vingt et un ans. Mais que tout ira bien, malheureusement, je ne peux pas. Je me contente de la serrer dans mes bras, le cœur lourd. Une larme émerge au bord de mes yeux que je m'empresse de ravaler.

_ Viens juste une minute que je te donne au moins de quoi manger.

Je voudrais refuser, mais je la suis gentiment jusqu'à sa maison, j'ai envie de profiter un peu de sa présence. Nous entrons et je vois sa mère devant une tasse de thé.

_Où est papa ?

Sa mère lève son regard vers Marie et répond nonchalamment.

_ Il est dans la chambre avec ta sœur, elle a eu très peur.

Marie hoche la tête, puis se tourne vers moi.

_ Je te présente une amie, elle doit partir pour Bayeux. Je vais lui donner un peu de provisions.

Sa mère et moi suivons Marie du regard quand elle quitte la pièce. Je lève un sourcil interrogateur, tandis que mon arrière-grand-mère prend la parole en me servant une tasse de thé.

_ Viens, il y a encore du thé. Marie a le cœur tendre, elle est partie vous chercher à manger dans la cave.

_ Merci.

Le Médaillon aux trois vies ( Sous contrat d'édition) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant