Aux alentours de deux heures du matin, Adélaïde veillait toujours. Sachant pertinemment qu'elle n'arriverait pas à s'endormir cette nuit-là, et ses dons lui permettant de se passer de sommeil, elle décida de s'aérer au gré de la nuit fraîche. De peur de réveiller Fluffy, elle traversa la porte de sa chambre en dématérialisant son corps, puis descendit rejoindre le sas d'entrée.
Une fois dehors, Adélaïde inhuma les parfums qui habillaient son jardin plongé dans l'ombre, faiblement éclairé par les étoiles et la demi-lune. La rosée sur le gazon, les imposants résineux qui entouraient la Seyllikeen's Mansion, les pivoines, l'herbe fraîche... C'était une atmosphère particulière qu'elle appréciait énormément.
Elle se rendit au grand kiosque qui s'élevait au fond du jardin, dans un espace à l'abris des regards. Celui-ci était couvert d'une peinture blanche usagée, qui lui conférait un côté vintage. Surélevé d'un mètre et demi par une estrade en pin vernis, à laquelle on accède par un escalier, ce kiosque était délimité par un cordon fin, recouvert de glycines. Aux poutres du toit pendaient quelques lampions de tailles différentes, rose poudré et menthe claire. C'était un cadre magnifique qui attisait l'imagination.
S'approchant d'un des coffres que l'on trouvait dans le kiosque, Adélaïde en sortit des pinceaux, une palette et des pots de gouache. Elle effectua habilement quelques mélanges, versa un peu d'eau dans un vert, puis découvrit sa toile du grand drap qui la protégeait. Le chevalet ajusté à sa hauteur lui permettait de peindre debout. Elle continua alors son œuvre entamée.
Ses premiers coups de pinceaux habiles cessèrent lorsque la jeune Seyllikeen sentit une présence humaine dans les environs. Elle chercha un potentiel intrus de son regard perçant, usant de ses pouvoirs pour détecter une éventuelle chaleur, un mouvement, une ombre. De dos à son tableau, fouillant toujours les environs, elle baissa la garde lorsqu'elle fut certaine qu'il n'y avait personne.
Elle se retourna et eut un sursaut en voyant un individu qu'elle ne connaissait que trop face à elle. Nonchalamment appuyé contre une poutre en bois, un t-shirt immaculé et un short bleu marine sculptant son physique athlétique, un jeune homme aux cheveux blonds très clairs et aux yeux bleus translucides la fixait d'un air mauvais.
- Bonsoir ma belle, entama-t-il.
Adélaïde tressaillit de colère et sentit cette dernière envahir ses veines. Si son corps rougissait sous l'effet de ce sentiment puissant, il serait à l'heure-même écarlate.
- Tu m'as manqué, poursuivit-il face à son silence.
- C'est loin d'être réciproque, lui répondit-elle sévèrement. Vous avez été banni de cette maison, de ce jardin et même du Jardin de Rêves, alors quittez ces lieux immédiatement.
- Sinon quoi ? répondit-il d'un air de défi. Tu vas me tirer la langue ? Tu n'as même pas réussi à me repérer alors que j'étais derrière toi. Tu es vulnérable. Et tu es seule.
La jeune femme serra les poings pour contenir sa rage. Il avait raison. Et cela accroissait son courroux. Et lui s'en amusait.
- Outrepasser le périmètre de sécurité métaphysique n'aura pas été chose aisée, mais le jeu en valait la chandelle, ajouta-t-il à son égard, un sourire chapardeur illuminant son visage.
Adélaïde desserra ses poings, soupira de lassitude et rangea son matériel. L'inspiration l'avait quittée et le kiosque féérique de son enfance n'égayait plus sa nuit.
- Alors comme ça tu joues les cachotières en sortant secrètement avec le séduisant et richissime Christian Wyndsore ? questionna rhétoriquement et méprisamment l'individu. N'obtenant pas de réponse, ni même un regard foudroyant comme il l'espérait, il en rajouta :
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Le jardin de Rêves
ParanormalAu cœur d'un immense zoo luxuriant, aux décors sophistiqués agrémentés de plantes et fleurs aussi exceptionnelles que rares, une jeune Astra travaille chaque jour en tout anonymat. Fille du propriétaire du zoo, le richissime Léopold Seyllikeen, Adel...