Chapitre 3

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Le jeune homme devait trier, signer et lire une masse importante de paperasse provenant des multiples clients de son entreprise de spot publicitaire. Tous les jours se ressemblaient, les mêmes demandes, les mêmes plaintes, et surtout, le même patron. Car oui, son patron était constamment sur leur dos, leur demandant de donner le meilleur d'eux même, si ce n'était plus. Heureusement, le jeune homme n'était pas seul et toute son équipe supportait tant bien que mal le petit homme trapu et à moitié chauve qui leur servait de PDG.

Soupirant pour la millionième fois depuis le début de la matinée, il continua a faire défiler lentement les images s'affichant sur l'écran de son ordinateur, toutes aussi désespérantes les unes des autres. Impossible de trouver le graphisme parfait pour leur plus gros client, un vendeur de glace renommé dans tous les Etats-Unis, et qui cherchait un slogan accrocheur pour sa nouvelle publicité télévisée. Il lui en avait proposé des dizaines, sont équipe y travaillant jours et presque nuits, et cela depuis plusieurs semaines, mais rien à faire. L'homme les avait copieusement insulté avant de leur donner un ultimatum: sa publicité dans un délai d' une semaine ou son changement de boîte pour une concurrence "à la hauteur de ses espérances". Honnêtement, il s'en foutait royalement de voir partir l'homme d'affaire au visage porcin, un imbécile en moins à supporter. Cependant, il lui était impossible de relâcher le gros poisson dans l'océan du business alors qu'ils avaient eu tant de mal à l'attraper et le convaincre qu'ils étaient les meilleurs.

Il s'affala dans son siège, les bras ballants, le regard tourné vers le plafond avec désespoir. Ils n'arriveraient jamais à satisfaire ce client avec le peu de temps qu'il leur avait attribué. Malgré son cerveau qui marchait à cent à l'heure, impossible de trouver une idée potable ou même acceptable. Ils avaient usé tout ce dont leurs capacités relevaient. Ses espoirs s'envolaient, s'écoulant avec la fine pluie qu'il tombait depuis plus de deux heures. Il se tourna vers la baie vitrée de leur bureau commun à lui et ses cinq autres collègues, tous autant désespérés que lui. L'atmosphère était pesante et personne ne parlait. Tous se regardèrent dans le blanc de l'œil, tous pensant la même chose: on y arrivera jamais. Il soupira, passant la main dans sa masse de cheveux blonds, puis repris son observation éreintante, ses yeux bleus fixés sur un écran beaucoup trop clair pour lui.

"Allez Steve, reste pas planté là à te faire du mal" lui dit son collègue Jack, une main sur son épaule, "viens prendre un petit café, je sens que tu en as besoin..."

C'était une proposition alléchante mais qu'il devait refuser. Il avait un besoin vital de ce temps pour continuer son travail, même si ce n'était pas l'envie qui lui manquait pour quitter son bureau couvert de papier et de tasses de café vides, montrant son état de désespoir total.

"Non désolé Jack, une autre fois" répondit-il en souriant faiblement.

"Y'aura peut être pas d'autres fois..." murmura son collègue afin que les autres ne l'entendent pas, voulant très certainement ne pas accentuer cette atmosphère morbide qui régnait dans leur bureau.

Après tout, il avait raison. Peut être que demain, ils auront tous fait leur valise et jeté à la porte à coup de glace bon marché au fesses. Cette pensée fit grimacer Steve qui hocha de la tête.

"Ok, tu as gagné" fit-il en haussant les épaules, battu.

Jack sourit et tous deux s'engouffrèrent dans le large couloir menant à la machine à café de leur étage. L'endroit était désert, et les deux collègues purent discuter à leurs aises:

"Purée Steve, qu'est-ce qu'on va faire? Et ce putain de boss qui ne nous laisse aucuns répits! Moi je te dis, il nous déteste, c'est pour ça qu'il n'essaie même pas de marchander quelques semaines de plus avec Monsieur Crème Glacée!"

"Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse", répondit sombrement le jeune homme," nous sommes coincés entre deux hommes qui ne nous respectent pas, à partir de ce moment là, il faut savoir les surprendre, leur montrer du neuf."

"Du neuf?!" s'exclama Jack, fronçant les sourcils jusqu'à s'en donner mal à la tête, "Mon cul oui, on leur en a proposé du neuf, du jamais vu même, mais ces deux là sont au moins d'accord sur une chose, nous foutre à la porte!"

Ça, il avait raison. Steve resta silencieux. Que pouvait-il répondre à ces paroles qui ne pouvaient être que plus justes? Simplement, il n'avait aucunes solutions à apporter à son équipe. Ils étaient dos au mur. Une voix retentit dans tout le couloir, faisant sursauter les deux collègues. Ils se tournèrent lentement, leurs cafés à moitié vides à la main.

"C'est comme ça que vous trouvez l'idée du siècle pour Monsieur Hershel?" aboya un petit homme à l'horrible cravate violette se tenant devant eux.

Il observa les deux hommes qui ne savaient pas trop comment dissimuler leurs gobelets aux yeux de leur patron. Ce dernier fronça les sourcils, ses narines frémissant de rage à la vue de ses employés se la coulant douce.

"Je vous préviens", continua t-il en postillonnant avec force, "je veux vos résultats sur mon bureau ce soir, sinon, ce n'est plus la peine de revenir demain messieurs!"

"Nous avons encore quatre jours monsieur" répondit Steve, prenant sur lui pour rester calme.

"Plus maintenant Rogers."

Le petit homme leur tourna le dos, mais sa voix continua de résonner dans le couloir:

"Ce soir, sur mon bureau!"

Ils se regardèrent, plus désespérés que jamais. Comment allaient-ils pouvoir trouver et mettre en place quelque chose de potable avant ce soir? Sans un mot, ils se précipitèrent vers leur bureau. Steve Rogers avait toujours été un meneur, et il devait reprendre les choses en main.

"Ok tout le monde, assez rit! On doit rendre quelque chose de bien pour ce soir, alors je compte sur vous!"

Il avait annoncé cela de la manière la plus délicate et rassurante qu'il avait pu, pourtant, ses collègues le regardèrent avec autant de désespoir qu'il en ressentait lui même. Il s'assit à son bureau et observa l'écran de son ordinateur, affichant un étrange message en lettres rouges:

"Coucou Steve, pardonne moi cette intrusion intempestive, mais je débarque dans ton sympathique bureau dans quelques minutes, alors bouge tes fesses pour nous accueillir comme il se doit!"

Steve parut surpris. Manifestement, son ordinateur avait été piraté, et il savait très bien par qui. Mais qui était ce "nous" dont il parlait. Qui pouvait bien accompagner Stark? C'était à n'y rien comprendre. En tout cas, il n'avait pas vraiment le temps de parler du bon vieux temps et son intrusion commençait déjà à l'agacer. Tony Stark s'était toujours pris pour le roi du monde, ce qui l'exaspérait au plus haut point.

Un bruit sourd à la porte le sortit de ses pensées. Son cœur se mit à battre plus vite. Ça ne pouvait être que lui. Ses collègues ne semblaient pas avoir entendu, trop plongés dans leur travail, motivés par la force du désespoir. Steve se leva calmement et vînt ouvrir la lourde porte de son bureau. Sans grand étonnement, il tomba nez à nez avec un Tony Stark pâle et sentant fortement l'alcool. Celui-ci lui adressa un sourire radieux et une grande tape sur l'épaule.

"Rogie chéri, te voilà enfin! Je dois t'avouer que pirater le système de sécurité de cet immeuble fut plus qu'un jeu d'enfant!"

Evidemment, le milliardaire n'avait pas perdu sa sale habitude de se vanter de tout et de rien, ce qui agaça le jeune homme.

"As-tu un peu de place pour moi et mon nouvel ami gothique ici présent?"

Steve voulu lui répondre que non, il n'avait pas de place pour lui et son stupide ami, qu'il ne voulait pas le voir et surtout, qu'il n'avait pas de temps à perdre. Cependant, les mots lui restèrent en travers de la gorge lorsqu'il vit le-dit ami de Tony Stark, dissimulé derrière son dos, le regard plus glacial que jamais, et un sourire sur les lèvres qu'il ne connaissait que trop bien. Il ne pu s'empêcher de reculer d'un pas. Devant lui se tenait un de ses pire ennemi, Loki.

Chronique d'un Ass GuardianOù les histoires vivent. Découvrez maintenant